Le système de santé est dans le collimateur du Medef

Publié le 16 juin 2014 par Blanchemanche
Jean-Christophe Chanut

Le Medef prône une rénovation complète du sytème français de santé pour limiter les déficits

Décidément, le Medef est à l'offensive ! Après avoir attaqué le gouvernement sur le pacte de responsabilité, notamment la fiscalité pesant sur les entreprises et la « rigidité » du marché du travail, l'organisation patronale concentre maintenant son tir sur le système de santé, en particulier l'hôpital public.Par la voix de Claude Tendil, président de sa commission « protection sociale », le Medef considère comme "urgent" de mener une réforme structurelle du système de santé, qui ne peut, selon lui, se satisfaire de la politique de "rabot" menée par le gouvernement. Pour ce faire, le Medef a décidé de lancer une campagne d'information sur le sujet. Il a des idées très arrêtées sur ce qu'il conviendrait de faire.

130 milliards de déficits accumulés en 30 ans

D'abord, l'organisation patronale sonne le tocsin. "Le système de santé français, qui était considéré comme un des meilleurs systèmes au monde, est en train de se dégrader" a déclaré Claude Tendil pour qui « l'assurance maladie a accumulé en 30 ans 130 milliards d'euros de déficits, auxquels vont s'ajouter cette année 6 nouveaux milliards".
Ensuite, le Medef fait miroiter de très grosses économies. "Nous, on pense qu'il y a assez d'argent dans le système de santé, et, s'il était mieux utilisé, non seulement on supprimerait le déficit de 6 milliards mais on dégagerait des ressources pour financer l'innovation, la recherche, le développement des industries de santé", a-t-il ajouté.
Le système hospitalier, assure Claude Tendil, peut être réformé "sans créer de traumatismes sociaux majeurs". Le Medef précise même qu'il y aurait possibilité de dégager entre « 10 et 20 milliards d'euros en 5 ans », notamment en rationalisant la gestion des hôpitaux publics, « responsables » de 37% des dépenses de santé. Pour l'organisation patronale, l'hôpital public est trop « administré » et pas assez « managé »Toujours selon Claude Tendil, le Medef a la "légitimité" à s'exprimer sur la question, en tant que financeur à hauteur de "44%". "Les contributions au titre de l'assurance maladie représentent pour les entreprises une charge de 70 milliards d'euros par an".Pour parvenir à cette "refondation" du système de santé, le maître-mot du Medef c'est « la contractualisation ». Il conviendrait de lier sur des engagement pluriannuels la Caisse nationale d'assurance maladie et les autre acteurs de la santé, publics bien sûr, mais aussi le secteur hospitalier privé et l'industrie du médicament sur des engagements pluriannuels.

Un ticket modérateur d'ordre public

L'organisation patronale plaide aussi pour une « offre de soins graduée » et une véritable « médecine de parcours ». Il souhaite également "davantage responsabiliser l'ensemble des acteurs du système de santé" : professionnels de santé, organismes gestionnaires et patients… via l'instauration d'un « ticket modérateur d'ordre public »par acte et/ou par parcours de soins qui ne serait remboursé ni par l'assurance maladie ni par les organismes complémentaires (3 milliards d'euros environ économisés par an).Mais, surtout, le Medef propose de reconstruire l'organisation du système de santé sur trois piliers : assurance maladie, complémentaires santé et assurés, via des sur-complémentaires facultatives. 

Les complémentaires santé devrait suppléer la "Sécu"

Le premier pilier comprendrait un "panier de soins", c'est-à-dire l'ensemble des produits de santé et des actes curatifs ou préventifs remboursés par la Sécu. Le Medef propose de "fortement le réduire" et de le "recentrer" sur les soins et services "essentiels", ce qui représenterait 10 milliards d'économie.Le deuxième pilier serait un socle obligatoire pour les seuls salariés du privé au niveau d'un panier de soins supplémentaire (qui s'ajouterait au premier) défini par un accord national interprofessionnel (ANI). C'est sur ce deuxième pilier que les complémentaire santé seraient compétentes.Le reste de la couverture santé, soit le troisième pilier, serait à la charge des assurés qui pourraient se tourner vers des "sur-complémentaires" s'ils le souhaitent.Au total, selon le Medef, la mise en œuvre de ce scénario "se traduirait par une diminution des dépenses d'assurance maladie obligatoire de l'ordre de 15 à 20 milliards d'euros d'ici 2017". Surtout, pour le Medef, ce schéma aurait le mérite de conduire à une baisse des cotisations « maladie » (acquittées jusqu'à présent à hauteur de 12,80% par les entreprises et 0,75% par les salariés).En revanche, pour les salariés, un tel système se traduirait mécaniquement par une revalorisation du coût des complémentaires santé (individuelles comme de groupe)...