Roquefort d’abord – Société d’accord

Par Gourmets&co

Ce fromage du sud de l’Aveyron est sans doute l’un des plus anciens et des plus connus à travers le monde. Depuis la nuit des temps, la fabrication a peu varié gardant ainsi une identité forte et un goût qui est aujourd’hui ce qu’il devait être… avant. Par contre, résultat d’une exigence sanitaire typique de notre monde actuel, les fromageries qui fabriquent le roquefort étaient plus de 800 dans les années 1930, 8 aujourd’hui ! C’est dire la concentration économique que le secteur a subie.

Le roquefort est issu du ramassage du lait des quelques 750 000 brebis, de race Lacaune, une des meilleures races laitières du monde, élevées dans une région parfaitement délimitée d’une centaine de kilomètres autour de Roquefort-sur-Soulzon. Exigence de fraîcheur et de qualité, le ramassage du lait cru ne doit pas excéder 24 heures. Dans la laiterie, arrive le fameux Penicilium roqueforti, l’âme du fromage, mis soit dans le lait cru soit ensemencé lors de la mise en moules des « pains » de roquefort. Il existe de nombreuses souches de Penicilium qui suivant le choix vont donner sa spécificité de goût au fromage. Ils seront ensuite percés sur leur hauteur pour expulser le gaz carbonique de la fermentation et permettre ainsi au Penicillium de s’étendre dans tout le pain pour donner à la coupe cette merveille de fromage.

Dans les immenses caves de la marque Société situées sur la commune de Roquefort-sur-Soulzon seule habilitée à les abriter, les fromages reposent sur des claies et les courants d’air permettent aux fromages de bleuir. Ces caves naturelles se situent dans le fameux piton calcaire du Combalou donnant une température constante entre 7° et 9°. On enrobe ensuite les pains dans un papier d’étain pour stopper le processus de bleuissement puis l’affinage se déroule durant une période de trois mois au minimum.

À la dégustation, les variations de saveurs vont du très persillé et très gras au goût de bleu très prononcé jusqu’à l’inverse d’un fromage plus doux et moins persillé. Idéalement, la moisissure doit être bien répartie dans la pâte, et la croûte assez fine et luisante. Il se déguste légèrement frais surtout en été car il supporte mal les très grosses chaleurs. Il prend de la puissance au fur et à mesure de son vieillissement. Le roquefort se marie bien avec des fruits, traditionnellement des pommes ou des poires. Elles adoucissent la virulence du bleu et sont un bon moyen d’initier les enfants à ce goût. Il suffit d’évider une pomme et de remplir le creux par du roquefort. On mord dedans et c’est délicieux. Le chef Michel Bras aime une tarte aux figues ou aux pommes acides avec le roquefort servie avec un trait de vieux Banyuls. Michel Guérard servait à une époque un feuilleté au roquefort avec des noix et du jambon d’York.

Accords de Roquefort

Traditionnellement, le roquefort s’associe avec un Porto Vintage ou un bon Rivesaltes, selon Marie-Anne Cantin, fromagère à Paris. Pour Philippe Bourguigon, sommelier et auteur du livre « L’accord Parfait », un Jurançon « peut jouer le même rôle qu’un Sauternes et réaliser avec le roquefort un subtil mariage par contraste de sensations ». Mais pour l’auteur c’est le Sauternes qui est « le comble du raffinement surtout avec un roquefort très gras comme le Barragnaudes de Société pour une harmonie exceptionnelle de texture, de puissance, voire de violence, et en même temps de grande douceur. »

Ces derniers mois, la marque Société, forte de son leadership dans les fromages de roquefort, a exploré de nouvelles voies vers des accords apparemment atypiques, sinon risqués, mais qui se sont révélés intéressants à découvrir et surtout à goûter.
Xavier Thuret, Meilleur Ouvrier de France fromager en 2007, est chef fromager de la marque, était aux commandes de ces différents tests. Société met sur le marché trois roqueforts d’affinage et de saveurs différentes : les Caves Barragnaudes, les Caves Templiers, et le 1863. Ces variations de saveurs complémentaires, du plus puissant au plus doux, du plus ou moins persillé, et du plus ou moins gras, permettent des recherches d’alliances avec de nombreux produits. Vins, whiskies, et bières par exemple.

Bières et roquefort

Elisabeth Pierre est zytologue, plus simplement sommelière en bières. Elle découvre l’odeur enivrante du malt chaud et des hautes mousses dans la brasserie de Sochaux. Elle a 11 ans… elle ne quittera plus la bière. On la retrouve dans la filière brassicole pendant quelques années puis elle fonde « La Fille de l’Orge », son entreprise spécialisée dans la dégustation des bières. Son but : amener les bières de dégustation à table, faire connaître bières de dégustation et bières de soif, et la bière au féminin. Noble tache. Elle travaille actuellement sur le premier Guide Hachette des Bières, prévu pour septembre 2014.

Pour elle, les accords bières et fromages en général et roquefort en particulier sont passionnants. Avec Xavier Thuret, elle a sélectionné pour une dégustation des bières de brasseurs artisanaux qui chacun donne à sa bière un style et des saveurs particulières. Chaque bière était testée sur les trois roqueforts Société. La Blanche de la Tour, bière blanche de blé du Berry a un nez agréable et une belle amertume mais reste un peu doucereuse pour le Société Classique. Par contre La Yote, même région, plus puissante au même titre que la Vieux Tuyé du Jura, très maltée, presque fumée, au goût de bacon, s’accordent mieux avec le puissant Société des Templiers, le plus persillé des trois roqueforts. Pour les Caves Barragnaudes, on retiendra la bonne tenue de la Touraille, de l’Indre, à la couleur ambrée foncée et au goût nettement tourbé.

Elisabeth Pierre
www.lafilledelorge.fr
elisabethpresse@free.fr

Marie-Anne Cantin et le roquefort

Elle fut une des premières femmes fromager affineur de France, avec la Mère Richard à Lyon, il y a quelques dizaines d’années. Elle a fourni et continue de fournir les grands chefs étoilés, a fondé l’Association pour le respect des traditions fromagères, pour promouvoir le lait cru, et encourager la protection des races animales et leur alimentation. Elle est membre du taste-Fromage et de la Guide des Fromagers. Sa boutique parisienne est une sorte de temple du fromage, de tous les fromages, aux affinages parfaits pour chacun d’entre eux. Sans se soucier des « tendances », elle affine dans le respect du fromage vendu au maximum de sa vraie saveur.

Son livre indispensable pour tout amateur de fromages vient d’être réédité et mis à jour. Complet, passionnant de bout en bout, elle nous fait découvrir les traditions fromagères et leurs histoires, la fabrication, et les AOC. Chaque fromage a sa fiche technique et des commentaires de dégustation. Pour finir, des conseils de conservation, d’accords vins et fromages, de composition d’un plateau suivant les circonstances et les envies, et quelques recettes. Le style du livre est à son image : franc, libre et passionné.

Marie-Anne Cantin aime le roquefort. Elle propose, dans sa boutique, une des plus belles variétés de styles et de marques. « Dans les bleus, je ne suis pas très Bleu d’Auvergne ou Bleu des Causses. J’aime la Fourme d’Ambert et le Roquefort. Un fromage puissant, qui a du caractère, comme celui que je fais affiner dans les Caves Barragnaudes en accord avec Société. Ils sont onctueux, sans talons, et il faut que le bleu aille jusqu’à la croute. Chez Société, mon favori est les Barragnaudes. Après un repas, il faut de l’onctueux et un peu de typicité et les Barragnaudes est l’idéal. On peut faire des feuilletés, des soufflés au roquefort et même sur des petits toasts à l’apéritif. Avec les Barragnaudes, j’aime boire un Porto, un Sauternes ou un Châteauneuf du Pape, rouge bien sûr. »

12, rue du Champ de Mars
75007 Paris
Tél : 01 45 50 43 94
contact@cantin.fr

Guide de l’Amateur de Fromages
Editions Albin Michel
320 pages – 21,90 €