26 août, notre ville se vide à vue d'oeil

Par Cantabile @reimsavant

Paul Hess

Dès le matin, la cour de la gare est remplie de soldats belges échappés de Namur et arrivés par Rocroi, qu'ils avaient gagné à pied.

Il y a des chasseurs à pied, de l'artillerie, du génie, de l'infanterie, de la cavalerie et quelques prêtres portant le brassard de la Croix-Rouge ; les vêtements de la plupart de ces hommes sont salis et déchirés. L'un d'eux est coiffé avec un képi du 91e français ; un prêtre l'est avec une casquette ordinaire à visière.

Un télégraphiste militaire auprès de qui je me renseigne, me donne une cartouche de son Mauser. "Souvenir de la Belgique", me dit-il, en m'expliquant que ce groupe représente une partie de la garnison de Namur, ou plutôt des 6 à 7000 hommes qui en restent, alors qu'elle comptait 40000 combattants.

- Un certain énervement peut être constaté parmi la population de Reims. Au bureau, tout à l'heure, un engagiste s'est étonné qu'il ne soit pas question d'évacuer. Depuis hier, l'affluence est considérable au service des "laissez-passer" fonctionnant à la Mairie. De nombreuses familles s'en vont. Notre ville se vide à vue d'œil.

Autour des évacués arrivant en foule, des groupes se forment, écoutant leurs récits fort impressionnants. Cet exode continu des habitants des Ardennes, la rareté des nouvelles que l'on soupçonne très graves et, au surplus la déplorable et malheureuse histoire du dirigeable, dont les journaux n'ont dit mot, ne sont pas pour rassurer nos concitoyens. Ils fuient.

- Aux "laissez-passer", un inspecteur du Travail de Charleville, nous apprend qu'aussitôt le départ du train qui l'a amené, la nuit précédente, les voies ont été coupées.

Un collègue me met en garde contre les laissez-passer délivrés à Pagny s/Moselle, le cachet de la mairie ayant été pris par les Allemands à cet endroit, d'après une dépêche communiquée par la sous-préfecture.

Source : Paul Hess dans La vie à Reims pendant la guerre de 1914-1918

Mauser 1914&1934

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre. Dérivé du Mauser 1910, le Mauser 1914, inventé par Josef Nickl, est un pistolet semi-automatique de calibre 32 ACP, il fonctionne selon le systè...

http://fr.wikipedia.org/wiki/Mauser_1914&1934

Un aller-retour à Reims

Liard, mercredi 26 août 1914

Grâce à cette circonstance, nous franchissons les postes sans l'ombre d'une difficulté, et nous arrivons à Liard à 4 heures du matin. Les automobiles, les voitures et les bicyclettes parties en même temps que nous, arrêtées fréquemment en cours de route, n'y arrivent que vers 10 heures.

A 11 heures et demi, départ en chemin de fer pour Laon, les wagons sont archi-combles. Les voyageurs partagent leurs provisions. A 14 heures et demi, arrivée à Laon, à 15 heures et demi, départ pour Reims où j'arrive à 17 heures. J'y trouve ma femme (très malade) en train de présider à l'installation d'un hôpital.

Marcel Marenco

01-charleville

Charleville, 4 août 1914 La distribution des prix a eu lieu le 12 juillet, et après une année de dur labeur, je me fais une joie de prendre un peu de repos, de passer les grandes vacances auprè...

http://www.cenelle.fr/charleville/01-charleville.html

L’auteur : Marcel (dit Jules) MARENCO

Marcel Marenco est né en 1867 à Saint Jean des Vignes (Saône et Loire), petit-fils d’un émigré italien, fils d’un contrôleur des Contributions, il est le dernier d’une famille de trois enfants.

Parcours professionnel :

à 10 ans, il entre comme pensionnaire au collège d’Autun d’où il sortira avec le baccalauréat. Il commence sa vie professionnelle comme maître d’étude, puis commis aux écritures dans un lycée. Après avoir passé plusieurs concours, il devient économe de lycée.

Pendant toute sa carrière professionnelle, il sillonne la France: Avallon, Caen, Saint-Quentin, Macon, Brest, Tours, Reims, Châlons-sur-Marne, Rochefort, Charleville...

Quand éclate la guerre en août 1914, il a 47 ans et occupe le poste d’Econome du Lycée Chanzy de Charleville depuis 5 ans. Il vit seul à Charleville: son épouse, elle aussi économe, exerce à Reims, (mari et femme n’ont pas pu obtenir d’être affectés dans la même ville), un de ses frères habite à Alger, l’autre à Paris, et sa mère vit en Saône et Loire (il a perdu son père vingt ans plus tôt).

A la déclaration de guerre, il décide, conscient qu’il va être témoin d’évènements hors du commun, d’écrire un journal dans lequel il inscrit au jour le jour, sa vie à Charleville, il prend des photos, glane et entasse objets et documents. Ce journal débuté en août 1914 prend fin brusquement en septembre 1917 le jour où il apprend le décès de sa femme, elle est morte deux ans plus tôt sans qu’il en ait été averti.
Après la guerre, il est nommé à Metz pour y réorganiser le lycée. Il continue sa carrière à Bordeaux, puis Sceaux et Vanves (région parisienne).

Il prend sa retraite en 1929 et partage alors sa vie entre la région parisienne et la Saône et Loire. A cette époque, il se remarie, le couple a cinq enfants.

Marcel Marenco décède en 1958 à l’âge de 91 ans.

Les extraits, où il est question de Reims, cités dans ce site viennent de son journal du Lycée Chanzy voir le lien ci-dessus

(extraits - © Marenco 2004)