Fenêtre sur crime

Publié le 01 septembre 2014 par Auroretaupin

Prix des lectrices de ELLE 2015 - Sélection d'août Policier
En lisant la 4ème de couverture, on peut s'attendre à un policier un peu lourdaud recyclant le déjà-vu personnage du frère doux-dingue surdoué qui déjoue des complots terroristes ... Pourtant il s'avère vite qu'il n'en est rien !
L'histoire pourrait sembler tarabiscotée mais vite, elle devient plutôt crédible. Thomas, le frère un peu dans son monde passe tout son temps sur Whirl360 (version fictive de Google Street View) et remarque ce qui semble être une femme en train de se faire étouffer à une fenêtre d'un immeuble new-yorkais. Il décide alors d'en parler à son frère Ray, notre héros, qui loin d'y prêter crédit et pas le moins du monde intrigué, accepte de se rendre à l'adresse indiquée au détour d'un rendez-vous uniquement pour calmer son frère.
Plusieurs autres histoires s'entre-mêlent : un chantage fait à un couple de politiciens, la mort pas si accidentelle du père, un historique de recherche internet indiquant "prostitution enfantine", les voix de la CIA et de Bill Clinton qu'entend Thomas et qui lui font tenir des propos assez peu crédibles face à la police ...
C'est justement tout ce qui touche à la crédibilité qui est très bien dosé dans ce livre. Le narrateur ne nous laisse pas croire qu'il faut prêter attention à toutes les divagations de Thomas sur la CIA et Bill Clinton, mais où placer la limite ? Ça l'empêche pas parfois d'avoir raison.
Au delà de la crédibilité des dires de ce personnage, il y a aussi la crédibilité de l'histoire : l'auteur rend bien dans le roman la difficulté d'être cru et entendu par la police - attestant de sa propre conscience de l'originalité de l'histoire qu'il nous sert et donc crédibilisant l'ensemble. On salue l'absence de grosses ficelles et de rebondissements invraisemblables - on se fait surprendre raisonnablement par l'auteur et c'est justement ça le bon dosage.
Dans ce roman policier polyphonique, l'auteur nous fait suivre principalement le héros Ray, qui doit s'occuper de la succession et de son frère Thomas, schizophrène léger à la mort de leur père. En parallèle, on suit également les " méchants" et autres personnages secondaires et leur donner voix au chapitre permet de mieux comprendre leurs motifs et intentions, et d'accéder à un point de vue un peu moins manichéen sur le déroulement des événements (si le calculateur Howard fait ce qu'il a à faire, c'est bien parce qu'il n'a pas le choix ; la tueuse Nicole ex-championne olympique ne fait que venger ses rêves ...)
Bref un bon policier qui se dévore en deux jours et respecte son contrat de nous tenir captif, sans toutefois vous laisser un souvenir impérissable

Fenêtre sur crime, de  Linwood Barclay - Belfond Noir