Film : Gemma Bovery

Par Gentlemanw

Troublant paradoxe, je suis un esthète, et pourtant je me nourris plutôt de mots, mais aussi de livres et de beaucoup (trop) d'heures dans les méandres des blogs et d'internet, finalement des images, peu de films. Je devrais être cinéphile, mais je n'ai pas le temps d'aller au cinéma, entre famille et activités. De plus les super salles de cinéma, tous conforts, avec même la 3D inutile, sont trop chères, seul ou avec mes enfants. 

Mais parfois, un coup de coeur, une envie, un hasard aussi, je pousse la porte d'une salle sombre, si possible avec ma compagne, et je redécouvre le plaisir du cinéma, grand écran, musique et bon film.

Le coup de coeur du mois est GEMMA BOVERY. Sans connaître réellement le sujet, en ne sachant pas qui est l'actrice principale, inversement en étant déjà saturé des mimiques de l'acteur principal, mais avec juste une minute croisée par la bande-annonce, et un soudain coup de coeur pour l'ambiance romantique, j'ai emmené dès la première séance, ma cinéphile chérie.

Je suis entré dans cette boulangerie, j'ai senti le pain, la farine, les spécialités sans sophistication, bien réelles, vraies dans leur interprétation. Fabrice Lucchini, en boulanger, dans un village tranquille de Normandie, le vert des paysages, les gouttes de pluie, la douceur de vivre, les pommes et soudain un rayon de soleil, Gemma Bovery, celle qui va tenir l'histoire. Une parenthèse d'émotions, la force d'une rencontre, d'un premier contact et d'un impossible roman de vie, avec un homme passionné de mots, de Flaubert. Doucement je suis entré dans les lieux, j'ai suivi les chiens dans les sous-bois, la silhouette émouvante de l'actrice Gemma Arterton. Sentiments, ennuis, snobisme, et un choix volontaire de caricature des caractères, et puis ce lien romantique, celui que j'aime dans les livres, dans les films en général. L'histoire suit son cours, les saisons, les errances de l'amour et le paradoxe du bien et du mal, du regard de l'un sur l'autre, de l'envie charnelle comme intellectuelle. J'ai aimé voir cette belle histoire et les touches de soleil sur la Normandie, dans un coin sans Paris, sans ville, mais avec des gens heureux, amoureux, malheureux.

Bon film sans être exceptionnel, mais délicieux pour nous couper de notre monde, brutal et violent (enfin surtout le journal télévisé, les séries ensuite), c'est une belle tranche de bonheur !


Je vous laisserai aimer, je vous laisserai détester car chacun a en lui une zone complexe entre raison et désirs, entre sentiments et attentes, entre réflexion et lâcher-prise pour croire ou non en la douceur d'un film. J'ai aimé ce film, je n'ai pas essayé de lui trouver des défauts, car il en a, mais ils font partie des choix de la réalisatrice, comme le sont ceux d'un écrivain. On ne réécrit pas le livre pour autant, on s'évade simplement, et cette balade normande fût une madeleine bovarienne, sagement modernisée.

D'ailleurs n'oublions pas que Flaubert n'est qu'un lointain prétexte pour un romantisme qui divague sur notre société actuelle, entre ville et province, entre nos rêves et notre réalité désirée. Et que le scénario provient non pas de notre grand écrivain mais d'une adaptation d'Anne Fontaine à partir du travail d'une dessinatrice-scénariste anglaise de BD : Gemma Bovery par Posy Simmonds.

  

Allez, filez vite avec votre compagne, votre compagnon, des pop-corns dans cette bulle de bien-être.

Nylonement