Médusées au musée | Hokusai au Grand Palais

Publié le 04 octobre 2014 par Generationnelles @generationnelle

La vague a submergé pas mal d’amateurs d’Art et les a mutés en amoureux d’Hokusai. L’artiste japonais revient offrir son monde flottant aux yeux des spectateurs du Grand Palais

Ses estampes ont fait rêver les plus grands artistes et fait fantasmer des décennies entières sur un Japon coloré et élégant. Mais l’oeuvre d’Hokusai est plus complexe que cela, c’est ce que propose de démontrer l’exposition du Grand Palais

« Chôsi dans la province de Sôshû ».
Série : Mille images de la mer.
©Rmn-Grand Palais (musée Guimet, Paris)/Thierry Olivier


A l’affiche : La fameuse vague à l’origine de tant de fantasmes. C’est elle qui introduisit l’art de l’estampe au XIX° siècle, mit des couleurs pastel aux unes du Japon Artistique, inspira Edmond de Goncourt (celui du prix, oui) les traités sur l’art japonais « Hokousaï » et à qui Henri Rivière rendit hommage dans ses 36 vues de la Tour Eiffel. Mais cette fameuse lame répond au doux nom  « dans le creux d’une vague au large de Kanagawa »  de la série Trente-six vues du mont Fuji. La barque emportée par la mer donne un esprit nettement moins zen au tableau. Et ce n’est qu’une des multiples choses qu’on apprend à l’exposition! 

Derrière la façade : S’il y a bien quelque chose qui étonne dans l’exposition Hokusai, c’est la diversité de travaux de l’artiste. Qui ça? Qu’il signe ses oeuvres Shunrô, Sôri, Taito, Itsu, Gakyo Rojin Manji ou Katsushika Hokusai. Le peintre a toujours voulu aller au bout d’un style comme un enfant avide de savoir. Et dans les 8 salles à la scénographie très épurée, c’est cette exploration artistique qui saute aux yeux ou plutôt est recherchée. Les oeuvres, petites et minces, brouillons d’estampes ou illustrations de livres sont à la hauteur de son talent, toujours délicates et soignées. Enfin pour le trait, car pour le thème… certains Yomihon laissent sans voix ou sollicitent le rire (comme « le pet » ou « les pèlerins en visite à la statue du Grand Bouddha », séparés de leur idole par un blanc textuel, véritable brouillard).

Au bord de l’eau : nouvelle recension illustrée
« Shinpen Suiko Gaden » 
©Katsushika Hokusai Museum of Art

Amateur de théâtre, l’artiste s’est plu très jeune à dessiner comme des caricatures les personnages de ses amis acteurs de Kabuki, véritables clowns ancestraux ou illustrer des poèmes bouffes Ryôku. Mais multi pinceaux, l’homme en quête d’un nouveau nom, comme en recherche d’identité, joue à la perfection au dramaturge graphique dans des illustrations violentes, frappantes, limites photographiques comme un manga moderne d’au Bord de l’eau de Bakin.

Cent vues du mont Fuji 
« Fugaku Hyakkei » 
©Katsushika Hokusai Museum of Art

Et le long de la rivière Sumida ou sur le pont Ryôguku, il n’est pas si loin ce monde suspendu, Ukiyo-e, des 53 étapes du Tukaido dans les 53 stations de l’an 9. Pourtant il ne faut que deux étages pour monter au 7° ciel et découvrir les vues aériennes hyper réalistes sur Edo . Le réalisme de ses photos journalistiques est palpable dans toutes ses estampes avec les prises de sake, les jeux d’osselets et surtout les toilettes et le shopping des femmes.

« Longue vue »
Série : Sept manies des jeunes femmes sans élégance 
©Galerie Sebastian Izzard LLC

Ces sujets féminins toujours pâles depuis ses débuts sont tantôt poétiques, avec une esthétique très minimaliste sur les kakémonos, tantôt tragiques comme ses courtisanes. Des images qu’il a cédées à sa mort à ses disciples et à ses admirateurs…


Au Grand Palais jusqu’au 20 novembre puis du 1° décembre au 18 janvier.