Mistinguett : un retour anachronique au Casino de Paris

Publié le 06 octobre 2014 par Ralph

Le spectacle musical "Mistinguett" est à découvrir depuis le 18 septembre 2014 au Casino de Paris, puis en tournée dans toute la France. Crédits photos : Ladli/VisionbyAG

PARIS, par Charles-Éric Perrin Gimet

Cela fait presque cent ans que Miss n’est pas parue si rayonnante au Casino de Paris et cette fois, nous devons son retour à un autre grand nom du spectacle parisien : Albert Cohen. Après Les 10 commandements, le Roi Soleil ou plus récemment 1789, les Amants de la Bastille, c’est au tour de Minstinguett, Reine des Années Folles de (re)voir le jour.

Pour raconter la création du premier show music-hall de l’histoire, ce sont près de 35 artistes qui se partagent la scène entre chant, danse et théâtre. Un minimum pour prétendre à la naissance du futur Broadway.

Une Miss qui (r)assure

Les années 20. Les mettre en scène sans édulcorer. Ne pas simplement traverser ces années folles, mais en saisir l’esprit. Faire de Jeanne Bourgeois, la Mistinguett que l’on reconnait dans ces frasques et ces chansons. Découvrir et redécouvrir aujourd’hui le Paris d’hier. Voilà le défi que s’est lancé Cohen il y a de ça dix ans, un pari d’envergure. Un pari juste relevé.

Soyons clair. La première chose qu’on attend, c’est Mistinguett. Un rôle qui demande une certaine classe, du charisme et une juste dose de sarcasme (et c’est vrai, accessoirement, parmi les plus belles gambettes de la capitale).
L’élégance de Miss en faisait une femme. Sa décadence en faisait son personnage et a construit son mythe.

Dans cet esprit, c’est sans se forcer que l’on peut apprécier la performance de Carmen Maria Vega. Guatémaltèque de trente ans, cette femme de caractère a naturellement toutes les qualités qu’on est en droit d’attendre (en plus des jolies jambes…) : chanteuse hors pair, actrice à l’aise et bien en place, juste impertinente et tellement grinçante.

Un seul bémol : un léger manque d’authenticité quand il est question d’attendrir son public, mais on lui pardonne tant il est dur de s’émouvoir d’une pareille audace !

Ce n’est d’ailleurs pas François Chouquet, metteur en scène du spectacle, qui nous contredirait en avouant que « Carmen est en effet un véritable cadeau pour un metteur en scène. Je n’ai pas eu à me poser la question du visage à donner à Mistinguett. Elle était déjà là au naturel et je n’ai eu qu’à la pousser vers ce qu’elle donnait normalement pour qu’elle devienne sur scène la Miss qu’on attendait ».

Entre fiction et réalité : La belle époque

On l’a dit, Miss est un personnage haut en couleur. Proche du mythe pour certains, un peu moins pour d’autres… qu’importe. L’essentiel reste dans l’histoire. Le spectacle sait mêler fiction et réalité sous couvert d’une ambiance d’époque heureusement évidente. Après l’idée de départ, tous « ont voulu raconter la vie de cette troupe qui, après la guerre, souhaitait redonner un élan à la revue parisienne ».

De là, les costumes signés Frédéric Olivier font parfaitement leur effet et rendent à Mistinguett, Reine des Années Folles une nécessaires prégnance. Quelque soit le tableau, les tenues renforcent l’idéal d’une époque où les femmes étaient tellement belles et les hommes si captivants.

Réunis au Casino de Paris, reconstruit en l’espace d’une soirée, les acteurs se jouent du temps et font (re)vivre les images que l’on se faisait du passé. Les chansons d’antan (notamment « Mon Homme ») nous y rappellent.

Le décor efficace nous y replonge sans difficulté. Les musiciens en live nous incitent à y adhérer et pourtant on ne s’y perd pas.

Faute d’un rythme suffisamment entraînant, le premier acte accuse quelques lenteurs et le jeu des acteurs n’y fait rien.

On se balade dans une histoire claire mais trop monotone.

A juste titre François Chouquet nous confie « attendre plus du spectateur. L’histoire permet de construire les rapports entre les personnages.

Je ne veux pas d’un spectateur trop passif, je souhaite qu’il s’engage, qu’il y ai une action pour entrer pleinement dans l’histoire et se l’approprier. Je sais que cet effort est très valorisant quand le public veut bien s’y prêter ». En ceci, déjà, le spectacle se veut différent.

En voyant la deuxième partie on se demande tout de même pourquoi ne pas avoir usé des danseurs plus souvent… D’abord plus figurants ils ne se révèlent dans leurs grandes capacités que trop tard. La danse sait imprimer ce rythme essentiel. La danse sait aussi faire s’engager son public, dommage qu’il en ait manqué.

Finalement, en allant voir Mistinguett, on s’attend à une comédie musicale comme on en a l’habitude. Et bien non. En fait on ne peut se défaire d’une idée difficile : ce spectacle est à la fois bon – et on ne saurait dire le contraire - mais aussi décevant. On espère. Beaucoup (trop ?). On a l’essentiel mais pas plus.

Alors, qu’on se rassure : Mistinguett, reine des années folles ne doit juste pas se vendre comme on le croit. C’est bon mais à côté, autre part. C’est un autre genre, un autre registre. En cela, l’heure du « Théâtre musical » est sans doute arrivée.

En cela, plus justement, ce spectacle peut être apprécié. Manque peut-être encore d’un peu de temps.

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