Production électrique mondiale : le nucléaire deux fois plus faible que les énergies renouvelables

Publié le 20 octobre 2014 par Blanchemanche
#Transitionénergétique
Le nucléaire a cristallisé les débats lors de l’examen du projet de loi sur la transition énergétique à l’Assemblée nationale la semaine dernière. Un sujet sensible pour la France où cette énergie fournit 75 % de l’électricité. Pourtant, si l’on examine la part de l’atome dans le mix électrique mondial, il ne représente que 11 % de la production totale d’électricité. Loin derrière les énergies renouvelables.

Des panneaux solaires installés devant la centrale nucléaire française du Tricastin en septembre 2011.
Anne-Christine Poujoulat / AFPLe 7 octobre dernier, Areva a annoncé une baisse de ses investissements sur la période 2015-2016. Objectif ? Redresser sa situation financière. Le groupe nucléaire est confronté à une conjoncture difficile. Depuis l’accident de Fukushima, survenu en 2011, l'activité du secteur reste atone. Selon le cabinet d’études Enerdata, la production d’électricité nucléaire a diminué dans le monde de près de 11% entre 2010 et 2012.
Après avoir atteint un pic de 17,6% en 1996, la part de l’atome dans la production mondiale d’électricité, pointe désormais à 10,8% en 2013. C’est ce qu’a souligné en juillet l’édition 2014 du World Nuclear Industry Status Report (Rapport sur la situation de l’industrie nucléaire mondiale), une étude indépendante réalisée par un groupe d’experts et chercheurs.

Les énergies renouvelables en pleine croissance


 Parallèlement, la part des énergies renouvelables (EnR), elle, ne cesse d’augmenter. Selon le rapport 2014 du réseau mondial d’échange sur les énergies renouvelables (REn21), la capacité installée de production d’électricité renouvelable a crû de 8% entre 2012 et 2013. Dans le même temps, les énergies renouvelables ont couvert 22,1% de la consommation mondiale d’électricité l’an dernier. Deux fois plus, donc, que le nucléaire.
Pour autant, le problème des émissions de CO2 de la production d'électricité est loin d’être réglé. Le nucléaire sera-t-il indispensable pour les contenir ? C'est l'argument utilisé par la France pour justifier son mix énergétique. Mas pour Jean-Eudes Moncomble, secrétaire général du Conseil français de l’énergie (CFE), il existe de réelles alternatives à l'atome : "différentes options existent pour réduire les émissions – efficacité énergétique, énergies renouvelables, Captage et Stockage du CO2 (le CSC)...- Ne pas les prendre en compte serait une erreur"

Le 100 % d'énergies renouvelables est-il possible?


Selon un scénario d’Enerdata, la part de l’atome dans le mix électrique mondial pourrait atteindre 14,7% en 2035. Bien loin des 53% d’EnR que le même scénario envisage à cette même date. L'abandon du nucléaire impliquerait donc d’accroître le recours au CSC, une solution technologique qui n'est pas encore au point. "Sans captage du CO2, on aboutit à des scénarios qui doivent se rapprocher de 100% d’EnR. Je pense que ce serait techniquement plus difficile et plus cher", indique cependant l’économiste Patrick Criqui, directeur de recherche au CNRS, car il faudra s’assurer que ces énergies variables – selon l’ensoleillement, l’intensité du vent – ne déstabilisent pas les réseaux électriques. 
C'est pourtant le pari qu'a fait l'Allemagne. Avec, pour l’instant, des difficultés à contenir ses rejets de CO2, qui ont crû de 2% entre 2012 et 2013. C'est en effet grâce au charbon que s'effectue la jonction entre la fin du nucléaire et les énergies renouvelables. Mais "ces émissions vont sans doute baisser cette année", souligne Marc Jedliczka, de l’association négaWatt.

La solution selon négaWatt ? Le Power to gas


Pour Marc Jedliczka, pas de doute: "On peut produire de l’électricité décarbonée sans nucléaire." Mais alors, quid des risques de déstabilisation des réseaux électriques ? "Avec environ 30% d’EnR dans son mix électrique, l’Allemagne n’a pas de problèmes pour le moment. Il lui faudra de nouveaux outils dans une dizaine d’années. Cela laisse le temps de les développer !", tranche Marc Jedliczka.
NégaWatt attend beaucoup du Power to gas, qui fait déjà l’objet d’expérimentations. Le principe: stocker l’électricité renouvelable produite pendant les moments où elle n’est pas nécessaire en la transformant, par procédés chimiques, en gaz (hydrogène ou méthane). Le développement des technologies énergétique incite effectivement à l'optimisme. Pour l’économiste Frédéric Gonand, de l’Université Paris-Dauphine, "la recherche avance bien sur le sujet. Il n’est pas interdit de penser que dans 15 ou 20 ans, on saura stocker l’électricité".
Carole Lanzi
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