Nicole Atkins à l'alimentation générale, Paris, le 10 octobre 2014

Par Lamusiquedenosvies

J'avais découvert les chansons de Nicole Atkins par hasard du temps où je voyageais encore beaucoup pour voir des concerts il y a quelques annéees. Paradoxalement, je n'avais jamais eu l'opportunité de la voir chanter. C'est en réécoutant récemment des chansons de son premier album Neptune City que j'ai vu qu'elle passerait par Paris pour sa première tournée européenne, c'était sans doute un signe...

Je me rappelle avoir tout de suite aimé sa voix et elle utilise des enchaînements d'accords qui donnent à ses chansons une atmosphère immédiatement reconnaissable. A vrai dire, j'avais un peu perdu sa trace et pour cause, malgré un premier album que je trouve excellent, elle a été en quelque sorte virée de chez Columbia par manque de ventes. Nicole Atkins a semble t-il eu une petite traversée du désert et elle revient avec son 3ème album studio (après Mondo Amore, par lequel elle débutait sa phase indépendante) du nom de Slow Phaser. A l'approche du concert parisien, j'écoutais donc avec intérêt ses nouvelles chansons. Celles-ci conservent le lyrisme dont Nicole a toujours su faire preuve tout en gardant une instrumentation sobre qui tranche avec ce que je connaissais d'elle auparavant. En regardant aussi quelques vidéos sur youtube de ses dernières prestations live, j'ai vu qu'elle n'était accompagnée que d'un guitariste et d'un batteur et je me demandais comment cela allait sonner une fois sur scène. Je n'étais pas très convaincu pour être franc.

Vient donc le soir du concert à l'alimentation générale dans le 11ème arrondissement. Je connais le quarter pour avoir assisté à de nombreux concerts à l'international ou au nouveau casino non loin de là. L'AG est un joyeux bric-à-brac, la scène se trouve au milieu et la salle est remplie de gens qui ne sont pas forcément venus voir un concert mais plutôt pour passer un moment convivial. Après un première partie originale donnée par le groupe électro Chinese Army, Nicole Atkins et ses 2 musiciens prirent la scène. Tout de suite, Nicole invitait les gens à se rapprocher de la scène et elle a débuté par ma chanson préférée de son répertoire, Maybe Tonight. C'est remarquable de penser qu'en quelques secondes Nicole arrive à accrocher son public et notamment moi-même par le biais d'un simple contact visuel. En effet, j'ai croisé son regard et elle m'a accroché comme peu d'artistes se donnent la peine de faire. J'ai su qu'on aurait un superbe concert.

C'est une chose d'entendre une voix sur un CD mais l'expérience en concert va bien au-delà et force est de constater que Nicole a une voix extraordinaire ainsi qu'un savoir-faire indéniable. Contrairement à d'autres artistes qui ont parfois du mal à remplir l'espace entre les chansons, Nicole, une native du New Jersey, maîtrise très bien son sujet et même en cas d'aléas techniques comme ce fut le cas ce soir-là, tout le monde avait le sourire.

J'ai beaucoup aimé les anciennes chansons comme maybe tonight et the way it is ainsi que celles de Slow Phaser comme le vibrant Chemistry ou l'épique Red ropes. J'étais agréablement surpris par l'épaisseur de son, bien qu'ils n'étaient que 3 sur scène, le son était vraiment énorme avec notamment un travail remarquable du guitariste. Mais bien sûr c'était la voix exquise de Nicole qui nous faisait oublier tout ce qu'on a pu faire durant la journée. C'était vraiment comme voyager dans une autre galaxie. Les chansons de Nicole se caractérisent par un style ambivalent, à la fois sombre, à la fois enthousiaste. Elle se promène de chanson en chanson au fil de ses déceptions amoureuses et ça ressemble un peu à des montagnes russes de sentiments qui contrastent avec sa maîtrise vocale impériale. C'est vraiment ce qui m'a marqué durant ce concert. Je ne connaissais pas toutes les chansons mais dès que je pouvais chanter, je le faisais, particulièrement sur un morceau sur lequel elle nous invitait à chanter avec elle, "i don't know what country is but I know what country was". Elle a fini son concert sur The Tower, une autre chanson au style épique. A la clôture du morceau, comme pour me marquer à vie, elle a terminé sa dernière ligne de chant en me regardant droit dans les yeux, j'étais littéralement scotché sur place mais conquis par une artiste si talentueuse et si charmante.

En guise de rappel, elle a interprété seule à la guitare acoustique et devant la scène une reprise de Crying de Roy Orbison à qui elle est souvent comparée artistiquement. Voilà, le concert était déjà fini, c'était un moment vraiment magique. J'attendais un peu dans la salle pour rencontrer Nicole et elle est sortie un peu de nulle part me prenant par surprise. Sans vraiment avoir le temps de comprendre, je me retrouvais dans ses bras. Je ne me rappelle pas trop ce que je lui ai dit car c'est allé très vite à part un I love you qui suffit à traduire mon état à ce moment-là.

J'ai longuement hésité par la suite à aller à un autre concert de sa tournée, je me suis ravisé in extremis pour cause de manque d'argent, c'était plus raisonnable honnêtement mais Nicole Atkins a définitivement gagné un nouveau fan. En lisant d'autres articles, il s'en tire un consensus : Nicole a un talent fou et une voix à tomber mais pourquoi est-ce qu'elle n'a pas plus de succès ? C'est une énigme mais l'industrie musicale ne suit pas vraiment que la logique du talent. Du reste, elle m'a confié qu'elle dirigeait son propre label et qu'elle contrôlait désormais la direction de son bateau, ce qui n'est peut-être pas plus mal. D'un autre côté, c'est vrai, elle n'a plus la puissance financière d'une grande maison de disques mais de l'autre, artistiquement elle est aux commandes de ce qu'elle veut faire et elle a accumulé de l'expérience et de la sagesse pour faire devenir une artiste intègre et respectée. Dans ce monde qui manque singulièrement de sincérité, Nicole Atkins représente un îlot de passion bienvenu dont peuvent s'inspirer les autres musiciens. Espérons que Nicole puisse continuer dans cette voie de façon durable pour nous faire profiter de ses superbes chansons.