« Tu gagneras mon pain à la sueur de ton front. » Inconnu
France Inter dans sa revue de presse du 20 octobre 2014 relayant le gratuit 20 Minutes s’est fait l’écho d’une étude menée par le CREDOC. Les Français ne croient plus en l’État providence affirme l’article, « l’idée que les individus doivent se prendre en main se propage ». S. Hoiban auteure de l’étude affirme que cette « tendance libérale » progresse depuis 15 ans, et davantage cette année. De surcroit ce phénomène toucherait les classes défavorisées. Si cela peut réjouir la Fondapol, l’institut Montaigne, l’UMP, l’UDI et même une grande partie du PS ce type de conclusion pose aussi certaines questions. Quant à notre modèle politique, la diffusion des idées et la transmission dans les médias.
Le libéralisme prolétarien
Le désarmement unilatéral de l’état
Les gouvernements successifs de « gauche » comme de droite ont organisé l’abaissement des normes sociales, en termes d’assurance chômage, de précarité dans l’emploi, de couverture santé. Mais ce sont aussi privé d’énormes moyens financiers pour mener les politiques sociales. Or, on a savamment désynchronisé les causes du recul de l’État social et les conséquences de celui-ci. Typique de la novlangue liberale. En d’autres termes, on a tenu un discours restrictif sur les dépenses et les recettes publiques sans expliquer quels en sont les effets sur le réel. La communication politique s’est bornée à tenir un discours consternant sur la gestion de l’État en bon père de famille. Sans préciser que le bon père de famille livrait sa progéniture aux aléas du marché.
Or dans la vraie vie, les conséquences sont dévastatrices. Le discours de l’État trop dépensier inonde l’espace public et fait consensus, tandis que les citoyens les plus exposés constatent une dégradation massive de leurs protections face aux aléas sociaux. Il n’est pas étonnant qu’ils considèrent, à raison, le système inefficace.
Répondre sans penser
L’historien David Van Reybrouck considère les études d’opinion comme des réponses que l’on donne lorsque l’on ne pense pas. Ou plus. Les participants de l’étude du CREDOC ne sont pas idiots et leurs réponses sont surement données en conscience. Mais certainement sans le recul nécessaire pour aborder l’organisation sociale dans son ensemble. Or ce qui manque pour tirer réellement des conclusions, c’est un débat de fond et pluraliste. Ce que cette étude peut démontrer, à la limite, c’est que le modèle de redistribution couplé à l’austérité budgétaire ne fonctionne plus pour les pauvres. Que la stratégie de l’offre affiliée à la baisse des dépenses publiques est inopérante.
Les classes populaires, désirent-ils glisser vers un modèle encore plus libéral avec toutes les conséquences que cela implique ? C’est un autre sujet, et ne peut être tranché qu’en portant sur la place publique les causes et les conséquences de ce type d’option politique. C’est-à-dire qu’est-ce qui se passe réellement, au paroxysme du chacun pour soi, quand un proche cumule trois jobs, qu’il est handicapé, ou lorsque qu’il est atteint par le cancer.
Vogelsong – 21 octobre 2014 – Paris