Un moment d'éternité dans le passage du temps

Publié le 03 novembre 2014 par Onarretetout

A La Terrasse, espace d’art de Nanterre (92), je suis revenu pour la beauté des gestes. 

A commencer par ceux de Damien Cabannes, disposant au sol ici et là des tortillons gardant la trace des mains qui les ont façonnés, assemblant des cubes comme Taysir Batniji assemble des pavés Napoléon, c’est-à-dire cherchant « le socle du monde ». Pourtant, sous les pavés, comme sous les cubes, ce n’est pas la plage, en ce lieu de Nanterre, c’est une autoroute souterraine. Le socle du monde risque donc bien d’être mouvant…

Mais ces tortillons, ces cubes et ces pavés font écho de manière étonnante avec les gestes de Selma et Sofiane Ouissi, qui reproduisent, dans une danse des mains, les gestes de femmes potiers de Tunisie. Les seuls gestes, la terre rouge sur les doigts, le ciel et le sol tunisiens font une forme d’hommage et laissent deviner les statuettes de terre que l’art transmis de femme en femme façonne dans la région de Sejnane.

 

Une autre histoire de terre et d’hommes se déroule sur un autre mur de ce lieu. C’est quelque part en Grèce, des hommes travaillent, remplissent des sacs de cailloux, tandis qu’un texte de Raoul Vaneigem défile sur les images de Nicolas Kosakis. « Tout commence et recommence », ces mots s’inscrivent sur le mur écran, et aussi : « Tout ce qui est en haut est en bas / Et inversement ».

Mon regard revient à Selma et Sofiane Ouissi, assis sur une butte, les yeux tournés vers la terre avec laquelle ils créent, recréent. La proximité des deux vidéos dit beaucoup de l’utilisation que l’homme fait des éléments qui « nourrissent nos rêves » et nous fait espérer que « Bientôt viendra la race humaine / Qui recréera le monde / Au lieu de le détruire ».