Les singuliers de Anne PERCIN

Par Jellybelly


Nouveau coup de coeur pour ce très beau roman.


Nous sommes fin du XIXème siècle. La peinture connaît un nouvel élan avec le mouvement "du plein air". Pont Aven bat son plein. Le jeune Hugo Boch, élève de la célèbre école Julian de Paris, part à l'aventure. Il y rencontrera Gauguin, Charles Laval, Emile Bernard, Charles Filiger, Henry Moret, Meyer De Haan,Serusier ... Mais Hugo Boch n'a pas le talent pour rivaliser avec ces grands artistes. Il décide alors de se consacrer à un art émergent, celui de la photographie. Loin de ses proches, il entretient une correspondance avec l'une de ses cousines favorites, Hazel, jeune femme, peintre également de formation. Rebelle, elle souhaite se distinguer de la mode du moment et consacre ses toiles au nu masculin. Hugo Boch n'oublie pas non plus son ami, Tobias Hendrike. Malade, il ne peut s'éloigner de son pays, la Belgique. Peintre également, lui affectionne tout particulièrement les oeuvres de Greco et Goya et construit ses toiles à partir de tâches qu'il s'évertue à faire vivre par des rajouts de couleurs. Là-bas, la mode de l'Impressionnisme est passée, elle est déjà remplacée par le Naturalisme et le Symbolisme.


Vous l'aurez compris, ce roman est construit sur ces échanges épistolaires qui lui donnent rythme et vitalité. Anne PERCIN se livre avec succès à cet exercice littéraire en portant un regard juvénile empreint d'enthousiasme et d'espérance.


C'est une bien belle manière d'aborder un milieu artistique à une époque particulièrement prolifique. Ce roman permet de découvrir le prix que devaient payer ces jeunes artistes pour se vouer à des activités hors norme. Hugo a coupé les ponts avec sa famille, Hazel doit se faire une place dans un monde d'hommes. La solitude de l'artiste est joliement décrite page 311 : "Je suis juste de plus en plus, de mieux en mieux si l'on préfère, singulier. Et singulier, cela veut dire seul [...]." D'où le titre de ce roman... Il traite également des effets de mode et des canons de la peinture avec leurs exigences.


C'est aussi un très beau roman sur Paris, Paris qui est en pleine ébullition. C'est l'époque de la construction de la Tour Eiffel, de l'Exposition Universelle avec la mode à l'exotisme (référence aux zoos humains), du centenaire de la Révolution, de la sortie de terre du quartier de Montmartre avec tous ses cafés et un cabaret d'un tout nouveau genre (le Moulin Rouge)...


Anne PERCIN n'oublie pas la littérature avec quelques clins d'oeil à Flaubert qui publie "La Tentation", Maupassant et Gide de passage eux aussi en Bretagne.


C'est un petit bijou qu'il faut absolument lire.


Vous n'en êtes pas encore convaincu(e) ? Alors, pour vous donner une petite idée de l'ambiance de ce roman, je vous offre quelques clichés de la Cité des Peintres. Et oui, petit hasard de la vie, j'y étais il y a quelques jours encore !!!

Annie