Monsieur Loriot

Publié le 20 novembre 2014 par Lecteur34000

« Monsieur Loriot »

ANFRAY Clélia

(Gallimard)

Le Lecteur faillit bel et bien renoncer à parcourir ce roman jusqu’à son terme. Il aurait eu tort. Clélia Anfray narre l’histoire d’un homme quasiment ordinaire, monsieur Loriot, un cadre de la SNCF ayant atteint l’âge de la retraite, vivant près de son épouse, du côté de Châteauroux. Plutôt réactionnaire, conformiste, un tantinet raciste, en ces années où Jacques Chirac échafaude une stratégie pour atteindre à la fonction dite suprême, où la télévision déverse déjà des tombereaux d’immondices sur une société qui s’englue dans la léthargie. Une possible et longue fin de vie aux confins de l’ennui. Avec trois filles à la clé pour lesquelles Monsieur Loriot rêva d’un devenir guère différent de ce que fut son parcours : une vie professionnelle accomplie et une famille. Sauf que l’une des filles ne s’est pas conformée aux espérances de son père. Sauf qu’une des petites-filles révèle déjà des prédispositions à l’insoumission.

Mais monsieur Loriot a dissimulé au regard des siens ses failles les plus intimes. Bien avant ses épousailles, durant les années si troubles et si violentes de la seconde guerre mondiale, il avait connu et aimé une jeune femme. Il n’a rien oublié. Et c’est pour cette femme aimée qu’un beau jour, il va disparaître, non sans avoir pris la précaution de tout organiser pour que l’épouse abandonnée n’eût pas à souffrir de son absence. Il gagne l’Amérique où il tentera de redonner vie et substance à son rêve. Là où sa fille insoumise et rebelle viendra le retrouver, avant de l’abandonner à ses chimères.

Si la première partie du roman n’a pas convaincu le Lecteur, malgré  ou en dépit d’un tableau somme toute réaliste de ce que furent les années 80, Il succomba ensuite au charme de l’aventure a priori insensée dans laquelle se lança un homme qui s’acharna à vivre, au crépuscule de son existence, son impossible rêve. Monsieur Loriot se révèle alors sous un autre jour, bien différent du portrait du personnage autoritaire dont ses proches avaient gardé le souvenir. Soit donc un roman qui sort de l’ordinaire frelaté qui constitue le socle de certaines belles lettres franchouillardes.