Au revoir là-haut. Pierre Lemaitre

Par Nelcie @celinelcie

Avant que son roman Au revoir là-haut ne rencontre un succès fulgurant, dû à son prix Goncourt, je n’avais jamais entendu parler de Pierre Lemaitre.
Moi, les prix littéraires ça me passe au-dessus de la tête. Ou plus exactement, sans jouer les rebelles du genre « je boycotte automatiquement tout livre ayant reçu un grand prix », ce n’est pas forcément ce qui va plus m’inciter à lire un roman. Oui mais, qu’on le veuille ou non, bah le propre d’un prix littéraire c’est d’être mis en avant. Et donc, qu’on le veuille ou non, le roman qui a eu un prix, on en entend plus parler que les autres, et on finit soi-même par s’y intéresser de plus près.
C’est ce qui s’est passé avec Au revoir là-haut. Au début, je n’y ai pas prêté une attention particulière, et puis après avoir lu les critiques des internautes, et vu ou entendu quelques émissions en présence de l’auteur, je me suis dit que le sujet pouvait grandement m’intéresser. Ainsi, il avait rejoint ma wishlist, et ainsi un jour j’ai décidé de l’acheter puis de le lire.

Bref, en octobre j’ai lu « Au revoir là-haut » de Pierre Lemaitre.

Synopsis

Rescapés du chaos de la Grande Guerre, Albert et Edouard comprennent rapidement que le pays ne veut plus d’eux. Malheur aux vainqueurs ! La France glorifie ses morts et oublie les survivants. Albert, employé modeste et timoré, a tout perdu. Edouard, artiste flamboyant mais brisé, est écrasé par son histoire familiale. Désarmés et abandonnés après le carnage, tous deux sont condamnés à l’exclusion. Refusant de céder à l’amertume ou au découragement, ils vont, ensemble, imaginer une arnaque d’une audace inouïe qui mettra le pays tout entier en effervescence. Bien au-delà de la vengeance et de la revanche de deux hommes détruits par une guerre vaine et barbare, Au revoir là-haut est l’histoire caustique et tragique d’un défi à la société, à l’État, à la famille, à la morale patriotique responsables de leur enfer.

Mon avis

J’ai adoré ! De la première à la dernière page, je me suis laissée emportée par cette histoire.

L’histoire débute en novembre 1918 sur le front de guerre. Voilà que l’Armistice est proche, les rumeurs de la fin de la Guerre se font de plus en plus pressantes. Oui mais, la Guerre n’est pas encore terminée, et jusqu’au bout elle aura fait son lot de victimes, de morts, de blessés. Tels que Albert Maillard et Edouard Péricourt, deux rescapés de cette Sale Guerre. Or, s’ils en sont ressortis vivants, cette Guerre aura laissé sur eux des traces indélébiles, physiques bien sûr, mais surtout morales, l’un étant bien souvent lié à l’autre.

S’il est question de la Première Guerre Mondiale dans ce roman, c’est essentiellement de l’après qui sera traîté dans ces pages. Un après qui s’avère des plus cruels pour ces hommes comme Albert ou Edouard, qui se sont battus pour leur patrie, et qui du jour au lendemain se trouvent rejetés, ignorés. Des hommes dont on oublie jusqu’à l’existence. Alors on comprend pourquoi ces hommes (et je ne parle pas forcément que d’Albert ou Edouard) finissent par s’autodétruire, pourquoi l’image qu’ils ont d’eux même et de la société finit par s’étioler, pour n’en garder que le pire. Et l’on devine en quoi le fait de vouloir rester vivant, retrouver goût aux choses de la vie fut un effort de chaque instant pour eux.
C’est donc un portrait sans consession de l’après-guerre que nous dresse Pierre Lemaitre dans ce roman.

Mais Au revoir là-haut, ce n’est pas seulement un roman historique. C’est aussi un sacré thriller, avec une sacrée intrigue. Car en effet, Edouard et Albert vont monter l’une des plus grosses arnaques du siècle. Un coup monté où l’amoralité rivalise avec l’ingéniosité.
Et si au début, cette arnaque m’a fait « sourire », si je me suis dit que « ouah, c’est trop fort ! Mais non ils vont pas oser ? Ah ben si ils osent », et que inconsciemment j’avais envie de les encourager dans leur vengeance (car c’est bien de cela qu’il s’agit), très rapidement, je suis devenue sceptique. Le fait d’être une victime de la guerre leur donne-t-il tous les droits, et surtout celui de se venger impunément ? Voilà en quelque sorte une des questions que nous pose ce roman. Parce que oui, si d’un côté je comprends leur désir de vengence envers cette patrie qui les a délaissé, il me semble difficile d’approuver le fait qu’ils veuillent le faire payer à la France entière.
Malgré tout, je me suis laissée prendre par l’intrigue, par la mise en place de cette arnaque et jusqu’au bout je me suis demandés s’ils allaient réussir et comment tout cela allait se terminer.

Si ce roman m’a autant plu, la plume de Pierre Lemaitre n’y est pas étrangère. Lorsqu’il décrit une scène sur le front, on s’imagine dans ce trou d’obus, et on sentirait presque l’odeur de la terre qui nous ensevelit. Quand il nous raconte cette souffrance qui consume Edouard suite aux ravages faits sur son visage, on imagine la douleur physique, mais aussi morale d’être devenu une « gueule cassée ». A proprement parler, le style de Pierre Lemaitre n’est pas ce que je qualifierais d’exceptionnel, dans le sens où le vocabulaire reste simple, qu’il n’y a pas de lyrisme ou qu’il n’est pas spécialement poétique. Mais les mots sont justes, les phrases percutantes, suffisamment pour nous ancrer de plein pied dans cette histoire. Et c’est ce qui m’a particulièrement plu dans ce roman.

En conclusion, Au revoir là-haut est un roman à lire pour l’Histoire aussi bien que pour l’histoire.


Classé dans:Lecture Tagged: Au revoir là-haut, contemporain, Pierre Lemaitre, Première Guerre Mondiale, roman historique