Sous les couvertures de Bertrand Guillot (Rentrée Littéraire 2014)

Par Emidreamsup @Emidreamsup

Avec Sous les couvertures, Bertrand Guillot prouve être un auteur qui aime lire autant qu’il aime écrire.

Ce récit original prend place dans une petite librairie de quartier qui a bien du mal à survivre. Un vendredi soir alors que les cartons contenant les nouveautés attendent patiemment d’être ouverts, les livres déjà en rayon redoute le lundi matin suivant où certains d’entre eux seront mis au pilon.

La vie littéraire est, comme la vie, soumise aux lois de la sélection naturelle. On y est donc en état de guerre perpétuelle. Mais l’art est de vivre sur le champ de bataille sans se battre et sans être blessé.

Toute l’originalité de ce roman réside dans le double récit qui prend place sous nos yeux. D’une part, on suit la vie du libraire et de son assistante, tandis que de l’autre, les livres prennent vie et décident de se révolter contre le sort qui les attend s’ils ne trouvent pas un lecteur. Une guerre entre best-sellers et ouvrages plus modeste va alors prendre place. Si aucun des ouvrages prenant vie dans ce roman n’est clairement identifié, l’auteur laisse quelques indices qui nous permettent de nous faire une idée sur leur titre ou auteur. C’est un petit jeu de devinette qui vient rajouter une troisième dimension à cette lecture.

L’idée de départ est donc excellente. Le fait d’alterner entre vie réelle (le libraire) et vie imaginaire (les livres) confère un rythme agréable au récit, même si par moment on peut être frustré de la brièveté des chapitres concernant les personnages de chair et de sang. Tandis que certains passages concernant la guerre des livres sont parfois un peu difficile à digérer à l’image de certains classiques littéraires. Surtout quand l’auteur à tendance à appuyer sur des idées un poil trop « clichés » si je peux me permettre.

Les livres portaient les espoirs démesurés et les doutes abyssaux de leurs auteurs, ce qu’ils avaient vécu et ce qu’ils auraient aimé vivre, ainsi que d’infimes morceaux d’âme dont ils n’avaient pas conscience.

Oui, on sait que les librairies indépendantes sont en danger. On est conscient que le nombre de livres édités par an est de plus en plus élevés tandis que le nombre de lecteurs semble continuellement diminuer. Oui, Amazon est considéré comme le Grand Méchant Loup. Oui, la lecture numérique prend le pas sur la lecture papier. Bref, on sait tout ça et le fait que certains passages ne cessent d’appuyer ses idées gâchent un peu le plaisir et la fluidité du texte.

Malgré ce petit aspect un brin dérangeant, il faut reconnaître que Guillot ne manque pas d’imagination, de culture et d’humour. Son écriture est fine et le tout ne manque pas de nous faire réfléchir sur notre position/rôle de lecteur quant à l’avenir des livres (et de son « industrie »). Personne n’est à l’abri de sa plume parfois un poil acerbe que ce soit les lecteurs, les auteurs, les éditeurs ou même les journalistes.

Sous les couvertures est une jolie fable sur la littérature et ne manque pas de nous laisser songeur une fois la dernière page dévorée.

Et si le grand livre, c’était celui devant lequel le lecteur se sent tout petit ?

Sous les Couvertures de Bertrand Guillot
Ed Rue Fromentin / Déjà disponible en librairies

Merci à PriceMinister et les matchs de la rentrée littéraire pour ce livre.