Brel et Gauguin avaient raison.

Publié le 08 janvier 2015 par Arsobispo

Oui j’ai peur.

Car l’horreur continue, encore et encore.

Car la connerie s’attaque à notre bien le plus précieux, la liberté de pensée.

Car ce prétendu soutien à Charlie Hebdo n’est, je le crains,  qu’un étalage de bons sentiments qui ne peut déboucher sur rien de concret.

Des actes de déséquilibrés dit-on. Des loups solitaires ? Peut-être. Ou pas. Et une interrogation (une de plus) car comment, dans nos sociétés surveillées, connectées, informées, éduquées, quelques salopards peuvent se laisser griser par cette barbarie ? Actes de guerre, pas si isolés si l’on en croît les autorités affirmant avoir déjoué nombre d’attentats. Mais chut, n’en parlons pas, cela ferait le jeu d’autres extrémismes. Ne pas faire de vagues.

Ils étaient armés d’armes lourdes. Comme tout un chacun, sans doute. « Bonjour Monsieur, il vous reste des kalachnikovs ?  Mais bien sûr il vous en faut combien ? De deux choses l’une : L’intention de s’en procurer et la possibilité de les acquérir sont avérées. D’où viennent-elles sinon d’un réseau pensé et structuré qui réalise, d’une part du prosélytisme et d’autre part du trafic d’armes et de combattants. Des loups solitaires ? Laissez-moi en douter. C’est trop facile.

Oui, j’ai peur. Je reste persuadé que nous sommes à la veille d’une guerre civile. L’amalgame est partout. Certains condamnent l’Islam, d’autres au contraire les anti-islamistes. L’attentat contre Charlie va stigmatiser les uns contre les autres. Les responsabilités seront toujours du côté de l’autre. Mais qui est l’autre sinon une croyance, une idéologie, une doctrine, un Dieu. L’autre est partout. L’autre est multiple. N’oublions pas que Charlie Hebdo fustigeait tout autant les curés que les imans, les rabbins, voire les politiques, les financiers, en un mot les pouvoirs. Il fallait l’abattre. Les instances catholiques, juives, musulmanes s’allient aujourd’hui, se réunissent fraternellement, font bloc, pour rejeter cette barbarie dont elles se disent victimes alors qu’elles en sont responsables. Les politiques font de même. Il faut que chacun puisse continuer à faire ses petites affaires, au lieu de faire profil bas. Et nos journaux télévisés relaient cette communion de façade.

Mais du côté de la misère, rien de changé. Combien de ces connards armés sont issus des banlieues, combien ont évité le chômage ? Que leur a apporté la République ? Ils ont été exclus de notre société. Combien d’entre eux votent ? Lucides, ils savent bien que les partis de nantis musellent la démocratie. Comment s’étonner qu’ils lui tournent le dos et – pour certains - préfèrent goûter aux prêches. Certains refusent tout et préfèrent s’isoler dans les rues, sans toit, sans fraternité, préférant le froid et la faim, à l’acte de violence. Même eux sont méprisés.

J’ai eu l’occasion de rencontrer plusieurs fois Cabu et Wolinski. Ils n’étaient que gentillesse et amour. Ils forçaient le respect par leur honnêteté intellectuelle. Ils étaient le contraire des forces qui se déchainent aujourd’hui.

Oui, j’ai peur, car je ne vois pas comment lutter. Je n’ai pas la force d’un général appelant à la lutte contre une soumission généralisée.

Oui, j’ai peur, car ma confiance en l’homme se réduit à une peau de chagrin.

Oui j’ai peur, et j’ai envie de fuir, de me réfugier, là où n’existe que la Nature, avec certes ses dangers propres mais, heureusement, sans toutes ces putains d’icônes.