EBOLA: Le virus peut-il muter au point d'être aéroporté? – The Lancet Infectious Diseases et Institut Pasteur

Publié le 01 février 2015 par Santelog @santelog

Quels sont les grands défis à surmonter pour endiguer l’épidémie Ebola? Les chercheurs de l’Institut Pasteur de Dakar et de Paris ont pu reconstituer les chaînes de transmission du virus Ebola, au sein de la capitale guinéenne, de février à août 2014. Ces données confirment l’efficacité des mesures de contrôle mais soulignent les défis à surmonter pour contenir l’épidémie. Ces données présentées dans leLancet Infectious Diseases, montrent ainsi l’impact de la virémie sur la transmission et donc la nécessité de mieux connaître le virus. Elles appellent à mieux comprendre la génétique du virus, la réponse immunitaire humaine et, à suivre l’évolution du virus et son risque de mutation.

 

La question de la mutation est lancée par le Dr Anavaj Sakuntabhai, expert en “Genetics of Human Response to Infection  » à l’Institut Pasteur qui explique à la BBC que: « le virus est en train de muter. Ce qui est important pour le diagnostic et le traitement. Nous devons savoir comment le virus évolue afin de pouvoir suivre notre ennemi « . Le dernier bilan de l’OMS, au 30 janvier 2015, fait en effet état de 22.136 cas confirmés, probables et suspects dont 8.833 décès, dans 3 pays toujours touchés (Guinée, Libéria et Sierra Leone) et 5 pays précédemment touchés par l’épidémie (Mali, Nigeria, Sénégal , l’Espagne et les Etats-Unis d’Amérique). Et si cette dernière semaine la transmission semble se réduire avec un total de 99 cas signalés, la transmission reste intense dans 3 pays et de nouvelles épidémies ne peuvent être exclues.

Une première étude, sur le terrain, de l’Institut Pasteur a permis d’établir les chaînes de transmission à Conakry (Guinée) et leurs données ont permis de mesurer la transmission d’Ebola entre individus dans différents contextes et à différents moments de l’épidémie. Ainsi, les transmissions élevées lors des funérailles (jusqu’à 15%) et à l’hôpital (35%) ont pu être endiguées avec la mise en œuvre de mesures de contrôle et d’isolement (respectivement à 4% et 9%). Néanmoins ces mesures se sont avérées insuffisantes à stopper complètement l’épidémie. De nouvelles chaînes de transmission initiées à Conakry ont également été exportées vers d’autres territoires en Guinée. Enfin, les analyses biologiques révèlent que plus la virémie (taux de particules virales présentes dans le sang) est élevée chez un malade, plus le nombre de personnes qu’il risque de contaminer est important.

De nouveaux défis à surmonter : Selon les chercheurs, il s’agit maintenant de pouvoir rapprocher ces données épidémiologiques avec celles du séquençage des souches prélevées sur place depuis le début de l’épidémie, actuellement en cours d’analyse. Dans le cadre de ses recherches de vaccin, l’Institut Pasteur analyse plus de 600 échantillons provenant de patients guinéens. Ces échantillons peuvent apporter des réponses à la manière dont le virus évolue et transmet, comment le système immunitaire humain réagit au virus et pourquoi les gens ont des réactions différentes à Ebola. Les chercheurs vont étudier, en particulier comment le virus a évolué. En décryptant l’évolution du virus et en identifiant la réponse immunitaire humaine, les chercheurs pourront concevoir de meilleurs vaccins et identifier les meilleures stratégies de traitement. Comprendre aussi pourquoi selon les sujets, les réactions sont différentes au virus. Donc concevoir de nouveaux traitements.

Le virus peut-il muter au point d’être aéroporté ? Identifié en 1976, et depuis sous la forme de 5 espèces différentes, le virus Ebola a déjà une longue histoire meurtrière et une antériorité suffisante pour commencer à apprécier sa capacité de mutation. Les équipes américaines des Centers for Disease and Control (CDC) se sont aussi posé la question de la mutation et de la propagation aéroportée. A ce jour, leurs conclusions sont plutôt rassurantes, avec une absence de preuves permettant de suggérer la possibilité de telles mutations.

Aujourd’hui, la propagation du virus est documentée par transmission par contact direct avec du sang ou des liquides organiques d’une personne malade,

-   le virus dans le sang et les fluides corporels peut entrer dans le corps d’une autre personne par une plaie ou des muqueuses non protégées des yeux, nez ou bouche.

-   par piqûres d’aiguilles et contact avec des objets contaminés par le virus.

-   par contact avec des animaux infectés et manutention de viande d’animaux sauvages

-   par contact avec les chauves-souris infectées.

Depuis sa découverte, le virus Ebola s’avère être un virus stable avec un taux de mutation relativement constant,

-   les virus Ebola d’échantillons de cette dernière épidémie sont à 97% semblables au virus qui a émergé en 1976 (Voir visuel CDC ci-contre).

-   Il n’existe aucune preuve, selon les scientifiques des CDC permettant de suggérer que le virus Ebola pourrait muter au point de devenir plus contagieux ou de pouvoir se propager plus facilement, en particulier par voie aéroportée.

-   Et même si Ebola mutait, comme le font tous les virus, il serait très inhabituel qu’il modifie son mode de transmission, alors qu’il se propage déjà facilement.

En conclusion, selon ce bilan des CDC, il faudrait des millions d’années…

Sources: CDC Why Ebola is Not Likely to Become Airborne

Communiqué Institut Pasteur Ebola : les chaînes de transmission établies à Conakry (Visuels)

The Lancet Infectious Diseases 23 janvier 2015 DOI: 10.1016/S1473-3099(14)71075-8Chains of transmission and control of Ebola Virus Disease in Conakry, Guinea in 2014

ECDC 30 Jan 2015 Epidemiological update: Outbreak of Ebola virus disease in West Africa

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