Un schizophrène souffre-t-il?

Publié le 01 février 2015 par Lana

C’est une requête qui a conduit au blog, et une question qui n’est pas si rare que ça.

Les fous, les autistes, les handicapés mentaux, etc. ont parfois la réputation de ne pas se rendre compte de leurs différences, voire de ne pas souffrir.

Mais pensez-vous vraiment qu’il existe un seul être humain au monde qui ignore la souffrance?

Ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas la souffrance de quelqu’un qu’elle n’existe pas. Elle n’existe pas uniquement pour celui qui ne veut pas la voir. Et la souffrance des personnes atteintes de troubles mentaux, peu de gens ont envie de la voir. Et ça, en général, ça la redouble.

Ceux qui ne comprennent pas la souffrance des psychotiques, sans doute ne peuvent-ils même pas l’imaginer. Quand je suis tombée malade, j’étais une adolescente et j’en ai voulu aux adultes de ne pas m’avoir prévenue que la vie pouvait être si dure, si effrayante, si insupportable, si douloureuse qu’on préfère mourir pour échapper à la souffrance. Je n’avais pas compris qu’ils ne savaient pas, tout simplement parce qu’ils n’étaient pas psychotiques. Parce qu’ils avaient une chance que je n’avais pas.

Je ne vais pas essayer de décrire cette souffrance dans cet article, tout simplement parce que c’est ce que le blog entier essaye de faire sans jamais vraiment y parvenir. Regardez juste de nouveau la photo de la poupée de porcelaine de Jessica Harrison, celle qui se tient les boyaux, celle qu’on m’a parfois reproché d’avoir affichée par attirance pour le glauque ou le dérangeant, alors qu’elle n’est que la version jolie de ma schizophrénie. Imaginez-vous vivre comme ça pendant des années. Et je pense que vous aurez la réponse à la question « un schizophrène souffre-t-il? »

Oui, nous souffrons, beaucoup, énormément. On traîne cette maladie comme une malédiction, comme une blessure qui ne cicatrice pas, une plaie à vif. Ceux qui regardent notre souffrance en face, dans toute sa crudité sans détourner les yeux, et qui restent calmes face à elle, qui parlent doucement et sans jugement, ceux qui nous font comprendre qu’ils sont là, qu’ils ont bien mesuré notre souffrance mais qu’ils sont toujours là, sont ceux qui l’apaisent.


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