Interview exclusive pour Merseyside de Tim Burgess, leader des Charlatans

Publié le 25 février 2015 par Dookiz @merseysideband

Les Charlatans viennent de sortir Modern Nature, leur douzième album studio. Et même sans concert à la clé, Tim Burgess était de passage à Paris. L’occasion rêvée de l’interviewer, d’autant plus que c’est un gars vraiment sympa. Un événement pour tout fan de la première heure !

Fin 2013, vous avez joué un concert au Royal Albert Hall, à la fois pour rendre hommage à Jon Brookes, et puis pour lever des fonds en faveur de la recherche contre le cancer… Dans quel état d’esprit étiez-vous après avoir fait ce concert?
Tim Burgess : C’était à la fois la fin et le début de quelque chose. Depuis 2010, la santé de Jon se détériorait, avec des hauts et des bas. Après le concert, nous avons reçu beaucoup de soutien. Pendant ce temps nous écrivions des nouvelles chansons, mais elles n’étaient vraiment pas terribles… Depuis Who We Touch nous savions que nous pouvions jouer sans Jon, alors la transition s’est faite facilement. Mark pensait que ce serait difficile, mais en fait à aucun moment nous n’avons douté. Ce n’est pas une période “triste” pour nous, en ce moment.

Donc ça n’a pas été un challenge pour vous de travailler avec d’autres batteurs ?
Non, pas du tout. Nous avons travaillé avec Stephen Morris [ndlr - de New Order] que nous connaissons bien. Jon aimait beaucoup Gabe [ndlr - Gabe Gurnsey de Factory Floor]. Et on nous avait beaucoup recommandé Pete [ndlr - Pete Salisbury, The Verve]. Alors… Nous étions toujours en terrain connu. Nous avons enregistré avec la batterie de Jon, dans notre studio que nous avons depuis 1997, le Big Mushroom. Il n’était pas question pour nous de faire quelque chose dont Jon ne serait pas fier. Cela nous a paru complètement naturel.

Vous avez la réputation d’être un groupe “malchanceux”… Je serais plutôt tentée de vous décrire comme des “battants”. Vous semblez ne jamais laisser les épreuves de la vie prendre le pas sur le travail, l’écriture des chansons. Qu’en penses-tu ?
Oui, je comprends que les gens nous voient ainsi…Moi, je nous vois plutôt comme une équipe de footballeurs qui sont en train de se faire mener, mais qui continuent de se battre sur un terrain boueux… (rires) Ou des coureurs de marathon. Les gens ne s’imaginent pas tout le travail qu’on doit accomplir derrière les épreuves. Heureusement, j’aime le travail ! (rires) Être un battant, ça implique d’avoir plus de qualités qu’être juste “malchanceux”. Être un battant, c’est avoir une certaine force de volonté, de réinvention, d’originalité, de rester debout même quand tout conspire à vous décourager.

Ça implique une certaine dignité aussi… Pourtant en lisant ton autobiographie [“Tellin’ Stories”, 2012] , on voit très bien qu’il y a très peu d’ego chez les Charlatans… En tous cas ce n’est pas un moteur.
L’ego c’est quelque chose de très néfaste. Tu sais, je fais de la méditation maintenant, et l’ego, c’est quelque chose de très long à éliminer.

En parlant de méditation, ce qui frappe à l’écoute de l’album, c’est qu’il est à la fois assez calme, serein, mais quand même assez enjoué, joyeux par moments. Comment avez-vous fait?
Nous étions tous sur la même longueur d’onde. Nous avons commencé à enregistrer au mois de janvier, il faisait très froid, nous rêvions de vacances, de soleil, de plages… Ça vient peut-être de là. Nous n’avions presque pas d’électricité et nous devions lutter pour rester au chaud ! (rires) “Trouble Understanding” a été enregistrée le même jour que “So-Oh” , l’une est assez contemplative, tandis que l’autre est ensoleillée et positive. C’était génial de regarder petit à petit le printemps arriver, et peu à peu les arbres se couvrir de feuilles… Et nous avons vu notre travail fleurir et porter ses fruits !

Sur cet album vous n’avez pas non plus spécialement cherché à étendre votre palette musicale… C’est le son des Charlatans que l’on connaît et apprécie !
Oui, nous avons déjà tenté de sortir de notre zone de confort, mais pas cette fois-ci. Il y a certains albums où on ne nous reconnaît presque pas. Ou bien grâce uniquement à ma voix. Cette fois-ci, nous avons juste essayé de faire ce qui nous venait naturellement. Du coup, on dirait presque un de nos vieux albums, bien qu’il ne sonne pas trop “vieux”… Tu vois ce que je veux dire ? Moderne, mais à l’ancienne. (rires)

Y a-t-il des limites que vous vous fixez au niveau du son des Charlatans ?
Oui, parfois… Quand je présente quelque chose et que les autres n’en veulent pas, ce n’est pas les Charlatans ! (rires). Quand je leur fais écouter mes démos et qu’ils ne veulent pas les utiliser. Ça peut être assez frustrant parfois, mais ça reste fun.

On sent une grosse influence seventies sur cet album. De la disco, par exemple, sur “Let The Good Times Be Never Ending”…
Oui, c’est le son qui me vient quand je pense à la Californie, j’écoutais beaucoup de Steely Dan par exemple, ses chansons les plus pop, tu vois. William Onyeabor, ce genre de choses. C’était nouveau pour moi alors je voulais l’intégrer.


Depuis le départ de Jon, comment les relations au sein du groupe ont-elles évolué ?
Tout est plus, disons… harmonieux. C’est la leçon que nous avons tirée de tout ça : il faut être gentils les uns avec les autres.

Au niveau personnel, qu’est-ce qui a changé pour toi ? Cela fait presque 10 ans que tu as arrêté l’alcool et la drogue, comment te sens-tu aujourd’hui ?
Je me sens tellement différent de la personne que j’étais à cette époque. J’ai tout arrêté en 2006, et depuis, je n’ai pas replongé une seule fois. Ça me paraît tellement lointain… Lorsqu’on est un addict, il est facile d’être toujours dans le déni. Ce qui a été différent pour moi je pense, c’est que je n’ai jamais été dans le déni. J’ai toujours su que quelque chose n’allait pas. Un jour, je me suis juste enfermé dans une chambre d’hôtel pendant une semaine entière, et quand j’en suis ressorti, j’ai dû partir en tournée. Et voilà. J’ai suivi les conseils d’un thérapeute ayurvédique. Il m’a donné un programme à suivre sur 21 jours, je l’ai suivi pendant 3 ans. On peut dire que j’ai remplacé mes addictions par une autre! Je cherchais sans doute à compenser mes excès passés ! (rires) Une chose que j’ai comprise, c’est qu’une fois que le mal est fait, on ne peut pas revenir en arrière. Je prenais des drogues et je buvais pour pouvoir me sentir heureux, et c’est pour ça que c’est si dur à arrêter. Avec le recul je réalise que c’était très courageux d’arrêter tout seul. Peut-être qu’un jour j’aurais de nouveau envie de me servir un verre, qui sait. Pour l’instant, ça n’est jamais arrivé. Je suis beaucoup plus heureux maintenant que je ne l’ai jamais été. C’est ce que je voulais représenter avec cet album, le côté positif, détendu. On a besoin de pas grand chose. Cet album, on a commencé à l’enregistrer, on n’avait qu’un pied de micro. On a totalement laissé faire notre intuition. Nous avons vraiment dû chercher au fond de nous-mêmes pour retrouver les racines des Charlatans.

Les Charlatans viennent de sortir Modern Nature, leur douzième album studio. Et même sans concert à la clé, Tim Burgess était de passage à Paris. L’occasion rêvée de l’interviewer, d’autant plus que c’est un gars vraiment sympa. Un événement pour tout fan de la première heure !

Fin 2013, vous avez joué un concert au Royal Albert Hall, à la fois pour rendre hommage à Jon Brookes, et puis pour lever des fonds en faveur de la recherche contre le cancer… Dans quel état d’esprit étiez-vous après avoir fait ce concert?
Tim Burgess : C’était à la fois la fin et le début de quelque chose. Depuis 2010, la santé de Jon se détériorait, avec des hauts et des bas. Après le concert, nous avons reçu beaucoup de soutien. Pendant ce temps nous écrivions des nouvelles chansons, mais elles n’étaient vraiment pas terribles… Depuis Who We Touch nous savions que nous pouvions jouer sans Jon, alors la transition s’est faite facilement. Mark pensait que ce serait difficile, mais en fait à aucun moment nous n’avons douté. Ce n’est pas une période “triste” pour nous, en ce moment.

Donc ça n’a pas été un challenge pour vous de travailler avec d’autres batteurs ?
Non, pas du tout. Nous avons travaillé avec Stephen Morris [ndlr - de New Order] que nous connaissons bien. Jon aimait beaucoup Gabe [ndlr - Gabe Gurnsey de Factory Floor]. Et on nous avait beaucoup recommandé Pete [ndlr - Pete Salisbury, The Verve]. Alors… Nous étions toujours en terrain connu. Nous avons enregistré avec la batterie de Jon, dans notre studio que nous avons depuis 1997, le Big Mushroom. Il n’était pas question pour nous de faire quelque chose dont Jon ne serait pas fier. Cela nous a paru complètement naturel.

Vous avez la réputation d’être un groupe “malchanceux”… Je serais plutôt tentée de vous décrire comme des “battants”. Vous semblez ne jamais laisser les épreuves de la vie prendre le pas sur le travail, l’écriture des chansons. Qu’en penses-tu ?
Oui, je comprends que les gens nous voient ainsi…Moi, je nous vois plutôt comme une équipe de footballeurs qui sont en train de se faire mener, mais qui continuent de se battre sur un terrain boueux… (rires) Ou des coureurs de marathon. Les gens ne s’imaginent pas tout le travail qu’on doit accomplir derrière les épreuves. Heureusement, j’aime le travail ! (rires) Être un battant, ça implique d’avoir plus de qualités qu’être juste “malchanceux”. Être un battant, c’est avoir une certaine force de volonté, de réinvention, d’originalité, de rester debout même quand tout conspire à vous décourager.

Ça implique une certaine dignité aussi… Pourtant en lisant ton autobiographie [“Tellin’ Stories”, 2012] , on voit très bien qu’il y a très peu d’ego chez les Charlatans… En tous cas ce n’est pas un moteur.
L’ego c’est quelque chose de très néfaste. Tu sais, je fais de la méditation maintenant, et l’ego, c’est quelque chose de très long à éliminer.

En parlant de méditation, ce qui frappe à l’écoute de l’album, c’est qu’il est à la fois assez calme, serein, mais quand même assez enjoué, joyeux par moments. Comment avez-vous fait?
Nous étions tous sur la même longueur d’onde. Nous avons commencé à enregistrer au mois de janvier, il faisait très froid, nous rêvions de vacances, de soleil, de plages… Ça vient peut-être de là. Nous n’avions presque pas d’électricité et nous devions lutter pour rester au chaud ! (rires) “Trouble Understanding” a été enregistrée le même jour que “So-Oh” , l’une est assez contemplative, tandis que l’autre est ensoleillée et positive. C’était génial de regarder petit à petit le printemps arriver, et peu à peu les arbres se couvrir de feuilles… Et nous avons vu notre travail fleurir et porter ses fruits !

Sur cet album vous n’avez pas non plus spécialement cherché à étendre votre palette musicale… C’est le son des Charlatans que l’on connaît et apprécie !
Oui, nous avons déjà tenté de sortir de notre zone de confort, mais pas cette fois-ci. Il y a certains albums où on ne nous reconnaît presque pas. Ou bien grâce uniquement à ma voix. Cette fois-ci, nous avons juste essayé de faire ce qui nous venait naturellement. Du coup, on dirait presque un de nos vieux albums, bien qu’il ne sonne pas trop “vieux”… Tu vois ce que je veux dire ? Moderne, mais à l’ancienne. (rires)

Y a-t-il des limites que vous vous fixez au niveau du son des Charlatans ?
Oui, parfois… Quand je présente quelque chose et que les autres n’en veulent pas, ce n’est pas les Charlatans ! (rires). Quand je leur fais écouter mes démos et qu’ils ne veulent pas les utiliser. Ça peut être assez frustrant parfois, mais ça reste fun.

On sent une grosse influence seventies sur cet album. De la disco, par exemple, sur “Let The Good Times Be Never Ending”…
Oui, c’est le son qui me vient quand je pense à la Californie, j’écoutais beaucoup de Steely Dan par exemple, ses chansons les plus pop, tu vois. William Onyeabor, ce genre de choses. C’était nouveau pour moi alors je voulais l’intégrer.


Depuis le départ de Jon, comment les relations au sein du groupe ont-elles évolué ?
Tout est plus, disons… harmonieux. C’est la leçon que nous avons tirée de tout ça : il faut être gentils les uns avec les autres.

Au niveau personnel, qu’est-ce qui a changé pour toi ? Cela fait presque 10 ans que tu as arrêté l’alcool et la drogue, comment te sens-tu aujourd’hui ?
Je me sens tellement différent de la personne que j’étais à cette époque. J’ai tout arrêté en 2006, et depuis, je n’ai pas replongé une seule fois. Ça me paraît tellement lointain… Lorsqu’on est un addict, il est facile d’être toujours dans le déni. Ce qui a été différent pour moi je pense, c’est que je n’ai jamais été dans le déni. J’ai toujours su que quelque chose n’allait pas. Un jour, je me suis juste enfermé dans une chambre d’hôtel pendant une semaine entière, et quand j’en suis ressorti, j’ai dû partir en tournée. Et voilà. J’ai suivi les conseils d’un thérapeute ayurvédique. Il m’a donné un programme à suivre sur 21 jours, je l’ai suivi pendant 3 ans. On peut dire que j’ai remplacé mes addictions par une autre! Je cherchais sans doute à compenser mes excès passés ! (rires) Une chose que j’ai comprise, c’est qu’une fois que le mal est fait, on ne peut pas revenir en arrière. Je prenais des drogues et je buvais pour pouvoir me sentir heureux, et c’est pour ça que c’est si dur à arrêter. Avec le recul je réalise que c’était très courageux d’arrêter tout seul. Peut-être qu’un jour j’aurais de nouveau envie de me servir un verre, qui sait. Pour l’instant, ça n’est jamais arrivé. Je suis beaucoup plus heureux maintenant que je ne l’ai jamais été. C’est ce que je voulais représenter avec cet album, le côté positif, détendu. On a besoin de pas grand chose. Cet album, on a commencé à l’enregistrer, on n’avait qu’un pied de micro. On a totalement laissé faire notre intuition. Nous avons vraiment dû chercher au fond de nous-mêmes pour retrouver les racines des Charlatans.

Un grand merci à Anne-Line pour l’interview !


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