La peinture Scandinave du XXe siècle à nos jours

Publié le 17 mars 2015 par Jigece

Me voilà reparti dans mes voyages picturaux. Et c’est tout au Nord de l’Europe que je vous convie cette fois, avec la peinture Scandinave du XXe siècle à nos jours. Une peinture, il faut bien le dire, assez peu connue chez nous, à la notable exception près du norvégien Edvard Munch et de son fameux « cri ». Munch exécuta cinq versions du tableau, dont les plus fameuses sont une tempera sur carton au musée Munch d’Oslo et une peinture à l’huile, tempera et pastel à la Galerie nationale d’Oslo. Une troisième version appartient également au musée Munch. Une quatrième appartenait au milliardaire norvégien Petter Olsen avant d’être vendue aux enchères à un acheteur anonyme, le 2 mai 2012, pour la somme record (dans une vente aux enchères) de 119,92 millions de dollars !
Mais ce tableau est finalement l’arbre qui cache la forêt car qui, dans le grand public, connait vraiment le reste de l’œuvre de Munch ou le nom d’autres peintres norvégiens ?

Le Danemark

La peinture nordique du XIXe siècle se divise en deux grandes périodes bien distinctes :
– La Première recouvre les années 1820-1850 et concerne surtout le Danemark, où un véritable Âge d’Or vit le jour : de retour de Rome, plusieurs artistes comme Christoffer Wilhelm Eckersberg, voulurent libérer la peinture des conventions établies par l’Académie. A cet égard, ils privilégièrent une démarche naturaliste ainsi que la peinture de plein air. Ils peignent des paysages citadins ou ruraux emplis de lumière, dans un style novateur, libre et spontané.
– La Seconde débuta autour de 1870 où, à l’instar des peintres français retirés à Barbizon ou à Pont-Aven, quelques artistes quittèrent la capitale danoise afin de se rendre à Skagen, petit village de pêcheurs à la pointe nord du pays. Autour de Michael Ancher et de Peder Severin Krøyer, ces peintres adoptèrent une facture libre et spontanée, et choisirent désormais leurs motifs dans leur entourage et leur quotidien. L’importance de l’École de Skagen dans l’évolution de la peinture scandinave est déterminante : elle marque l’assimilation des principes impressionnistes dans le respect de la tradition scandinave. La fin du siècle voit l’éclosion de styles personnels, orientés essentiellement vers l’exploration du monde intérieur de l’artiste, comme dans les œuvres de Vilhelm Hammershøi, parvenu de son vivant à une notoriété internationale. Ses paysages et ses intérieurs dénudés baignés d’une atmosphère quasi surréaliste, prennent leur source dans la peinture hollandaise afin d’offrir cette force, ce calme, ce mystère, cette luminosité et cette simplicité si subtilement dosée.
Le mouvement symboliste trouva résonance au Danemark dans les œuvres de Jens Ferdinand Willumsen ou d’Ejnar Nielsen.

La Finlande et l’Islande

Après avoir subi la domination suédoise pendant près de sept siècles, en 1809 la Finlande se retrouva annexée à la Russie et resta sous sa dépendance jusqu’à la Première Guerre mondiale. Ce joug, de même que les conditions naturelles extrêmes de ce pays, dont le tiers se trouve au-delà du cercle polaire arctique, n’empêchèrent pas l’Art finlandais de se développer de manière originale. Centrés sur l’exaltation d’un patriotisme national, les artistes participèrent à la quête des racines politiques, historiques et culturelles de leur pays. Le passé mythique de la Finlande devint leur source d’inspiration, comme en témoignent les chefs-d’oeuvre d’Akseli Gallen-Kallela, qui illustre la saga du Kalevala.
La nature fut incontestablement le sujet de prédilection des peintres de cette époque, mais son approche différa de celle des artistes Français. Primitivisme et exotisme conduisirent les artistes nordiques à découvrir des « terres vierges », contrées oubliées de leur propre pays : Carélie en Finlande, Dalécarlie et Bohüsan en Suède, montagnes de Norvège… Trois oeuvres finlandaises représentent parfaitement ce courant : « Le Grand Pic Noir – Terre désertique » (1893), « Les Rapides de Mäntykoski (1892-94) d’Askeli Gallen Kallela, et Terre Désertique (1899) de Pekka Halonen. Plus encore que l’évolution de la nature finlandaise, ces toiles sont devenues le symbole de la Finlande luttant pour conquérir son indépendance, politique face à la Russie, et culturelle face à la Suède.
Lors de l’Exposition Universelle de 1900 à Paris, la Finlande, alors Grand-Duché rattaché à la personne du Tsar Nicolas II, obtint que soit construit un pavillon (décoré, entre autres, par Pekka Halonnen) séparé de celui des Russes où fut présentée une partie de ses œuvres (les peintures étant exposées avec les toiles russes).

La Norvège

La rigueur du climat, l’aridité de la nature et la domination, jusqu’en 1905, de la Suède, retardèrent le développement d’un véritable Art norvégien. Grâce à une impulsion décisive venue du Danemark, notamment du cercle d’artistes de Skagen, les peintres norvégiens commencèrent à peindre des scènes de la vie contemporaine et éclaircirent leur palette. Le genre intimiste était né, porté à son apogée par Christian Krohg vers la fin du XIXe siècle.
Les premières manifestations du Symbolisme, la Peinture d’atmosphère, ont fait leur apparition en Norvège. Certains artistes dont Kitty Kielland, Harriet Backer, Eilif Peterssen, Erik Werenskiold, Gerhard Munthe, se réunirent pour travailler dans la ferme de Christian Skredsvig et se mirent ainsi à représenter quelques unes des caractéristiques de la nature nordique, tels les crépuscules, les longs soirs d’été et les eaux des lacs, des fjords et des rivières.

La Suède

L’influence de l’Impressionnisme se répercuta dans tous les pays du Nord. A la recherche de nouvelles perspectives, bannissant la rigueur académique de L’Académie de Stockholm, plusieurs artistes suédois se rendirent en France dès 1870. Réunis dans le village de Grez-sur-Loing, ils assimilèrent les leçons de l’impressionnisme, particulièrement visibles dans l’oeuvre de Karl Nordström (il réunit ensuite une colonie d’artistes à Varberg, sur la côte ouest du pays, avant d’évoluer vers un synthétisme japonisant, proche du style de Gauguin), et les diffusèrent dès leur retour dans leur pays d’origine. Ils préservèrent la singularité de leur style tout en participant à l’évolution artistique de leur temps vers le Symbolisme. Ces artistes accordèrent une attention particulière et attentionnée à cette subtile lumière qui baigne les paysages du Nord. Au tournant du XIXe siècle, les vues nocturnes tourbillonnantes d’Eugène Jansson ainsi que les illustrations décoratives de Carl Larsson reflètent la diversité et la richesse de l’Art suédois.
Les portraits du célèbre peintre suédois Anders Zorn séduisent par leur spontanéité et leur acuité psychologique. Ses nus sensuels et picturaux, inspirés en partie par les Baigneuses et autres femmes de Renoir, marquèrent une rupture définitive avec les conventions académiques.