Le Songe d’une nuit d’été de Muriel Mayette-Holtz : onirisme explosif et vacillement baroque

Publié le 10 avril 2015 par Marcel & Simone @MarceletSimone

La scénographie épurée de Didier Monfajon nous suggère déjà la mise en abyme du théâtre et enferme les personnages dans le théâtre avec un cyclorama qui ferme l'accès au plateau pour les personnages au début. A la levée de celui-ci, il laisse place dans la profondeur à une immense toile blanche dans laquelle ils se perdent. La scène devient donc un immense tableau blanc, paravent éventuel sur lequel le spectateur pourrait dessiner les objets et les mondes que son imaginaire lui souffle. La théâtralité règne sur la pièce, les personnages se heurtent à plusieurs reprises à cette immense toile blanche comme contre la toute-puissance du rêve, et Obéron bloqué dans la toile blanche associe ce monde dramatique à celui du sommeil. Finalement, le cyclorama se refermera sur les comédiens happés par le lointain après la représentation de Pyrame et Thisbé, mais les fées restent sur l'avant-scène et brouillent à nouveau la frontière entre le réel de la salle et la fiction.

En parallèle de l'intrigue, un groupe d'artisans répète une pièce pour le mariage du duc Thésée, une tragédie dont les comédiens improvisés font une farce sans vraiment le vouloir. Ils représentent l'idée du théâtre dans le théâtre tout en célébrant le topos shakespearien de la vie comme gigantesque farce. Le spectacle des artisans est par ailleurs analysé par Alain Viala qui fait du lion une interrogation sur la fiction :

" un lion qui ne doit pas faire peur (aux femmes) mais qui doit faire peur (quand même)... Tout le théâtre est là. Il est et n'est pas un lion à la fois."[1]

Le théâtre joue à être du théâtre pendant un instant, et le spectateur joue au crédule et se construit ainsi un art de la collectivité. Malgré sa position sociale, Thésée insiste pour voir cette pièce d'amateurs, et ainsi après avoir posé la question des croyances dont la seule vérité est dans l'esprit de chacun, la pièce s'achève sur une dimension politique, et faisant du spectateur un soutien de la Cour qui s'est assise au premier rang, une partie intégrante de la collectivité.