Volpone [Stefan Zweig]

Publié le 18 avril 2015 par Charlotte @ulostcontrol_
Hello,
Ca faisait longtemps que je ne vous avais pas présenté un livre de Stefan Zweig, dis donc ! Ca faisait aussi longtemps que je n'en n'avais pas lu, il faut dire... Mais voilà qui est chose faite ! Je vous propose de découvrir aujourd'hui Volpone, une pièce de théâtre de Ben Jonson adaptée par Stefan Zweig en 1925.

Volpone est un livre assez original par rapport aux autres de la bibliographie de Stefan Zweig puisqu'il s'agit d'une comédie ! La pièce met en effet en scène Volpone, le héros éponyme incroyablement riche de l'histoire, et son serviteur Mosca. N'ayant aucun héritier et une énorme fortune, les intéressés se pressent naturellement à ses côtés et cherchent à tout prix à s'attirer ses bonnes grâces. Voulant se jouer de cette situation, Volpone élabore avec Mosca un plan machiavélique pour étoffer encore plus sa fortune et tourner en ridicule les intéressés qui lui tournent autour : il prétend être sur le point de mourir pour attirer encore plus les avares qui espèrent devenir son héritier. Mosca suggère ainsi à Voltore, Corbaccio et Corvino d'offrir des cadeaux à Volpone et de le gâter pour que ce dernier inscrive leur nom sur son testament. Evidemment, ces trois-là ne savent pas que Mosca leur fait croire à chacun qu'il est l'héritier unique : ils ne reculent alors devant rien pour voir leur nom inscrit sur le testament...
« VOLPONE, enfilant la pelisse. Vas-tu bien les chauffer ? Les mettre sur le gril ? Leur remuer la bile et leur faire tirer la langue pour que la bave en coule ? Vas-tu les tourmenter soigneusement ?
MOSCA. Comme un tortionnaire de la Sainte Inquisition.
VOLPONE. Et les dévaliser ?
MOSCA. Comme des soldats une ville, devant laquelle ils ont piétiné huit mois dans la boue. » Acte 1, scène 1, page 47
Les caractères sont esquissés de manière assez sommaire puisque les personnages sont réduis à un seul élément qui les définit. La psychologie des personnages n'est pas particulièrement développée (on aurait de toute façon vite fait le tour de leur personnalité je pense), tout est ainsi mis en oeuvre pour que l'action soit au cœur de la pièce, on va ici directement à l'essentiel. A travers les portraits de Voltore, Carbaccio, Corvino et même celui de Volpone, Zweig nous dresse une critique amère de l'avarice. Jusqu'où est-on prêt à aller pour de l'argent ? J'admets que c'est une thématique qui m'intéresse et me touche beaucoup et j'ai bien aimé voir ici ce petit mélange entre L'Avare et Les Fourberies de Scapin.
« MOSCA, ricanant derrière son dos. C'est ça, file clopin-clopant, squelette ambulant... Ah ! l'argent fait courir les hommess ! Pour ça, ils se reniflent le derrière et restent en chaleur toute leur vie ! Celui-ci vend son fils, et celui-là sa femme ! Ils vendraient même Dieu, s'Il leur tombait sous la mai, juste pour de l'argnt... Et il y en a partout ! Là... (Il tape sur un coffre.) Puant de sueur et de sang, enfermé, prisonnier. Là... (Il frappe sur le buffet.) Qui gèle dans le noir, ne réchauffe aucune âme... Et puis, ici, tout près, de l'autre côté de la rue, dans chaque coin de la ville et de toute la terre : en tous lieux, de l'argent, enfoui dans un cercueil au couvercle pressé par l'avarice et guigné par l'envie, avec sa langue pendante... Ah ! Quel plaisir de voir vos crânes s'entrechoquer, pauvres fous, et de vous faire danser la danse de Saint-Guy ! Si vous ne me donnez pas l'argent que vous m'avez promis, je m'en fiche... Je vous jouerai un tour de ma façon... » Acte 1, scène 3, page 105
C'est assez surprenant de retrouver Stefan Zweig dans autre chose que dans une nouvelle ou que dans une pièce de théâtre dramatique, mais j'ai plutôt bien aimé le lire dans un registre plus comique. Les comédies ne sont pas trop « mon truc » d'habitude, mais on retrouve ici une critique des passion humaines et une sorte de tension latente qui rendent la pièce intéressante. Il y a quelque chose d'assez sombre dans cette histoire (peut-être à cause du procès à la fin de la pièce) et l'on sent bien une sorte de déception, de constat amer que l'on pose et que l'on constate chez l'Homme. S'il s'agit d'une comédie, il y a définitivement quelque chose d'amer dans les répliques de Stefan Zweig.
J'ai bien apprécié cette pièce, mais je ne vous la conseillerais pas pour commencer avec Zweig. Si elle n'est pas mauvaise, cette histoire ne se distingue pas non plus par un trait exceptionnel et reste assez banale, alors que les nouvelles de Zweig sont à l'inverse excellentes et inégalables ! Il s'agit plutôt d'une pièce à lire si vous vous intéressez aux réécritures ou si, comme moi, vous êtes fan de Stefan Zweig et êtes lecteurs d'à peu près tout ce qu'il a pu produire (je paierais peut-être pour lire une de ses listes de courses).

Un riche en bonne santé joue les mourants pour abuser d'autres riches dans la Venise du XVIe siècle. Telle est la trame de ce Volpone inédit en français, adaptation très libre de la célèbre pièce de Ben Jonson. Cette comédie, genre inhabituel chez Stefan Zweig, fait un triomphe dès 1925 sur toutes les grandes scènes, de Vienne à Léningrad, en passant par New York et Paris. Mais si l'argent est le ressort du comique de Volpone, l'auteur de La Confusion des sentiments a glissé dans son oeuvre d'autres ingrédients qui lui donnent une nouvelle dimension, celle d'une farce profonde sur la manipulation, la recherche de sensations et les faux-semblants. Bref, sur notre époque.

Et vous, quel est le dernier livre de Stefan Zweig que vous avez lu ? Avez vous déjà lu une de ses pièces de théâtre ? Avez-vous déjà lu l'original de Ben Jonson ?
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