Deux jours à tuer – Mais pourquoi Albert Dupontel est-il si méchant ?

Par Bebealien

De temps en temps, je trompe mes séries B voir Z pleines de sang, de violence, de testostérone et d’humour bas du plafond pour aller voir des films français. Ouaip. Même que. Mais je fais quand même attention à sélectionner. Jean Becker avait fait des films certes jolis mais plutôt chiants dernièrement, comme les Enfants du Marais… En prenant une histoire apte à faire chialer dans les chaumières mais suffisamment intrigante, et surtout en se basant sur un acteur toujours aussi bon (Albert Dupontel), il arrive même à émouvoir quelque peu l’âme insensible que je suis. Comme quoi, le cinéma français est parfois capable de faire de bons films quand il sort un peu de la routine…

Deux jours à tuer – Things to do before you’re dead

En pleine réunion autour d’une campagne marketing pour un yaourt, Antoine pète les plombs. Il commence à dire à haute voie ce qu’il pense et flingue la réunion. Le carnage ne fait que commencer. De retour chez lui, il se met à dos sa femme, puis ses enfants et arrive finalement à insulter et énerver tous ses amis. Pourtant Antoine a tout pour être heureux. Une femme aimante, des enfants, une belle maison, un gros salaire… Pourquoi a-t-il si brusquement changé ?

Un homme seul devant un arbre. En psycho, une telle affiche pourrait en dire beaucoup…

Difficile d’en dire plus sans déflorer l’intrigue. Surtout que les indices épars permettent malheureusement un peu trop vite de comprendre le nœud de l’intrigue. Le film est clairement divisé en deux parties. Dans la première Antoine va se livrer à un exercice d’autodestruction aussi jouissif qu’inquiétant. Dans la deuxième il va s’échapper, et basculer plus vers l’émotion.

La fameuse scène du dîner. Attention, ca va flinguer.

Le point culminant est atteint lors d’un dîner, auquel la bande-annonce du film fait clairement écho. Antoine s’évertue savamment à se mettre à dos tous les invités de ce repas d’anniversaire en leur disant la vérité et en y rajoutant une couche de méchanceté gratuite. Le tout est aussi jouissif (« Bérengère, la meilleure façon que t’arrête de dire des conneries, c’est que tu fermes ta gueule… » ou encore « Ils vont être super contents les petits africains avec des sacs Gucci ») qu’il est inquiétant. Le massacre est d’autant plus plaisant qu’il ne peut que nous interpeller et nous rappeler à quel point, parfois, on peut avoir envie de faire pareil.

Le malaise est mis à jour dans la cuisine, entre Antoine et sa femme (Marie-Josée Croze) qui croit qu’il la trompe.

Je l’ai dit plus haut, le film repose sur l’interprétation magistrale de Dupontel. Certains dialogues ont beau être parfois un peu lourds ou théâtraux, le personnage fait immédiatement mouche, surtout dans sa méchanceté. Beau casting de seconds rôles également. Marie-Josée Croze en femme aimante, puis Pierre Vaneck, Alessandra Martinez, Christina Reali, Claire Nebout… Interprétation simple, efficace et pour une fois sans en faire des tonnes.

Antoine essaie de se ressourcer…

Il est en effet intéressant de constater que lorsque le cinéma français s’éloigne de ses clichés habituels (soit production lorgnant du côté d’Hollywood sans les moyens ni l’ambition, soit en faisant un film de plus sur les trentenaires célibataires en mal d’amour) il réserve de vraies bonnes surprises. La thématique du film in fine est universelle et touche forcément. On ne saura dire à quel point Jean Becker fait un très bel exercice d’équilibre, arrivant à ne tomber ni dans le pathos, ni dans la farce, arrivant surtout à décrire une belle brochette de personnages humains avant tout.

Je n’attendais par grand-chose du film, malgré un bouche à oreille plutôt très positif. Double bonne surprise : d’une part le film était bon, d’autre part la salle était blindée. Je ne sais pas s’il sera encore diffusé cette semaine, mais foncez, pour une fois que je vous recommande ce type de film…