We want sex equality - 7/10

Par Aelezig

Un film de Nigel Cole (2010 - UK) avec Sally Hawkins, Miranda Richardson, Bob Hoskins, Andrea Riseborough, Jaime Winstone, Rosamund Pike, Daniel Mays, Rupert Graves

Comédie sympathique issue d'une histoire vraie.

L'histoire : 1968. Les femmes de l'atelier sellerie de l'usine Ford britannique sont en rébellion. On a changé leur titre d'ouvrière spécialisée en ouvrière tout court, et elles ne sont pas contentes du tout d'être ainsi dévalorisées. Soutenues par leur délégué syndical, Albert, et, soi-disant par le syndicat en général (qui s'avèrera en fait être à la botte des patrons), elles menacent de faire grève et d'arrêter les heures supplémentaires. Leur cas va être discuté, mais Albert insiste pour être accompagnée de deux d'entre elles, pour marquer le coup. Sauf que le fameux délégué syndical leur interdit de prendre la parole... ce ne sont que des femmes après tout. Mais la douce et timide Rita se pique au jeu et voyant que leurs revendications semblent être au bord de tomber à l'eau, elle prend son courage à deux mains et s'exprime à voix haute. Sidération de ces messieurs. Les filles se mettent donc en grève, Rita en tête de ligne, et vont mener un rude combat qui aboutira à une avancée majeure dans la justice au travail entre hommes et femmes, bien au-delà de ce qu'elles comptaient faire au début, les menant jusqu'au bureau de la ministre du Travail.

Mon avis : Ces femmes ont obtenu que leurs salaires soient revus à la hausse, soit 90 % de celui des hommes, à poste égal. Même si ce 10 % semble complètement absurde, c'était déjà une énorme et belle réussite. Et puis quand on sait que près de 50 ans plus tard, l'écart reste en réalité de 20 % un peu partout, la victoire est amère... Nous devons continuer le combat !

Le film est ultra sympathique, avec une Sally Hawkins, à la fois rigolote et très touchante, comme d'habitude, oscillant entre la hardiesse, le courage et la timidité face à ces grands patrons. Les autres comédiennes ne sont pas en reste, toutes aussi attachantes les unes que les autres.

Et j'ai aussi aimé qu'on nous explique la conception masculine "justifiant" les différences de salaire : les femmes étaient censées rester à la maison, et s'occuper des enfants, si elle voulait travailler, c'était soit parce qu'elle le voulait bien (loisir, argent de poche...), mais elle prenait alors d'un homme et il ne fallait pas trop les encourager, leur rôle n'était pas là ;  soit pour faire un "appoint" au budget familial, qui devait bel et bien demeurer "l'exception qui confirme la règle". C'était donc un bouleversement à la fois pour ces femmes d'oser prétendre que leur travail avait la même valeur que celui de leur compagnon, et pour les hommes de comprendre que femme au foyer n'était pas la seule alternative dans leurs petites têtes qui n'étaient pas si linottes que ça. A ce titre, la réaction du patron de l'usine est très amusante devant le nouveau comportement de son épouse qu'il découvre sous un jour qu'il ne connaissait finalement pas du tout !

Intéressante aussi la démonstration économique et financière sur les conséquences (et donc le chantage que va exercer Ford) que représente l'augmentation de toutes les salariées. Les manifestants et râleurs de tous genres oublient souvent, quand ils critiquent patrons et gouvernants, que l'argent ne sort pas du chapeau du magicien, que ce que l'on donne quelque part, il faut le prendre ailleurs. Bon... évidemment, vous allez me dire, "piochons dans les paradis fiscaux et les salaires de joueurs de foot". Mais même là, ce n'est pas aussi simple... Supprimer les paradis fiscaux, et vous ruinez des entreprises d'un seul coup, ainsi que les nations qui les accueillait ; on fait quoi ensuite ? Donner moins de sous aux joueurs ? Ils vont se tirer ailleurs parce qu'il y aura des clubs qui ne joueront pas le jeu, etc. etc. etc. Pas simple, l'économie ! Vive le communisme ! Une belle utopie... hélas... qui exigerait que toute la planète s'y mette.

Parfois un peu trop lisse, un peu trop bisounours et glamour (les filles ne sont pas vraiment représentatives d'ouvrières épuisée par le cumul travail à l'usine / travail à la maison), mais infiniment joyeux et porteur d'espoir, c'est un gentil film, presque un feel good movie, qui met sa petite pierre dans l'édifice des droits des hommes et des femmes. Et c'est déjà mieux. Il ne faut jamais cesser de répéter les choses... les bonnes, celles qui font avancer le schmilblic.

Le personnage de Rita est fictif ; il s'inspire de plusieurs des protagonistes réelles.

Jolie et fraîche reconstitution des années 60. On ne peut s'empêcher d'éprouver une douce nostalgie... mais les filles nous remettent les idées en ordre ! C'est drôle de constater combien, dans quasiment tous les pays du monde, la fin des années 60 fut l'époque de tant de révolutions, petites et grandes.

Petite anecdote, véridique, très drôle, et qui contribua au soutien de la population vis-à-vis des grévistes et à la célébrité de leur mouvement : leur banderole "We want sex equality" fut un jour mal déployée, et on ne lisait que "We want sex"... ce qui déclenchait bien entendu l'hilarité des passants et des automobilistes !

Ne manquez pas le générique de fin qui montre les vraies héroïnes de l'histoire (qui rigolent encore de leur aventure !).

Les critiques sont globalement très positives, mais les Français ont un peu boudé le film : 230.000 entrées.