Un Sommet national des Peuples Originaires à Buenos Aires [Actu]

Publié le 01 juin 2015 par Jyj9icx6

L'impressionnante manifestation d'hier
à la hauteur du croissement Avenida de Mayo-Perú

Vingt-cinq peuples amérindiens de dix-sept Provinces argentines ont tenu à Buenos Aires un sommet de trois jours, du 27 au 29 mai 2015, pour faire le point sur leur situation dans la République. En effet, les difficultés ne manquent pas et les réactions racistes, les discriminations, les querelles sur la jouissance de telle ou telle partie du territoire pour des raisons souvent sordides subsistent malgré la démocratisation des institutions politiques du pays.
Peu nombreux sont les journaux à avoir mentionné l'événement malgré la marche très spectaculaire que les délégués ont effectuée hier dimanche sur Avenida de Mayo entre Plaza del Congreso et Plaza de Mayo pour remettre au Gouvernement une déclaration commune. Mais les manifestants n'ont même pas été reçus à la Casa Rosada, ils n'ont pas même pu la déposer à la réception de l'accueil (il est vrai qu'on était dimanche mais un gouvernement travaille tous les jours, surtout en période électorale).
Cette déclaration finale est reprise, en substance ou en intégralité, par plusieurs journaux en ligne ou imprimés (et dans ce cas il s'agit d'une presse protestataire appartenant à des courants anti-mondialistes et révolutionnaires de gauche). Seul journal national à se faire écho de la manifestation : Página/12 et ce malgré le caractère très critique de la déclaration finale vis-à-vis du gouvernement en place, que Página/12 soutient. Il est très intéressant de constater que les journaux de l'opposition n'ont pas cru bon de relayer la manifestation pourtant hostile au Gouvernement en place. Comme quoi, ils ont l'opposition à géométrie variable. Dans cet événement politique, la communauté Qom de la province de Formosa tient un rôle leader en termes de communication.

Photo de groupe de tous les délégués


Extraits :
Nosotros, las autoridades de 25 pueblos indígenas provenientes de 17 provincias del país, reunidos en esta Cumbre Nacional de los Pueblos Indígenas, enviamos un saludo fraternal a todas las hermanas y hermanos indígenas del país y de toda América. Asimismo enviamos un fraternal saludo a todo el pueblo argentino que, en gran parte, también sufre las consecuencias de un modelo económico nosustentable. Este modelo económico, conocido desde los años 90 como el capitalismo neoliberal, es un modelo occidental, hoy globalizado. Ha resultado en una profundización sin precedentes de la desigualdad y el empobrecimiento, la violación de los derechos humanos, la incapacidad del sistema judicial, la explotación y saqueo de los llamados “recursos naturales” (biodiversidad para los pueblos indígenas) y, por consecuencia, el destrozo del medio ambiente, la salud humana y el patrimonio cultural. Todo esto atenta contra el equilibrio y la vida armónica de la Madre Tierra y todos los seres vivientes que habitan en este planeta. Venimos desde nuestros territorios ancestrales para manifestar que seguimos vivos como pueblos y culturas indígenas, para dejar una vida en base a nuestros principios y valores a las próximas generaciones. Venimos con nuestra memoria ancestral, ella nos da la posibilidad de rescatar nuestros conocimientos tradicionales. Es desde la memoria donde nos conectamos con el pasado, con el presente y con el futuro, sabemos de dónde venimos, quienes somos y también hacia dónde vamos. Rescatamos nuestra propia historia, educación autónoma, medicina tradicional, derecho consuetudinario, idioma, el mandato ancestral transmitido de generación en generación. La memoria es la base de la identidad de un pueblo que se ha conservado por miles de años. Cumbre nacional de los Pueblos Indígenos, 27-29 mayo 2015
Nous, les responsables de 25 peuples indigènes provenant de 17 provinces du pays, réunis en ce Sommet national des Peuples Indigènes, adressons un salut fraternel à toutes les sœurs et tous les frères indigènes du pays et de toute l'Amérique. De même nous adressons un salut fraternel à tout le peuple argentin qui, en grande partie, souffre lui aussi des conséquences d'un modèle économique non-durable. Ce modèle économique, connu depuis les années 1990 comme le capitalisme néolibéral, est un modèle occidental aujourd'hui mondialisé. Il a débouché sur un approfondissement sans précédent de l'inégalité et de l'appauvrissement, la violation des droits de l'Homme, la paralysie du système judiciaire, l'exploitation et le pillage de ce qu'on appelle ressources naturelles (biodiversité pour les peuples indigènes) et par conséquent la destruction de l'environnement, la santé humaine et le patrimoine culturel. Tout cela est un attentat contre l'équilibre et la vie harmonieuse de la Mère-Terre et tous les être vivants qui habitent cette planète. Nous sommes venus de nos territoires ancestraux manifester que nous sommes toujours vivants comme peuples et cultures indigènes, laisser aux prochaines générations une vie fondée sur nos principes et nos valeurs. Nous sommes venus avec notre mémoire ancestrale, c'est elle qui nous donne la possibilité de sauvegarder nos connaissances traditionnelles. C'est avec notre mémoire que nous nous connectons au passé, au présent et au futur, nous savons d'où nous venons, qui nous sommes et aussi vers où nous allons. Nous sauvegardons notre propre histoire, une éducation autonome, une médecine traditionnelle, un droit coutumier, une langue, un mandat ancestral transmis de génération en génération. La mémoire est le fondement de l'identité d'un peuple qui s'est préservé depuis des milliers d'années. (Traduction © Denise Anne Clavilier)
Manifestamos que: 1) Estamos dispuestos a seguir luchando y afirmando nuestros valores y derechos ancestrales, defendiendo cualquier violación de nuestros pueblos y derechos, y protegiendo a nuestras tierras y territorios. 2) Durante décadas hemos tratado de establecer un diálogo con el Gobierno Argentino, para que se respeten nuestros derechos, reconocidos en el Derecho Internacional Público y consagrado en la Constitución Nacional, Constituciones Provinciales y diversas leyes nacionales y provinciales; sin embargo, esta solicitud de diálogo no ha sido nunca correspondida, mientras que se llevan a cabo grandes violaciones de dichos derechos. 3) En los últimos 10 años, decenas de hermanas y hermanos han sido asesinados por las balas de la policía, los mercenarios y los terratenientes que asaltan nuestros territorios. Mas de mil hermanas y hermanos están siendo judicializados por defender sus territorios y la Naturaleza. Hay represión, intimidación y un plan sistemático de judicializar nuestra resistencia y la protesta de nuestros luchadores que defienden la vida, nuestros territorios y la Madre Tierra. Cumbre nacional de los Pueblos Indígenos, 27-29 mayo 2015
Nous faisons valoir que : 1) Nous sommes disposés à continuer la lutte et à affirmer nos valeurs et droits ancestraux, à défendre toutes les violations de nos peuples et de nos droits, et à protéger nos terres et nos territoires. 2) Pendant des décennies, nous avons tenté d'établir un dialogue avec le Gouvernement Argentin pour que soient respectés nos droits, reconnus par le Droit International Public et consacrés par la Constitution nationale, les Constitutions provinciales et diverses lois nationales et provinciales et pourtant cette demande de dialogue n'a jamais été reçue et pendant ce temps de graves violations de ces droits sont commises. 3) Ces dix dernières années (1), des dizaines de sœurs et de frères ont été assassinés par les balles de la police, les mercenaires (2) et les propriétaires terriens qui assaillent nos territoires. Plus de mille sœurs et frères ont été traînés en justice parce qu'ils défendaient leurs territoires et la Nature. Il existe une répression, des intimidations et un plan systématique pour criminaliser notre résistance et les manifestations de nos militants qui défendent la vie, nos territoires et la Mère Terre. (Traduction © Denise Anne Clavilier)
Suit dans l'article 4 la liste très longue des traités, lois et autres engagements nationaux ou internationaux que les institutions argentines ne respectent pas ou n'appliquent pas dès qu'il s'agit des peuples originaires.
5) Consideramos que la forma de solucionar los problemas es a través del diálogo para todo proceso de construcción política, proyecto de ley o actividad nacional y el respeto por los principios democráticos básicos reconocidos a nivel internacional o sea: a) La consulta con los pueblos indígenas para cualquier proyecto del llamado desarrollo respetando nuestras estructuras, autoridades y tiempos; b) La participación plena y efectiva, respetando el proceso de llegar al consenso; c) El libre consentimiento informado previo, con el derecho de decir “no” en caso de no estar de acuerdo. Cumbre nacional de los Pueblos Indígenos, 27-29 mayo 2015
5) Nous considérons que la résolution des problèmes passe par le dialogue pour tout processus de construction politique, projet de loi ou activité nationale et le respect des principes démocratiques élémentaires reconnus au niveau international, c'est à dire : a) la consultation avec les peuples indigènes pour n'importe quel projet du soi-disant développement qui respecte nos structures, nos responsables et nos échéances ; b) la participation pleine et effective, en respectant le processus qui mène au consensus ; c) le libre consentement recueilli préalablement et le droit de dire non dans les cas où nous ne sommes pas d'accord. (Traduction © Denise Anne Clavilier)
6) Durante estos tres días, escuchamos dramáticos testimonios de hermanas y hermanos sobre la situación de injusticia que se vive en los territorios. Deliberamos para unificar criterios, buscar soluciones y proponer acciones sobre los temas que deben ser considerados con urgencia, como ser: la violación de los derechos humanos, el despojo de nuestros territorios, la exploración y explotación convencional del petróleo y el Fracking, la minería, los desmontes, la contaminación, el avance sojero, las represas hidroeléctricas, la falta de atención sanitaria y otros temas críticos. Cumbre nacional de los Pueblos Indígenos, 27-29 mayo 2015
6) Durant ces trois jours, nous avons entendu des témoignages dramatiques de sœurs et de frères sur la situation d'injustice que l'on vit sur les territoires. Nous avons délibéré pour unifier nos critères, chercher des solutions et proposer des actions sur les thèmes qui doivent être pris en considération de façon urgente, tels que : la violation des droits de l'Homme, l'expulsion de nos territoires, l'exploration et l'exploitation conventionnelles de pétrole et la fracture (hydraulique), les mines, les excavations, la pollution, l'avancée de la culture du soja, les barrages hydroélectriques, le manque de soins sanitaires et autres thèmes critiques. (Traduction © Denise Anne Clavilier)

La manifestation arrive sur Plaza de Mayo
et tourne à droite pour longer le Cabildo (bâtiment blanc)
et passer devant le ministère de l'Economie (AFIP)


Pour aller plus loin : lire l'article de Página/12 du 27 mai 2015 lire l'article de Página/12 d'hier soir (non repris dans l'édition de ce matin) lire l'article de El Comercial (journal de la province de Formosa) lire la déclaration complète dans Resumen Latinoamericano, le blog Librerita, le site Internet de l'organisation Gajat. Consulter la page Facebook de la communauté Qom de Formosa.
(1) Dénonciation en règle du gouvernement kirchneriste qui depuis deux ans célèbre en permanence la década ganada (la décennie victorieuse), qui couvre tout le mandat de Néstor Kirchner et les cinq premières années de Cristina. (2) Il s'agit des vigiles et autres bandes armées qui protègent différents intérêts économiques souvent d'initiative privée (agriculture) ou en régime de concession régie par l'Etat (énergie ou infrastructures), comme c'est le cas d'un bon nombre de barrages hydrauliques, de forages, de plantations, de pâturages (industrie lainière), d'antenne-relais, de résidences campagnardes, voire de quartiers privés, etc. La production d'électricité, de gaz et de pétrole est un enjeu très important pour le développement économique en Argentine. L'énergie est en sous production au regard des besoins énormes des villes et des campagnes, dans un pays consommateur de chauffage (dans le sud) et de climatisation (dans le nord) et où demeurent de nombreuses zones sans accès aux médias nationaux (radio, télévision, Internet) pour ne mentionner ici que les besoins des particuliers.