A relire ce résumé, je me rends compte que je n’aurais probablement pas ouvert le livre si j’avais commencé par là et que j’aurais eu bien tort. Parce que même si il regroupe pas mal de choses qui ne sont pas ma tasse de thé, ce livre est une petite pépite. De premier abord, cette histoire de pierre magique, ça peut paraître un peu plat et facile. Mais derrière, c’est toute une mythologie qui est tissée. Avec la pierre, ce sont des créatures étranges et difficiles à apprivoiser qui choisissent certains élus, en font des parias ou des héros au sein de leur propre famille. Les étranges pouvoirs qui les accompagnent sont subtils et distillés petit à petit, et, chose habile, n’assaillent pas principalement le héros: j’ai surtout été touchée par les perceptions de la petite Lulu, qui semble lire dans les pensées et voir l’avenir, ou par la franchise taciturne de Morgan qui ne se sépare jamais de ses armes.
Les relations entre les personnages, travaillées de manière à éviter les clichés et à se construire toute en nuances, m’ont beaucoup plu. Le groupe de jeune se démarque de ceux que l’on peut trouver dans les autres romans jeunesse par sa variété. On n’y retrouve pas que des “presqu’adultes” bien pratiques, puisque Lulu a onze ans et Morgan environ douze. On y retrouve aussi des alliances surprenantes et attendrissantes, comme l’affection plus que fraternelle de Lulu et de son cousin Zac, ou l’attachement improbable de Morgan et du beau et séducteur Camille, chacune étant l’objet d’une histoire aussi touchante qu’amère. Mention spéciale pour la ribambelle de soeurs de Camille et particulièrement pour l’autorité remarquable d’Acadia, la soeur ainée qui fait marcher tout le monde au pas lorsqu’elle crie, au point que personne ne songe à lui signaler que sa cuisine est immangeable.
Le gros point fort du roman est aussi la construction de son méchant. Aussi fascinant qu’il est terrifiant, précédé par sa réputation, son aura et son apparence blanche et immatérielle, Ayame est une créature androgyne et sans âge particulièrement réussie… Surtout lorsqu’il apparaît finalement que ce n’est pas lui le pire méchant de l’histoire. J’aime les méchants travaillés, qui ont de la classe sans se départir de leur rôle de salopard, et là, j’ai été servie. Mon seul regret reste que leur projet reste assez flou et difficile à suivre, car il lance surtout des pistes qui seront exploitées dans les prochains tomes et ça, je n’aime pas trop, j’ai l’impression que le livre est un peu sacrifié au profit de la série. Le tout est cependant servi par une plume efficace et sensible, qui sait doser en plus de l’émotion recherchée beaucoup d’humour et de second degré et beaucoup d’action.
J’espère cependant que par la suite, la série fera preuve d’un peu plus d’originalité narrative. Car si elle a toute l’inventivité, l’humour, l’action et la noirceur d’une petite soeur d’harry Potter, elle peut souffrir de trop de comparaison avec des choses déjà faites. J’ai donc hâte de lire la suite.
La note de Mélu:
Une formidable découverte, et je remercie grandement l’auteure de me l’avoir proposé.
Un mot sur l’auteure: Dee L. Aniballe (née en 1986) est une jeune auteure française.