Vous avez dit :"Social-libéral".??

Publié le 09 juin 2015 par Particommuniste34200

Manuel Valls, le 9 juin, à Paris. (Photo FRANCOIS GUILLOT. AFP)

DÉCRYPTAGE

Plafonnement des indemnités prud'homales, aides à l'embauche, CDD... Le gouvernement veut faciliter l'emploi dans les petites entreprises. Avec le risque de recréer des effets de seuils.

Quelques jours à peine après l'annonce des nouveaux chiffres catastrophiques du chômage, Manuel Valls, entouré de ses ministres, dégaine son "small business act à la française". Sa mission : "Mobiliser toutes les énergies pour libérer toutes les créations d'emploi dans les PME", la nouvelle priorité du gouvernement. Tour d'horizon des principales mesures annoncées ce mardi, à la sortie d'un conseil des ministres restreint.

Renouvellement des CDD : deux fois au lieu d'une

Les contrats à durée déterminée (CDD) et les contrats d'intérim pourront être renouvelés deux fois, au lieu d'une actuellement. Mais cet assouplissement se fera "sans bien sûr toucher à la durée maximale de dix-huit mois" prévue par la loi, a précisé Valls. En temps de crise, c'est "une chance supplémentaire donnée aux petites entreprises et aux salariés", précise le ministre du Travail, François Rebsamen.

Plafonnement des indemnités prud'homales

Les indemnités prud'homales accordées aux salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse seront plafonnées. Ce plafonnement variera selon la taille de l'entreprise et l'ancienneté du salarié licencié. Dans les entreprises de moins de 20 salariés, le montant des indemnités sera de 1/12 e de mois de salaire par mois de présence pour une ancienneté de moins de deux ans, entre 2 et 6 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 2 et 14 ans, le plafond étant porté à 12 mois pour les salariés ayant 15 ans d'ancienneté et plus. Pour les entreprises de plus de 20 salariés, le barème sera de 1/6 e de mois de salaire par mois de présence pour une ancienneté inférieure à 2 ans, de 4 à 10 mois pour une ancienneté comprise entre 2 et 14 ans, et de 4 à 20 mois à partir de 15 ans d'ancienneté. Le barème des entreprises de 250 ou 300 salariés sera déterminé plus tard, avec les parlementaires. Ce plafonnement ne concernera pas les "atteintes graves au droit du travail", comme les discriminations ou le harcèlement, a précisé le Premier ministre. Le but ? "Donner de la visibilité, de la stabilité et de la certitude à l'ensemble des acteurs", en réduisant la durée de la procédure et en précisant les indemnités versées, précise Emmanuel Macron, le ministre de l'Economie.

Prime à l'embauche de 4 000 euros

François Rebsamen, le ministre du Travail, espère que cette prime qui sera versée en deux fois, 2 000 euros la première année et 2 000 euros la deuxième, permettra de créer plus de 60 000 emplois. Le dispositif "première embauche" s'applique immédiatement à toute entreprise sans aucun salarié qui effectue sa première embauche en CDI ou CDD de plus de douze mois signée entre aujourd'hui et le 8 juin 2016. "Dès demain c'est possible", résume Rebsamen. Pour en bénéficier, les entreprises doivent ne jamais avoir eu de salarié ou ne pas en avoir eu depuis au moins douze mois. Le dispositif cible donc en particulier "les 1,2 millions de TPE qui n'emploient aucun salarié, alors même qu'elles pourraient avoir de l'activité pour un ou plusieurs salariés", selon le Premier ministre qui souhaite les "encourager à sauter le pas". Cette prime s'ajoute aux allégements de cotisations sociales, au CICE et au Pacte de responsabilité, le tout couvrant ainsi plus du tiers d'un salaire payé au Smic, selon Manuel Valls. Pour autant, le Premier ministre se défend d'un "cadeau supplémentaire fait aux entreprises".

Encouragement à franchir les seuils

L'effet des franchissements des seuils fiscaux jusqu'à 50 salariés, qui déclenchent des prélèvements fiscaux et sociaux supplémentaires pour les entreprises, vont être gelés pendant trois ans. Concrètement, jusqu'à fin 2018, une entreprise qui franchit le seuil de 11, 20 ou 50 salariés ne se verra pas appliquer les changements de cotisations sociales et de fiscalité. "Désormais, les petites entreprises qui passent un seuil ne verront pas leur situation changer pendant trois ans", résume Manuel Valls. Les prélèvements sociaux et fiscaux liés à leur nouvelle situation n'interviendront donc qu'après ce gel de trois ans.

Lutte contre la fraude aux travailleurs détachés

Face à "l'ampleur du phénomène" du détachement de salariés, notamment dans les secteurs du BTP, des transports ou de l'agriculture, Manuel Valls promet une réponse ferme. Pour enrayer "cette situation inacceptable, tant pour les salariés concernés qui tombent dans une forme d'exploitation souvent honteuse que pour les TPE et PME qui respectent les règles et sont fragilisées par cette concurrence déloyale", l'exécutif propose de faciliter les poursuites financières contre un sous-traitant ayant commis une fraude aux travailleurs détachés. Un donneur d'ordre pourra donc être tenu solidairement responsable des fraudes à la législation sociale commises par son sous-traitant, par exemple l'absence de versement de cotisations sociales ou le non-respect du salaire minimum.

Assouplissement des accords de maintien dans l'emploi

Les accords de maintien de l'emploi (AME), prévus par la loi de juin 2013, sont modifiés. Leur durée passe de deux à cinq ans et les licenciements en cas de refus du salarié ne seront plus des licenciements économiques (avec mesures de reclassement à la clé), mais des licenciements su generis, ouvrant droit aux seules indemnités légales et conventionnelles.

Reste à savoir combien d'emplois ces "mesures fortes", annoncées par le Premier ministre, permettront de créer. Sur ce point, le ministre de l'Economie reste "prudent". Cela "suppose de savoir comment les comportements se modifient". Mais Macron pointe toutefois deux mesures structurelles qui auront "un effet important" : le plafonnement des indemnités aux prud'hommes qui "permettra des dizaines de milliers d'emplois" et la réforme des accords de maintien dans l'emploi "qui permettra aux entreprises de s'adapter dans des périodes difficiles et de ne pas détruire de l'emploi". Le coût total du programme ne devrait pas dépasser 200 millions d'euros sur toute la période, selon Macron. Le coût du lissage des seuils sera "inférieur à 100 millions d'euros", alors que la prime à l'embauche est chiffrée à "quelques dizaines de millions d'euros".