Ready made

Publié le 14 juin 2015 par Aelezig

Le ready-made est un objet récupéré par un artiste qui en détourne le sens (en l'occurrence la fonction utilitaire) en le présentant dans un lieu culturel afin de lui conférer le statut d'œuvre d'art. Ce procédé ne peut donc être mis en œuvre qu'avec l'appui d'une institution culturelle (galerie, musée...) et d'une partie conséquente du milieu artistique (intellectuels, critiques d'arts...), lesquels ont pour rôle de légitimer le choix de l'artiste. Initiée à Paris puis New York par Marcel Duchamp dans les années 1910, cette démarche a donné naissance à une grande partie des pratiques artistiques actuelles, qu'elles s'en réclament (comme l'art conceptuel) ou au contraire s'en défendent.

Marcel Duchamp

N'ayant pas été réalisé par l'artiste, le ready-made a totalement remis en question un certain nombre de concepts, voire de certitudes, concernant jusqu'alors la notion d'art, notamment les notions de savoir-faire, de virtuosité et d'œuvre.

André Breton définit le ready-made comme un « objet usuel promu à la dignité d'objet d'art par le simple choix de l'artiste ».
Duchamp lui-même précise : "Le choix du ready made n'était jamais dicté par une délectation esthétique (mais) basé sur une réaction d'indifférence visuelle, en même temps qu'une absence totale de bon ou de mauvais goût".

Quelques exemples (Marcel Duchamp) :

  • 1913 : Roue de bicyclette : ensemble composé d'une roue de bicyclette rivée sur un tabouret en bois, lequel joue le rôle du socle. L'ensemble est exposé au MoMa de New York. Voici ce qu'en dit Duchamp : « La Roue de Bicyclette est mon premier readymade, à tel point que ça ne s'appelait même pas un readymade. Voir cette roue tourner était apaisant et réconfortant, c'était une ouverture sur autre chose que la vie quotidienne. J'aimais l'idée d'avoir une roue de bicyclette dans mon atelier. J'aimais la regarder comme j'aime regarder le mouvement d'un feu de cheminée. »
  • 1914 : Porte-bouteilles : l'objet est en fer galvanisé. Disparu par la suite, Duchamp en réalise des répliques dans les années 1960, qui sont aujourd'hui exposées dans des musées.
  • 1915 : In Advance of the Broken Arm ("En avance du bras cassé") : pelle à neige, achetée dans une quincaillerie de New York.
  • 1916 : Peigne. Sur un peigne en acier, Duchamp a inscrit le lieu, la date et l'heure auxquels il choisi ce ready-made : New York, 17 février 1916, 11h00

Jeff Koons

Dans le ready-made, le concept prime sur l’œuvre originale et physique, certains ready-made étant même totalement virtuels, que ce soit par accident ou par stratégie : Fontaine (1917) a été médiatisé par l'artiste sous forme de trace photographique, sans que l'objet ne soit retrouvé, et d'autres ready-made ont été perdus par leurs propriétaires. Les œuvres exposées dans les musées étant dès lors des répliques certifiées par l'artiste.

Marcel Duchamp ira même jusqu'à démultiplier ses œuvres sous formes de reproductions miniatures combinées, La boîte-en-valise dès 1936, soit un quart de siècle avant qu'Andy Warhol ne devienne la star de la duplication avec ses sérigraphies.

Les ready-made, actes posés par leur initiateur comme une étape transitoire de rupture au sein de l'art, sont donc encore l'objet de multiples échos.