[Critique] UNFRIENDED

Par Onrembobine @OnRembobinefr

Titre original : Unfriended

Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Levan Gabriadze
Distribution : Shelley Hennig, Moses Jacob Storm, Renee Olstead, Will Peltz, Jacob Wysocki, Courtney Halverson, Heather Sossaman…
Genre : Épouvante/Horreur
Date de sortie : 24 juin 2015

Le Pitch :
Alors que plusieurs amis discutent sur Skype, un intrus se connecte sans que personne ne soit en mesure de l’éjecter de la session. Rapidement, alors que les phénomènes étranges se multiplient sur les ordinateurs respectifs des intervenants, ces derniers découvrent que leur mystérieux interlocuteur n’est autre que Laura, une fille poussée au suicide un an plus tôt, après la publication sur internet d’une vidéo extrêmement compromettante…

La Critique :
Quoi qu’on en pense, le Projet Blair Witch, au moment de sa sortie, a amené quelque chose de neuf. Et tant pis si les débuts du found footage datent en réalité de bien plus tôt (voir Cannibal Holocaust), car le film centré sur les méfaits d’une sorcière décidée à transformer la randonnée dans les bois d’apprentis cinéastes, en cauchemar, marqua le début d’une vraie tendance. Depuis, les films du genre sont légion et il fallait bien se douter que tôt ou tard, un petit malin allait tenter d’imposer quelque chose de nouveau. En l’occurrence, ce petit malin s’appelle Jason Blum. Un type à la tête de Blumhouse, une boîte spécialisée dans la production de séries B à petit budget destinées à cartonner au box-office. Unfriended a ainsi coûté 1 million de dollars, autant dire pas grand chose pour un film américain porté par un grand studio. Pourtant, devant le truc, difficile de voir où est passé le budget, étant donné que toute l’action se déroule via l’écran de l’ordinateur d’une adolescente.
Gentiment, Unfriended tente de nous faire croire qu’il a inventé l’eau tiède. Là encore, rien de nouveau, puisqu’il y a quelques mois, Nacho Vigalondo, avec Open Windows, avait déjà tenté de raconter son histoire à travers l’écran d’un ordinateur. Bref…

Évoluer en prenant en ligne de compte les nouvelles technologies et autres moyens de communication alternatifs est en soi une bonne idée. Le truc est de ne pas non plus tout miser là-dessus. En prenant pied sur l’écran du Mac d’une fille de son temps, le long-métrage ne nous épargne rien. YouTube, Skype, Facebook, Apple, Gmail ou encore Spotify sont à la fête et avec eux tous les bruits rapidement insupportables qui rythment les échanges vidéos ou écrits qui constituent l’essence du récit. Rapidement donc, Unfriended « brille » par son côté extrêmement artificiel. Loin de se connecter à la tendance et de saisir au vol quelque chose d’universel, inhérent à notre époque, le film se vautre et ne fait que se reposer de façon très opportuniste sur les divers objets d’un culte numérique poussé à l’extrême. Entièrement traduit dans sa version française (tous les textes à l’écran sont en français), Unfriended propose ni plus ni moins au spectateur d’infiltrer une discussion sans intérêt entre plusieurs adolescents têtes à claques, avec fautes d’orthographe à l’appuie et tics de langage à se taper la tête contre les murs. Sur l’écran de cinéma, les fenêtres s’ouvrent, on lance des recherches Google, on regarde des vidéos YouTube, les vidéos Skype pédalent un max dans la choucroute car les fantômes provoquent des interférences, et on a même droit à la déconnexion intempestive. Rien ne nous est épargné. Très vite, fatalement, on se fout royalement de ce qui peut bien arriver aux personnages. Le fantôme qui les harcèle sur internet peut bien faire ce qu’il veut, tout ce qui compte, c’est que la conclusion arrive vite.
Car oui, au-delà de cette « fine » observation d’une jeunesse caricaturée, c’est bien d’un fantôme dont il s’agit. Un fantôme qui officie sur le web. Qui publie sur Facebook, mais pas sur Twitter, qui envoie des mails et qui éteint la lumière sans prévenir. La peur au cinéma a rarement été aussi artificielle. Surtout si on prend en compte la frénésie avec laquelle les webcams bougent quand l’esprit frappeur passe enfin à l’action.

Si Unfriended peut intriguer dans sa mise en place, il s’apparente très vite à un gros pétard (numérique) mouillé. À un exercice de style bâclé. Très chiant, trop long, particulièrement irritant et vain, le film de Levan Gabriadze s’avère en plus plutôt sordide. Parce que faut pas déconner non plus. Il nous montre quand même une nana après que celle-ci se soit allègrement chiée dessus… On atteint des sommets.
Si certains films d’horreur nous incitent à regarder sous le lit ou dans le placard avant d’aller se coucher, Unfriended encourage à prendre ses distances avec son ordinateur. Juste le temps de digérer cette succession de clichés numériquement mal digérés et surtout pas parce qu’il parvient à rendre Skype, YouTube et Facebook effrayants d’une quelconque façon. Et si le but était de mettre en garde contre les dérives du cyber-harcèlement (vrai problème), on peut dire que c’est raté. Encore une fois, parfois, on remarque quelques petites bonnes idées, vite noyées par un réalisateur qui au fond n’en est pas vraiment un. Libre à vous d’appeler ça du cinéma, mais personne ne vous en voudra si vous appelez plutôt ça de la merde… Simple question d’appréciation. Et dire qu’ils monopolisent des salles de cinéma pour ça.

@ Gilles Rolland

Crédits photos : Universal Pictures