Un rapport de la cour des comptes sur le Pôle Emploi

Publié le 03 juillet 2015 par Rozennlefeuvre @aladom

Informations sur le Pôle Emploi

Pôle emploi a été défini lors de sa création, fin 2008, comme un opérateur majeur du service public de l'emploi : il s'est vu confier à la fois le rôle de guichet des allocations de chômage, précédemment exercé par les Assédic, et la mission d'intermédiaire entre l'offre et la demande d'emploi, héritée de l'ANPE.

Issu de la fusion en 2008 de l'ANPE et des Assédic, Pôle emploi est le plus gros opérateur de l'État, avec 53 000 agents, plus d'un millier d'agences et de points relais, 32 Md€ d'allocations et d'aides versées et 5 Md€ de budget.

Entre janvier 2009 et janvier 2015, le nombre de personnes inscrites sur ses listes est passé de 3,9 millions à 6,2 millions, soit + 58 %. Pôle emploi se voit confier des missions exigeantes et connaît des résultats contrastés, avec des coûts croissants. Confronté au chômage de masse, il a redéfini profondément sa stratégie en 2012, mais continue de connaître des difficultés opérationnelles, en dépit de l'engagement de ses personnels.

Le budget de Pôle emploi a fortement augmenté depuis 2009. Les coûts de personnels sont ceux qui ont enregistré la hausse la plus importante sur la période 2009-2014 (+ 724 M€, soit + 33 %), alors que les charges d'exploitation progressaient de 499 M€ (+ 11 %), pour atteindre 5 159 M€ en 2014.

Des difficultés persistantes

La cours des comptes a relevé plusieurs problèmes dans son rapport PÔLE EMPLOI À L'ÉPREUVE DU CHÔMAGE DE MASSE :

  • L'accompagnement "renforcé" est celui qui présente la plus faible proportion de demandeurs d'emploi de longue durée (au chômage depuis plus d'un an). De surcroît, la fréquence des contacts entre conseillers et demandeurs d'emploi diminue avec la durée du chômage.
  • L'intensité de l'accompagnement individuel des demandeurs d'emploi est en outre trop faible : 75 % des demandeurs d'emploi placés en accompagnement " renforcé " n'ont bénéficié que de quatre contacts ou moins en six mois avec leur conseiller, cette notion de contact englobant au demeurant non seulement les entretiens, mais aussi les échanges téléphoniques et les méls. 59 % des demandeurs d'emploi en " suivi ", 49 % en " guidé " et 33 % en " renforcé " ont au maximum un contact tous les trois mois.
  • La part trop importante du temps de travail des conseillers consacrée à des activités de gestion et de management (22 %) aboutit à ce que la part consacrée à l'accompagnement des demandeurs d'emploi, qui est pourtant une priorité, est en définitive inférieure à 30 %.
  • Le millier d'agences forme un réseau dont la densité est peu propice à une mutualisation des effectifs.
  • L'absentéisme est élevé (près de 25 jours calendaires par an et par agent).

Recommandation de la cours des comptes

La Cour partage l'objectif stratégique de mieux différencier les services aux demandeurs d'emploi et aux entreprises en fonction de leurs besoins, mais elle constate que les modalités de mise en oeuvre pratique de cette orientation risquent d'abaisser les exigences sur deux points :

  • le rôle d'intermédiaire de Pôle emploi sur le marché du travail, élément fondamental de la définition du service public de l'emploi et de son efficacité ;
  • le niveau d'efficience du service rendu par une réponse inappropriée à la montée du chômage, et notamment du chômage de longue durée.

La Cour formule trois orientations pour l'État, les partenaires sociaux, Pôle emploi et l'Unedic, ainsi que 13 recommandations visant à améliorer les services rendus aux employeurs et aux demandeurs d'emploi, à optimiser la gestion et à assurer un pilotage plus efficace de Pôle emploi.

Orientations pour l'État, les partenaires sociaux, Pôle emploi et l'Unédic :

  • 1. maintenir le rôle d'intermédiaire de Pôle emploi sur le marché du travail, conformément aux missions actuellement fixées par la loi ;
  • 2. renforcer la connaissance par Pôle emploi du marché du travail, et particulièrement des entreprises, afin que les conseils et services proposés aux demandeurs d'emploi reposent notamment sur la connaissance approfondie des besoins de celles-ci ;
  • 3. poursuivre et amplifier la simplification de la réglementation en matière d'indemnisation du chômage.

Recommandations pour Pôle emploi :

  • 1. faire une place plus grande à la connaissance du marché du travail et des entreprises dans le recrutement et la formation de tous les conseillers ;
  • 2. mieux faire correspondre le contenu de l'accompagnement proposé par les conseillers aux caractéristiques des demandeurs d'emploi et des entreprises ; 3. introduire une norme minimale de fréquence d'entretien et de contact par modalité d'accompagnement ;
  • 4. renforcer le suivi de la différenciation des services (internes et externes) ;
  • 5. réaliser obligatoirement le premier rendez-vous d'accompagnement le plus tôt possible après le diagnostic.
  • 6. augmenter par redéploiement le nombre des agents délivrant les services aux demandeurs d'emploi et aux entreprises, ainsi que le temps effectif consacré par chaque conseiller au placement des demandeurs d'emploi et aux entreprises ;
  • 7. réduire le nombre d'agences dans le cadre d'un plan pluriannuel ;
  • 8. développer la complémentarité des canaux d'accès à Pôle emploi (accueil physique, téléphone, internet, courrier postal et courrier électronique) ;
  • 9. dématérialiser la gestion des allocations et aides versées aux demandeurs d'emploi et aux entreprises.

Recommandation pour l'État et pour Pôle emploi :

    10. stabiliser les moyens permanents de Pôle emploi en recourant à la sous-traitance et aux recrutements en CDD lors des variations de la conjoncture, au besoin en remettant en cause les dispositions limitatives de la convention collective nationale.

Recommandations pour Pôle emploi Assurer un pilotage plus efficace :

  • 11. asseoir le pilotage interne sur des indicateurs en faible nombre, hiérarchisés et déclinés au niveau des agences, portant à la fois sur les résultats et sur l'activité ;
  • 12. fixer aux conseillers ou aux équipes de conseillers des objectifs individualisés qualitatifs mais aussi quantitatifs, le cas échéant en renégociant un accord collectif de 2004 relatif au suivi de l'activité, comme la convention collective prévoyait de le faire avant 2010.

Recommandation pour l'État pour renforcer l'évaluation :

    13. faire réaliser, sous l'égide d'une instance externe à Pôle emploi, des études de cohortes permettant d'apprécier la qualité et la performance des différentes modalités (internes et externes) de suivi des demandeurs d'emploi, ainsi que celles des processus de diagnostic et d'orientation des demandeurs d'emploi vers ces modalités de suivi.

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