[Critique] INSIDIOUS : CHAPITRE 3

Par Onrembobine @OnRembobinefr

Titre original : Insidious : Chapter 3

Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Leigh Whannell
Distribution : Stefanie Scott, Dermot Mulroney, Lin Shaye, Angus Sampson, Leigh Whannell, Steve Coulter, Hayley Kiyoko, Ashton Moio…
Genre : Épouvante/Horreur/Suite/Saga
Date de sortie : 8 juillet 2015

Le Pitch :
La jeune Quinn est la proie d’un esprit malfaisant qui essaye de s’emparer de son âme. Désemparé, son père fait appel à Elise, une célèbre médium. Réticente à l’idée de renouer avec une activité qu’elle s’était jurée de ne plus pratiquer, cette dernière accepte néanmoins devant l’ampleur de la menace…

La Critique :
La porte de la demeure des Lambert, la famille des deux premiers volets d’Insidious, est définitivement fermée. Ou plutôt pas encore ouverte, puisque ce troisième épisode se déroule quelques années avant les mésaventures relatées par James Wan en 2011 et 2013. Préquel et possible nouveau départ pour une saga de bonne facture, Insidious : Chapitre 3 n’est ainsi plus réalisé par Wan, parti sur Fast & Furious 7, mais par Leigh Whannell, le scénariste des volets précédents et de deux Saw, également producteur prolifique et acteur intérimaire (c’est lui qui interprète le timide chasseur de fantômes dans la saga Insidious). Conscient à juste titre que s’acharner sur les mêmes personnages n’était peut-être pas une bonne idée, Whannell a préféré changer de localisation, sans pour autant couper complètement les ponts, comme en témoigne la présence de Lin Shaye, qui joue encore ici la médium badass, et du duo de chasseurs de fantômes.
Une bonne idée donc que de revenir en arrière, mais encore fallait-il que cette idée soit correctement exploitée. Après tout, ce ne serait pas la première fois qu’un producteur (en l’occurrence Jason Blum, le patron souvent opportuniste de Blumhouse) cherche à tirer sur la corde et tant pis si la corde en question est sur le point de rompre.
Surprise : Insidious 3 est bon. Carrément très bon même, par moments. Au point de s’élever au-dessus du deuxième volet un peu en deçà et de proposer de solides frissons.

Bien sûr, rien ici de transpire réellement l’originalité. Nous ne sommes pas dans un cinéma d’épouvante très audacieux à la It Follows, mais plutôt dans une forme de resucée maligne de codes séculaires en l’occurrence plutôt bien exploités. Le fond du scénario n’apporte rien au genre et voit ainsi une adolescente se frotter à un esprit coriace. Tout réside finalement dans la façon dont le réalisateur arrive à surprendre, et surtout à instaurer une ambiance qui tient la route jusqu’au bout sans faillir. Contrairement au récent remake de Poltergeist ou à la tonne de productions feignantes qui sortent tous les ans dans l’espoir de faire un carton sans trop forcer, celui-ci redouble d’efforts. Dans la lignée des deux précédents longs-métrages il ne perd ainsi pas de temps à mettre en doute la parole de la fille qui affirme avoir affaire à un fantôme. L’existence de l’esprit est vite avérée et l’essentiel du scénario se concentre sur la lutte de l’héroïne et de ses proches contre un mystérieux ennemi. Porté par les performances habitées d’acteurs investis, à commencer par la jeune et très convaincante Stefanie Scott et par Dermot Mulroney, qui joue son père, et sans oublier le pivot de la saga, Lin Shaye, le film ne va peut-être pas chercher midi à quatorze heures, mais s’applique à bien faire les choses. Discrets, les effets touchent alors presque tous au vif, tandis que tel un étau, la menace se resserre, illustrée par des séquences en forme de points d’orgue efficaces. La musique, marque de fabrique de la saga, joue elle aussi son rôle à la perfection, soulignant les assauts des forces du mal avec une belle application.

À l’écran, Insidious : Chapitre 3 a de la gueule. Encore une fois ancré dans un univers aux bases précédemment établies, il démontre d’un goût certain et d’un talent parfait pour ce qui est de construire une peur croissante sans forcément se reposer uniquement sur les jump scares en carton.
Cela dit, la différence ne se fait pas que sur l’effroi, mais plutôt au niveau de l’émotion. La surprise venant en effet de la tristesse mêlée de mélancolie qui se dégage de l’ensemble. Fable macabre sur le deuil, Insidious 3 se démarque vraiment de ses deux prédécesseurs en utilisant des ressorts dramatiques puissants, qui, comme dans les meilleurs films du genre, viennent alimenter une dynamique qui y gagne en intensité.
En mettant côte à côte deux personnages (la jeune héroïne et la médium) en pleine reconstruction après la perte d’un être cher, le long-métrage progresse sur un terreau de chagrin d’où la peur émerge sans crier gare. Les racines de celle-ci sont profondes et forcément, à l’écran, sa force s’en trouve décuplée. Simple mais malin, le script d’Insidious 3 ne cède pas à la tentation d’en rajouter des louches, comme beaucoup de suites et autres préquels, mais se focalise sur ses protagonistes. Il les fait exister, prend le temps de bien brosser leur caractère, leurs angoisses et leurs relations, fait exploser le tout, et observe ensuite les conséquences, sans jamais tout balancer aux orties dans l’espoir de surprendre à tout prix. Drame horrifique prégnant et étrangement perturbant, le film en devient également plus attachant, alors qu’au début, ce n’était pas franchement gagné. En prenant la suite de James Wan, Leigh Whannell, loin de se poser en simple copieur appliqué, a apporté sa touche. Non seulement sa mise en scène est vraiment percutante, comme le prouvent les 4 ou 5 séquences plutôt terrifiantes, mais les sentiments qu’il injecte à l’ensemble lui permettent d’aller plus loin que le simple exercice de style, typique des « origins movies », destiné à engranger des dollars facilement.
En cas de succès, Insidious reviendra à coup sûr. Si Whannell reste en place et tant qu’il sera aussi inspiré, le bougre pourrait encore nous surprendre. Dans tous les cas, on peut dire qu’il n’a vraiment pas loupé son entrée.

@ Gilles Rolland

Crédits photos : Sony Pictures Releasing France