L’incroyable combat de Maria Altmann

Par Mickabenda @judaicine

Jusqu’au bout, Maria Altmann se sera battue pour que justice soit faite. Son combat a inspiré le film à venir La Femme au tableau (sortie 15 juillet 2015)

Originaire de Vienne en Autriche, Maria Altmann, plus jeune fille d’une fratrie de cinq enfants, est née en 1916, soit neuf ans après que Gustav Klimt a réalisé son chef d’œuvre représentant la tante de Maria, Adèle, sur fond d’or. Les sœurs Bauer avaient épousé des frères, Ferdinand et Gustav Bloch, et les Bloch-Bauer partageaient tous ensemble un magnifique appartement situé sur l’une des avenues les plus prestigieuses de Vienne, Elisabethstrasse. Personnalités emblématiques de la communauté juive florissante de la capitale, les Bloch-Bauer – particulièrement Adèle et son époux Ferdinand – étaient de riches mécènes dans le domaine des arts. Adèle tenait d’ailleurs salon, attirant par sa renommée des figures aussi célèbres que Gustav Mahler, Arthur Schnitzler et Gustav Klimt.

Figure éminente de l’école de l’Art Nouveau de Vienne, Klimt était connu pour l’érotisme de ses œuvres et Adèle Bloch-Bauer était l’un de ses sujets préférés. Dans son portrait doré, il représente la tante de Maria en reine égyptienne, parée d’or et de bijoux. Le collier que porte Adèle sur la toile allait d’ailleurs être offert plusieurs années après par son oncle à Maria en cadeau de mariage, Adèle étant morte des suites d’une méningite en 1925.

À l’âge de 21 ans, Maria épouse un jeune et talentueux chanteur d’opéra, Fritz Altmann. Six semaines plus tard, le 13 mars 1938, les troupes allemandes envahissent l’Autriche sur ordre d’Hitler, qui l’annexe au Troisième Reich. L’Anschluss, tel qu’on le désigne, a été accueilli avec joie par une partie des Autrichiens qui acclament les soldats défilant sur les grandes avenues de Vienne et leur lancent des fleurs. Les Autrichiens nazis emboîtent rapidement le pas de leurs dirigeants et, au cours d’événements terribles, l’âge d’or de la communauté juive viennoise prend fin brutalement. Les entreprises et les propriétés juives sont spontanément confisquées et les Bloch-Bauer perdent tout. Après l’arrestation de Fritz et son bref emprisonnement à Dachau, l’un des premiers camps de concentration, lui et Maria préparent leur fuite de Vienne. Ils réussissent d’abord à gagner l’Angleterre avant de rejoindre les États-Unis.

Après la mort du père de Maria, survenue à Vienne peu de temps après,‎ l’appartement d’Elisabethstrasse est pillé et ses objets d’une grande valeur confisqués. Le collier d’Adèle, qui avait été transmis à Maria, se retrouve entre les mains de l’épouse d’Hermann Goering, Emmy. En 1943, à l’instigation du gouvernement autrichien nazi, les œuvres volées de Klimt sont présentées lors d’une exposition. C’est à ce moment-là que le portrait d’Adèle – initialement intitulé Portrait d’Adèle Bloch-Bauer I – est pour la première fois baptisé Dame en or.

Après avoir gagné les États-Unis, Maria et Fritz s’installent en Californie, où ils élèvent leurs quatre enfants. Après la guerre, alors que son oncle allait léguer tous ses biens à Maria et aux autres membres de la fratrie ‎ayant survécu, le gouvernement autrichien réussit à convaincre les héritiers de se défaire à leur avantage des toiles de Klimt en échange d’œuvres de second ordre de la collection de Ferdinand.

En 1998, Maria s’adjoint les conseils d’un ami de la famille, Randy Schoenberg – petit-fils du compositeur Arnold Schoenberg, autre réfugié viennois – pour contester les prétentions du gouvernement autrichien qui se revendique propriétaire des tableaux de Klimt. La provenance des toiles fait l’objet d’avis divergents, notamment parce qu’Adèle Bloch-Bauer les avait léguées à son mari en précisant qu’elles soient léguées au musée national du Belvédère après le décès son époux. Elle décéda en 1925, plusieurs années avant l’invasion nazie, et Ferdinand transforma son legs par un testament désignant ses nièces comme légataires universelles. Quand l’Autriche refusa la requête de Maria, Schoenberg et elle n’eurent d’autre choix que de profiter des méandres du système judiciaire américain en recourant à une loi permettant à tout citoyen américain d’intenter un procès à un gouvernement étranger sans avoir à quitter le territoire des États-Unis.

Au cours des années qui ont suivi, ils ont remporté chaque étape de la procédure judiciaire, l’Autriche tentant un dernier recours pour conserver les tableaux en se pourvoyant en appel devant la Cour Suprême. Lorsque celle-ci rendit aussi son jugement en faveur de Maria Altmann, l’Autriche accepta enfin de régler l’affaire devant un tribunal d’arbitrage constitué de trois juges autrichiens. La situation semblait donc déjà réglée en faveur du pays. Mais le 17 janvier 2006, ils rendirent leur verdict : les cinq tableaux de Klimt devaient être restitués à Maria Altmann et sa famille. Plus tard cette année-là, les cinq œuvres furent exposées dans la ville d’adoption de Maria, Los Angeles, avant d’être mises aux enchères et vendues à des collectionneurs particuliers. Le Portrait d’Adèle Bloch-Bauer fut vendu pour 135 millions de dollars, un record à l’époque, à un magnat de l’industrie des cosmétiques, Ronald Lauder, et est exposé depuis à la Neue Galerie à New York. Six décennies après avoir été spoliés par les Nazis, Maria Altmann et sa famille ont finalement obtenu justice.

Elle est morte en 2011 à l’âge de 94 ans.

Jusqu’au bout, Maria Altmann se sera battue pour que justice soit faite. Son combat a inspiré le film à venir La Femme au tableau (sortie 15 juillet 2015)

Originaire de Vienne en Autriche, Maria Altmann, plus jeune fille d’une fratrie de cinq enfants, est née en 1916, soit neuf ans après que Gustav Klimt a réalisé son chef d’œuvre représentant la tante de Maria, Adèle, sur fond d’or. Les sœurs Bauer avaient épousé des frères, Ferdinand et Gustav Bloch, et les Bloch-Bauer partageaient tous ensemble un magnifique appartement situé sur l’une des avenues les plus prestigieuses de Vienne, Elisabethstrasse. Personnalités emblématiques de la communauté juive florissante de la capitale, les Bloch-Bauer – particulièrement Adèle et son époux Ferdinand – étaient de riches mécènes dans le domaine des arts. Adèle tenait d’ailleurs salon, attirant par sa renommée des figures aussi célèbres que Gustav Mahler, Arthur Schnitzler et Gustav Klimt.

Figure éminente de l’école de l’Art Nouveau de Vienne, Klimt était connu pour l’érotisme de ses œuvres et Adèle Bloch-Bauer était l’un de ses sujets préférés. Dans son portrait doré, il représente la tante de Maria en reine égyptienne, parée d’or et de bijoux. Le collier que porte Adèle sur la toile allait d’ailleurs être offert plusieurs années après par son oncle à Maria en cadeau de mariage, Adèle étant morte des suites d’une méningite en 1925.

À l’âge de 21 ans, Maria épouse un jeune et talentueux chanteur d’opéra, Fritz Altmann. Six semaines plus tard, le 13 mars 1938, les troupes allemandes envahissent l’Autriche sur ordre d’Hitler, qui l’annexe au Troisième Reich. L’Anschluss, tel qu’on le désigne, a été accueilli avec joie par une partie des Autrichiens qui acclament les soldats défilant sur les grandes avenues de Vienne et leur lancent des fleurs. Les Autrichiens nazis emboîtent rapidement le pas de leurs dirigeants et, au cours d’événements terribles, l’âge d’or de la communauté juive viennoise prend fin brutalement. Les entreprises et les propriétés juives sont spontanément confisquées et les Bloch-Bauer perdent tout. Après l’arrestation de Fritz et son bref emprisonnement à Dachau, l’un des premiers camps de concentration, lui et Maria préparent leur fuite de Vienne. Ils réussissent d’abord à gagner l’Angleterre avant de rejoindre les États-Unis.

Après la mort du père de Maria, survenue à Vienne peu de temps après,‎ l’appartement d’Elisabethstrasse est pillé et ses objets d’une grande valeur confisqués. Le collier d’Adèle, qui avait été transmis à Maria, se retrouve entre les mains de l’épouse d’Hermann Goering, Emmy. En 1943, à l’instigation du gouvernement autrichien nazi, les œuvres volées de Klimt sont présentées lors d’une exposition. C’est à ce moment-là que le portrait d’Adèle – initialement intitulé Portrait d’Adèle Bloch-Bauer I – est pour la première fois baptisé Dame en or.

Après avoir gagné les États-Unis, Maria et Fritz s’installent en Californie, où ils élèvent leurs quatre enfants. Après la guerre, alors que son oncle allait léguer tous ses biens à Maria et aux autres membres de la fratrie ‎ayant survécu, le gouvernement autrichien réussit à convaincre les héritiers de se défaire à leur avantage des toiles de Klimt en échange d’œuvres de second ordre de la collection de Ferdinand.

En 1998, Maria s’adjoint les conseils d’un ami de la famille, Randy Schoenberg – petit-fils du compositeur Arnold Schoenberg, autre réfugié viennois – pour contester les prétentions du gouvernement autrichien qui se revendique propriétaire des tableaux de Klimt. La provenance des toiles fait l’objet d’avis divergents, notamment parce qu’Adèle Bloch-Bauer les avait léguées à son mari en précisant qu’elles soient léguées au musée national du Belvédère après le décès son époux. Elle décéda en 1925, plusieurs années avant l’invasion nazie, et Ferdinand transforma son legs par un testament désignant ses nièces comme légataires universelles. Quand l’Autriche refusa la requête de Maria, Schoenberg et elle n’eurent d’autre choix que de profiter des méandres du système judiciaire américain en recourant à une loi permettant à tout citoyen américain d’intenter un procès à un gouvernement étranger sans avoir à quitter le territoire des États-Unis.

Au cours des années qui ont suivi, ils ont remporté chaque étape de la procédure judiciaire, l’Autriche tentant un dernier recours pour conserver les tableaux en se pourvoyant en appel devant la Cour Suprême. Lorsque celle-ci rendit aussi son jugement en faveur de Maria Altmann, l’Autriche accepta enfin de régler l’affaire devant un tribunal d’arbitrage constitué de trois juges autrichiens. La situation semblait donc déjà réglée en faveur du pays. Mais le 17 janvier 2006, ils rendirent leur verdict : les cinq tableaux de Klimt devaient être restitués à Maria Altmann et sa famille. Plus tard cette année-là, les cinq œuvres furent exposées dans la ville d’adoption de Maria, Los Angeles, avant d’être mises aux enchères et vendues à des collectionneurs particuliers. Le Portrait d’Adèle Bloch-Bauer fut vendu pour 135 millions de dollars, un record à l’époque, à un magnat de l’industrie des cosmétiques, Ronald Lauder, et est exposé depuis à la Neue Galerie à New York. Six décennies après avoir été spoliés par les Nazis, Maria Altmann et sa famille ont finalement obtenu justice.

Elle est morte en 2011 à l’âge de 94 ans.