La sélection de la semaine : L’étrange vie de Nobody Owens, Petit Poilu, Erased, Lolita la taupe qui cherche l’amour à la loupe, Ajin, The New York Four, Le procès Carlton et Mission Osirak

Par Casedepart @_NicolasAlbert

Petit Poilu, tome 17 – de Céline Fraipont et Pierre Bailly (Dupuis)

Pour ce deuxième week-end du mois de juillet, Case Départ vous propose une petite sélection. Les vacances, c’est aussi l’occasion de rattraper notre retard, sur un nombre important de sorties. En vous ouvrant sa bibliothèque, le blog met en lumière de très bonnes bandes dessinées. Nous passons au crible, les albums suivants : L’étrange vie de Nobody Owens est un album fantastique très réussi de Neil Gaiman, la dix-septième aventure de Petit Poilu signée Céline Fraipont et Pierre Bailly, le cinquième volume du formidable manga Erased, Lolita la taupe qui cherche l’amour à la loupe : un album pour enfant de Néraudeau et Méhée, le premier volet du thriller Ajin, le carnet de bord dessinée du Procès Carlton et le premier tome de la série Mission Osirak. Bonnes lectures.

L’étrange vie de Nobody Owens

Neil Gaiman adapte son propre roman L’étrange vie de Nobody Owens (éditions Albin Michel) avec l’aide de P. Craig Russel, un conte gothique étonnant, édité par Delcourt.
Résumé de l’éditeur :
Nobody Owens serait un garçon normal. S’il ne vivait pas dans un cimetière, élevé par des fantômes, avec un gardien qui n’appartient ni au monde des vivants, ni à celui des morts. De nombreuses aventures attendent le petit garçon dans le cimetière : un homme Indigo, un portail vers une cité abandonnée envahie par des goules, l’étrange et terrible Sleer. Mais à l’extérieur, Jack attend pour le tuer.

Jack, un tueur se rend dans une maison familiale. Là, il égorge les parents et la fille du couple, mais il laisse s’échapper le plus petit, un garçon de 3-4 ans. Apeuré, il se réfugie dans le cimetière voisin. Alors que le tueur réussit à s’introduire dans le lieu, il est accueilli par Silas, sorte de vampire qui le raccompagne à la sortie. Entouré de fantômes et d’esprits, le petit garçon n’est absolument pas affolé. Ses parents biologiques mués en fantômes, expliquent qu’ils viennent de mourir. Attendrie par la situation, Dame Owens décide de l’adopter. Le couple, décédé depuis plus de deux siècles, devient alors ses nouveaux parents, avec l’assentiment des autres pensionnaires du cimetière. Il est alors rebaptisé : Nobody Owens.

A partir de ce moment-là, Nobo grandit entouré d’une grande famille, apprend à lire à partir des pierres tombales, reçoit des cours de Silas, cet être fantastique qui a la possibilité de parcourir le monde la nuit tombée, devient ami avec Scarlett, une petite fille vivante ou découvre le plus vieux personnage du cimetière Caïus Pompeius.


Auteur de l’excellent comics Sandman, Neil Gaiman réussit parfaitement l’adaptation de son roman. Même si le récit est un peu poussif dans les premières pages, il s’avère accrocheur, intelligent, poétique et teinté d’un bel humour. L’univers du cimetière est finalement pas si glauque que cela, plutôt empli de vie, amusant par certains personnages, très dans l’entraide et l’amitié. Tous apportent quelque chose à Nobo, le font grandir. Une vraie famille pourtant étrange et décalée s’installe autour de lui. Alors que le lieu pourrait rapidement tourner au gore, il est ici positif, d’une belle chaleur (un comble pour des êtres décharnés). Le point fort de ce premier livre est donc cette opposition, cette ambivalence entre le réel et le surnaturel, entre la vie et la mort, mais qui se rejoignent en la personne du petit garçon. Les créatures surnaturelles et fantastiques sont au rendez-vous : vampires, loup-garou et revenants. D’ailleurs Nobody est souvent menacé par des esprits malveillants au fil des pages. Admirateur de récits du 19e et 20e siècle, Neil Gaiman rend hommage ici à Rudyard Kipling en mettant en scène un très jeune garçon élevé dans un univers inconnu de lui (cimetière et fantômes) comme l’avait fait son illustre aîné en mettant en scène Mowgli accueilli par des animaux dans Le livre de la jungle. Une belle transposition pour un beau clin d’œil.

L’étrange vie de Nobody Owens fut lauréat de nombreux prix (la Médaille Newbery de la fiction jeunesse 2009, le Prix Hugo en 2009, le Prix Locus du meilleur livre pour jeunes adultes 2009 et la Médaille Carnegie de la fiction jeunesse 2010), notamment grâce à la partie scénaristique mais aussi la partie graphique. Philip Craig Russel est chargé de coordonner les différents dessinateurs (Tony Harris, Scott Hampton, Galen Showman, Jill Thompson et Stephen B. Scott), se contentant d’illustrer le premier chapitre. Les ambiances atypiques et différentes voulues par l’histoire sont portées par les univers des 6 auteurs.

  • L’étrange vie de Nobody Owens, livre 1/2
  • Scénariste : Neil Gaiman
  • Dessinateurs : Collectif sous la coordination de Philip Craig Russel
  • Editeur: Delcourt, collection Contrebande
  • Prix: 19.99€
  • Sortie: 20 mai 2015

Petit Poilu

Dans la galaxie des albums jeunesse, Petit Poilu tient une place à part. La série muette pour primo-lecteurs de Céline Fraipont et Pierre Bailly est un petit bijou. Elle met en scène un drôle de petit personnage noir et tout plein de poils, espiègle et facétieux, à qui il arrive de nombreuses aventures, très bien écrites et qui font réfléchir (et ce n’est pas le cas pour toutes les séries). A nous deux ! est le dix-septième volume de la série.
Résumé de l’éditeur :
Petit Poilu explore les coulisses d’un théâtre de marionnettes. Il y rencontre les mains de Nono le marionnettiste qui, très inspiré, fabrique une marionnette à l’image de notre Petit Poilu fort intrigué… Et plus encore quand ce double de chiffon se met à copier toutes ses attitudes, provoquant chez notre petit héros des réactions pour le moins étonnantes ! Une fable muette et burlesque qui parle de l’image de soi, pour les tout jeunes lecteurs, dès 4 ans.


A l’instar de la formidable série Anuki (Maupomé et Sénégas, La Gouttière), l’univers de Petit Poilu est riche, varié, intéressant et d’une grande intelligence. Ce monde poétique, merveilleux et décalé est porté par la personnalité forte du petit héros de papier : Drôle d’être vivant qui ne ressemble à aucun animal connu, il est poilu de la tête aux pieds ; son visage est barré d’un large sourire et d’un gros nez rouge, qui le rendent tout de suite sympathique aux yeux des enfants. Il vit dans un petit pavillon avec son papa, sa maman et sa grand-mère. Tous les matins, il part pour l’école, sac sur son dos, mais comme pour chacun des volumes de la série, il n’arrive jamais à l’école, attiré par la curiosité d’un objet ou d’un personnage.

Petit bonhomme muet comme ses aventures, il s’adresse aux primo-lecteurs à partir de 4 ans. Par sa soif de découvrir le monde qui l’entoure, il entraîne les lecteurs dans ses pas. Malice, intelligence et poésie sont au cœur des scénarios de Céline Fripont. Pour son dix-septième volume, le petit être est attiré par un grand miroir psyché posé là sur une pelouse. Alors qu’il grimace pour s’amuser, il est happé de l’autre côté. Il arrive alors dans l’atelier d’un marionnettiste, ; qui surpris, décide de confectionner une poupée à son effigie. C’est le début des facéties devant un public entre l’homme et Petit Poilu.

L’humour subtil visible au début de l’album (la belle osmose entre le marionnettiste et le héros) se transforme en légère humiliation lorsque l’homme le singe, se moque de lui : Petit Poilu est ridiculisé. Furieux, il ira jusqu’à se battre. Voilà la grande force de la série : aborder des thèmes forts de la vie et les confronter aux émotions que pourraient ressentir les enfants dans de telles situations. L’introspection et la quête d’identité sont donc traitées avec humour et subtilité.

Pierre Bailly démontre encore une fois tout son talent dans cet album. L’auteur du formidable Ludo (Denis Lapière, Dupuis) propose un découpage quasi cinématographique en gaufrier de 9 grandes cases où son trait d’une belle simplicité permet de la fluidité dans la lecture. Les décors a minima dans ces grandes vignettes mettent magnifiquement en valeur les personnages, qui doivent être de suite identifiés par le jeune lectorat.

Petit Poilu : un bijou, une perle pour les tout-petits !

  • Petit Poilu, tome 17 : A nous deux !
  • Scénariste : Céline Fraipont
  • Dessinateur : Pierre Bailly
  • Editeur: Dupuis
  • Prix: 9.50€
  • Sortie: 12 juin 2015

Erased

Le manga-addictif Erased est de retour dans les bacs des libraires. Edité par Ki oon, Kei Sanbé dévoile le cinquième volume de ce formidable thriller temporel.

Pour vous rafraîchir la mémoire, vous pouvez relire les différentes chroniques de 4 précédents tomes, en cliquant ici.
Résumé de l’éditeur :
Satoru décide de cacher Kayo pour la mettre à l’abri et alerter les autorités sur la maltraitance dont elle est victime. Avec l’aide de son ami Kenya, il installe la fillette dans un bus désaffecté. Mais voilà qu’un inquiétant visiteur fait son apparition, les forçant à déménager !Grâce à leurs efforts, ainsi qu’à l’intervention de M. Yashiro et de la mère de Satoru, Kayo est confiée à la garde de sa grand-mère. À présent que sa camarade est sauvée, le jeune garçon relâche un peu sa vigilance, cependant le tueur en série court toujours…

Que dire de plus que nous n’ayons déjà dit sur ce formidable Erased ? Prépublié au Japon dans la revue Young Ace des éditions Kadokawa Shôten depuis juin 2012, ce manga réalise l’exploit de mettre tout le monde d’accord. En France comme dans le reste du monde, c’est un succès critique et public. Il faut souligner que Kei Sanbe sait tenir son lectorat en haleine, en multipliant les rebondissements et les surprises et c’est encore le cas pour ce cinquième volet : alors que Satoru a sauvé Kayo de son futur assassinat, qu’il a fait disculper Yûki, son nouvel ami, par un habile stratagème (la police n’a plus de chef d’inculpation contre lui), le bonheur se repend enfin dans la vie du petit garçon, coincé pour toujours en 1986. Pourtant sa vigilance se relâche et il apprend que le tueur en série va de nouveau frapper.

Pour cela, il repère Izumi, une jeune fille isolée dans le parc. Musicienne, lectrice d’œuvres majeures, c’est une fille intelligente. Tous les soirs, entre son cours de musique et ses cours de soutien, elle doit attendre une heure dans le parc, seule. Ce qui fait d’elle, une cible idéale pour le tueur. Malgré ses questionnements, il l’aborde bille en tête et cela fonctionne.

En plus de Kayo, qui est enfin de retour après un séjour chez sa grand-mère (elle habite chez elle maintenant, depuis l’interpellation de sa mère), sa mère toujours aussi touchante (que Satoru a aussi sauvé de son futur assassinat), il y a ses camarades mais surtout Yashiro, le professeur de CM2, un homme étrange, à la personnalité trouble, parfois cynique et qui se venge sur les sucettes depuis qu’il a arrêté de fumer. Quelles sont ses motivations ? Entre l’aide qu’il accorde à Satoru et son célibat, l’homme semble psychologiquement dérangé. D’ailleurs, la scène finale de ce volume entre le garçon et le professeur, laisse le lecteur dans un cliffhanger angoissant.

La suite, vite !

  • Erased, volume 5
  • Auteur: Kei Sanbe
  • Editeur: Ki oon
  • Prix: 7.65€
  • Parution: 25 juin 2015

Lolita la taupe

qui cherche l’amour à la loupe

Alexandra Néraudeau et Loïc Méhée, deux auteurs poitevins dévoilent leur troisième album en commun : Lolita la taupe qui cherche l’amour à la loupe, un album pour enfants édité par Les 400 coups.

Pour lire la suite de la chronique sur Comixtrip, cliquez ici.

Ajin

Après une mort accidentelle violente, par une magie puissante, Kei ressuscite devant les yeux ébahis des passants. Ajin, comme le nom de ces mystérieuses créatures revenues à la vie, est le titre de la nouvelle série Glénat, un manga de Tsuina Miura, mis en image par Gamon Sakurai.
Résumé de l’éditeur : Renversé par un camion en rentrant de l’école, le jeune Kei meurt sur le coup. Mais quelques instant plus tard, il ressuscite mystérieusement. Dès lors, sa vie de lycéen bascule. Une étrange organisation gouvernementale tente par tous les moyens de le capturer afin de mener des expériences scientifiques sur lui. Rapidement, il apprend qu’il n’est pas le seul être dans cette situation périlleuse, et qu’il semble être ce que certains nomment un Ajin. Personne ne sait exactement comment ils sont apparus ni pourquoi ils existent. Mais les services spéciaux du gouvernement sont prêts à user de tous les moyens pour le découvrir, car rien à leurs yeux n’est plus dangereux pour l’humanité… qu’un être immortel !

Prépublié dans la revue Good Afternoon des éditions Kôdansha depuis 2012 au Japon, le récit de science-fiction de Tsuina Miura est formidable et très accrocheur. Pas très neuf dans sa thématique (des personnes ressuscitent et qui restent sur terre) mais plutôt dans son traitement narratif : le manga devient rapidement un thriller, porté par un héros attachant. Kei est un jeune lycéen promis à un bel avenir, celui de médecin ; pour cela il travaille avec beaucoup d’acharnement. Poli, organisé, il ne sort jamais et se consacre à ses études. Après son décès et sa résurrection, il devient un Ajin, froid et calculateur. Même s’il reste quelques bribes d’être humain en lui, il est l’opposé de sa vie de lycéen.

Traqué par une organisation secrète, il tente de s’échapper par tous les moyens et c’est ce qui fait le sel de ce premier volume de la série. Le lecteur suit donc ce road-trip rapide et violent dans la deuxième partie du manga et c’est d’une grande efficacité et d’une belle aisance scénaristique. Il faut souligner que les Ajin, tout le monde en parle mais personne n’en a vu. D’ailleurs Kei est le troisième de cette espèce en 17 ans. Il y aurait 46 Ajin dans le monde et deux au Japon. Immortels mais très mystérieux, ces êtres fantastiques seraient aussi traqués par le reste des humains pour la gloire et la richesse. On comprend bien que l’un des seuls visibles depuis plusieurs années pourquoi il est pris en chasse par tout le monde.

Le dessin de Gamon Sakurai restitue idéalement l’atmosphère angoisse-thriller du récit. Les courses-poursuites donnent envie grâce à des planches au découpage nerveux du mangaka. Le lecteur appréciera les vignettes où les humains se transforment en Ajin avec leurs bandelettes, très réussies.

Le manga est un véritable succès au Japon avec un million d’exemplaires vendus pour les trois premiers tomes publiés. De plus, cette réussite sera déclinée en trois films animés.

  • Ajin, volume 1
  • Scénariste : Tsuina Miura
  • Dessinateur : Gamon Sakurai
  • Editeur: Glénat Manga, collection Seinen
  • Prix: 7.60€
  • Sortie: 1er juillet 2015

The New York Four

Riley, jeune lycéenne brillante part faire ses études supérieures à New-York. Tout est nouveau pour elle : elle retrouve sa sœur et décide d’emménager avec trois autres étudiantes dans un bel appartement. La vie des ses quatre jeunes filles est racontée dans The New-York Four, un comics signé Brian Wood et Kelly Ryan et publié par Urban Comics.

Résumé de l’éditeur :
La brillante et timide Riley est sur le point de faire son entrée à la prestigieuse université de New York, à Manhattan. Bien qu’elle ait toujours vécu à Brooklyn, c’est un tout nouveau départ que prend la jeune fille. Sa rencontre avec Marissa, citadine décontractée, Lona, sombre et quelque peu lunatique, et Ren, les pieds scotchés à son skate, font de cette première expérience une véritable aventure. Mais bientôt, les petits problèmes du quotidien estompent l’euphorie des premiers temps. Conflits de famille, colocation animée, difficultés scolaires et peines de cœur. L’amitié naissante du groupe survivra-t-elle à la découverte de la vie d’adulte ?

Riley Wilder est une lycéenne qui travaille d’arrache-pied pour intégrer une belle université. Son diplôme en poche, elle quitte le cocon familial où elle était surprotégée pour New-York. Portable visé à l’oreille, adepte des textos, elle découvre la grande ville avec appréhension. Là-bas, elle retrouve Angie, sa sœur, mise au ban de la famille pour une sombre histoire. Partie depuis l’âge de onze ans, elle mène une vie de bohème avec Franck, un véritable séducteur. Les deux sœurs sont enfin réunies, leur relation fonctionne enfin.

A la fac, Riley rencontre Merissa, confiante et audacieuse, Lona, pour qui échouer est inenvisageable et l’inébranlable Ren. Pour les amadouer, la jeune Wilder leur propose un travail. Rapidement devenues amies, elle décident d’emménager ensemble dans un grand appartement. Le lecteur découvre alors des étudiantes attachantes, intelligentes, proche de la réalité, anti-héroïnes, avec de belles valeurs et qualités mais surtout avec de nombreux défauts et c’est ce qui fait la grande force du récit. D’excellents portraits de jeunes majeures américaines des années 2000.

Premiers pas dans l’âge adulte des 4 filles, tout est réuni pour que les lectrices (la cible de l’album) soient séduites. L’un des travaux dont est le plus fier Brian Wood, est tout d’abord un travail de commande de la part de son éditrice Shelly Bond chez DC Comics. En 2006, la maison d’édition souhaitait lancer une ligne de comics à destination des jeunes filles, des pré-ados. Ce label, Minx, ne s’imposera pas réellement chez DC. Lorsqu’il feuillette les pages de The New York Four, l’auteur américain pense tout de suite aux mots : fun, espoir, enthousiasme et joie, tant ces différentes émotions il les a ressenti lors de l’écriture de l’histoire. Soulignons-le, cet album n’est pas uniquement ciblé pour les filles, les hommes peuvent aussi s’y retrouver.

Découpé en chapitre, comme dans tout bon comics, l’album de Brian Wood est une sorte de guide pour touriste. Il en profite au passage pour nous faire découvrir New York, les endroits qu’il apprécie ou ceux incontournables, le tout dans des petits cartouches en haut de certaines cases où l’on distingue ces lieux. Par ce biais, il montre tout l’amour qu’il a pour Big Apple. En plus de cela, le scénariste distille par-ci par-là des ambiances musicales, en annotant les début de chaque chapitre par une chanson qu’il apprécie.
La partie graphique confiée à Ryan Kelly est elle aussi d’une grande qualité. Le trait en noir et blanc du dessinateur restitue admirablement l’ambiance chaleureuse du récit.

  • The New York Four
  • Scénariste : Brian Wood
  • Dessinateur : Ryan Kelly
  • Editeur: Urban Comics, collection Urban Indies
  • Prix: 22.50€
  • Sortie: 10 juillet 2015

 Le procès Carlton

Après l’Affaire du Sofitel de New-York (qui s’est achevé par une transaction financière entre les deux parties, sans procès public), Dominique Strauss-Kahn n’avait pas terminé ses déboires judiciaires. En effet, il était inculpé dans l’Affaire du Carlton de Lille. A la demande de l’éditeur Le Lombard, François Boucq était invité à suivre le dénouement dans les prétoires aux côtés de Pascale Robert-Diard, une journaliste spécialisée du Monde. Ces événements sont compilés dans Le Procès Carlton, un journal de bord commenté et mis en image.

Résumé de l’éditeur :
Pendant trois semaines, devant le tribunal correctionnel de Lille, assis côte à côte sur le banc des prévenus, ils ont été accusés, confrontés et se sont défendus : Dominique Strauss- Kahn, l’homme qui fut « le plus puissant du monde », Dodo la Saumure et sa gouaille, et une dizaine d’autres — chefs d’entreprise, avocat, directeur d’hôtel — que l’affaire du Carlton a brutalement exposés au regard public. Les débats furent âpres, tendus, parfois obscènes, drôles aussi.

A mi-chemin entre le carnet de bord et la chronique judiciaire, cet album n’est pas réellement une bande dessinée, Le procès Carlton met en image le compte-rendu de l’un des procès les plus attendus de la place publique. Accompagnée par François Boucq, le talentueux dessinateur du Bouncer (avec Jodorowki, Glénat), de Jérôme Moucherot (Le Lombard) ou de Little Tulip (avec Jérôme Charyn, Le Lombard), Pascale Robert-Diard enchante le lecteur par la vivacité de sa plume, son regard acéré puisqu’elle est chroniqueuse judiciaire depuis 2002 pour le quotidien Le Monde. Elle montre tout le professionnalisme dont elle peut faire preuve, puisqu’elle expose les faits sans jamais porter de jugement (cela elle le laisse aux magistrats et aux juges). Il est toujours délicat de vulgariser des notions de justice et elle le réussit parfaitement.

Il faut dire que ce procès est hors-norme de part ses chefs d’accusation (proxénétisme aggravé), ses thématiques lourdes (la prostitution, la manipulation, la soumission), son côté voyeur (les scènes de sexe débridées) mais surtout par son casting impressionnant : DSK, ancien directeur du Fond Monétaire International (profession qu’il fut obligé de quitter lors du précédent procès Sofitel de New-York), ainsi que le fameux Dominique Alderweireld dit Dodo la saumure, propriétaire de nombreuses maisons closes en Belgique. Truculent, gouailleur et n’ayant pas la langue dans sa poche, il tranche avec la posture de l’ancien ministre de l’économie socialiste dans le gouvernement Jospin. Ne pas oublier non plus, les magistrats et les juges qui se révèlent pugnaces, d’un grand professionnalisme, parfois durs parfois cyniques et ironiques, notamment le Président Bernard Lemaire.

L’ambiance lourde est parfaitement restituée par les pinceaux de François Boucq. Parfois en couleurs, parfois en noir et blanc, le trait du Grand Prix de la Ville d’Angoulême en 1998 est d’une belle malice, aérien, ce qui lui permet de croquer les mines souvent tristes et déconfites des protagonistes. Entre comédie et tragédie, les deux auteurs doivent aussi relater des faits parfois scabreux, très sexe. Mais ils le font avec élégance sans jamais tomber dans le sexe pour le sexe – pudeur, retenue et recul – pour livrer un ouvrage très précis, parfois drôle parfois peu ragoutant, mais c’est le procès qui le veut. A noter qu’il fut publié moins de 20 jours après le verdict de l’affaire : une prouesse !

  • Le procès Carlton
  • Scénariste : Pascale Robert-Diard
  • Dessinateur : François Boucq
  • Editeur: Le Lombard
  • Prix: 15€
  • Sortie: 03 juillet 2015

Et pour quelques pages de plus…

Pour compléter notre sélection de la semaine, Case Départ vous conseille aussi les albums suivants :

Mission Osirak

La bombe de Saddam est le premier volet de Mission Osirak, un album fondé sur une histoire vraie , celle d’un raid aérien pour empêcher le dictateur Saddam Hussein qui voulait coûte que coûte récupérer l’arme nucléaire. Cette série en deux tome est signée Jean-Claude Bartoll et mise en image par Ramon Rosanas.

Résumé de l’éditeur :
En juin 1981, l’aviation israélienne détruisit l’unique centrale nucléaire du monde arabe, en Irak. La mission des F-16 était d’empêcher Saddam Hussein d’obtenir l’arme nucléaire avec laquelle il menaçait d’effacer Israël de la carte. Une opération précédée à la fois par les coups tordus – dont certains en France – de différents services secrets, et par la préparation par des pilotes d’exception de ce raid aérien qui reste, dans les annales de l’aviation militaire, un modèle d’attaque préventive.

Le récit de Jean-Claude Bartoll mêle habilement complots gouvernementaux, combats aériens, espionnage, traîtrise et même tueurs à gage. Assez bien écrite, l’histoire revient sur l’une des grandes opérations aériennes d’espionnage des trente dernières années. Classé secret défense, ce raid datant de 1981 permettait à l’Etat Israélien de démontrer toute sa puissance militaire sur l’Irak, en détruisant la seule centrale nucléaire à titre préventive. Malgré les précautions d’usage, le scénariste livre tout, y compris les noms des protagonistes comme Raymond Barre. Est-ce que cela va faire du bruit ? A suivre.

Le dessin réaliste de Ramon Rosanas est d’une belle efficacité même si parfois les personnages semblent extrêmement figés.

  • Mission Osirak, tome 1/2 : La bombe Saddam
  • Scénariste : Jean-Claude Bartoll
  • Dessinateur : Ramon Rosanas
  • Editeur: Dargaud
  • Prix: 13.99€
  • Sortie: 10 juillet 2015