Damien Rice; Fourvière 2015: le retour du magicien du folk qui nous avait tant manqué..

Par Filou49 @blog_bazart
28 juillet 2015

Cette année, pour mes Nuits de Fourvière 2015 (qui se termine dans quelques jours  avec le traditionnel éclat final), mon choix s'était porté sur une sélection exclusivement musicale : pas de danse, de cirque ou de théâtre (ça sera pour une prochaine édition), mais uniquement des concerts d’artistes reconnus  et pour le moins expérimentés qui n'allaient pas me décevoir comme j'ai pu un peu l'être l'an passé..

Et après le formidable show données par Mesdames Sanson et Cherhal début du mois, ce sont deux interprètes masculins que j’ai vu à quelques jours d’intervalle , pour deux concerts radicalement différents mais vraiment enthousiasmants chacun dans leur style, je veux parler des spectacles de Messieurs Damien Rice et Monsieur Calogero pour des concerts  respectivement donnés au cœur des pierres ancestrales de Fourvière les 18 et 23 juillet : 

 Commençons d'abord par le premier par ordre chronologique de ces concerts, avec Damien Rice pour un concert tant attendu par ses fans après un retour scénique de près de dix ans.

Damien Rice, je l'ai connu grace au cinéma, et notamment la chanson "Blowers' daughter" qui servait de bande originale au film de Mike Nichols, Closer,une de ces rares chansons sur terre qui me retourne le coeur à chaque écoute.

J'avais acheté les deux premiers albums de l'artiste irlandais, un artiste qui renouvellait alors totalement la folk, tant Rice n'a pas son pareil pour trousser une pop  intime, délicate (titre d'un de ses singles d'ailleurs) et bouleversante, sans oublier évidemment sa voix, si particulière, une voix qu’il monte souvent dans des tons aigus avec une  maîtrise  assez époustoufflante. En plus de t"he blowers's daughter,"9 crimes, Volcano ou Older Chests sont vraiment des perles totales en matière de mélodie et d'émotion musicales.

En plus de ses albums solos et j'avais beaucoup aimé sa collaboration avec Mélanie Laurent pour un projet musical mal aimé que j'avais pourtant largement soutenu à sa sortie. Donc, évidemment j'étais ravi qu'il sorte de son silence discographique en novembre 2014 avec la sortie de son troisième album,My Favourite Faded Fantasy, mais je vous avouerai que je ne l'avais écouté que très rapidement sur Deezer une seule fois sans être vraiment convaincu trouvant que le disque un peu terne, n'était pas à la hauteur de l'attente.

Il faut dire ( car j'ai ensuite acheté l'album dans la foulée du concert à Fourvière et suis alors totalement tombé dans ses filets) que contrairement à 9 ou 0,  My Favourite Faded Fantasy est un opus qui ne livre pas ses merveilles dès le premier jet.

Au contraire,  pour son grand retour Damien Rice nous offre un album qui s’apprivoise réellement au fil des écoutes :   on s'aperçoit en effet que les morceaux qui semblaient un peu trop doux, trop épurés, révèlent en fait des trésors de mélancolie et de surprise. Cette voix, parfois à la limite du tremblement, nous émeut  in fine tant pour atteindre son sommet sur des ballades  pleines de cette  mélancolie intimiste et poignante, simplement accompagnées d'une faible guitare ou de quelques touches de piano pour finir dans des acmés flamboyants, pour des morceaux souvent compris entre cinq et dix minutes.

Ainsi le magnifique It Takes A Lot To Know A Man qui nous dévoile une explosion de cordes et de guitaire au bout de 5 minutes de morceau pour une explosion sonore absolument jouissive.

Pareil pour The Box, sixième piste de l’album, où des violons et une batterie nous offrent un soupçon de mélancolie progressive.

Mais ces deux morceaux et les autres bijoux de ce troisième album, je ne l'ai découvert donc que pendant son concert du 18 juillet donné à  Fourvière;un live qui a enchanté le public venu bien nombreux ( et venu visiblement des quatre coins de l'Europe, comme il a cherché à le savoir en questionnant les différentes origines du public) tant l'artiste se fait rare sur scène et surtout traine derrière une réputation de doux dingue en live, capable de toutes les surprises ( visiblement aucune playlist n'est prévu avant un concert, Damien décidant à la dernière minute les morceaux qui s'y joueront) et de toutes les folies.

Passons vite sur la  pré première partie ( deux très jeunes filles, autoprocalmées amies de l'artiste irlandais qui ont joué deux chansons en guitares voix avec un manque d'assurance assez touchant) puis une vraie première partie Mariam the Beliver, une artiste suédoise à l'univers très psychédélique,  qui, en dépit d'une vraie singularité,  a un peu endormi tout Fourvière.

A 22h15 précises,   Damien Rice est arrivé pour nous sortir de notre léthargie, que la canicule n'arrangeait pas,  et là surprise, car je m'attendais à un orchestre conséquent, il est entré en scène tout seul et a ainsi joué le rôle d'un véritable homme orchestre et avec une voix, qui s'est envolé dans les hauteurs de Fourvière, trasportant tous les spectateurs dans une émotion totale pour un concert tout à la fois terriblement intimiste et fascinant.

Seul avec sa guitare acoustique et des pédales - dont la fameuse "pédale loop" dont l'effet est toujours incroyable -, il a fait montre d'une formidable prouesse scénique,ne cessant de jouer pendant près de deux heures, créant des effets inattendus et toujours bien vus, créant une ambiance assez mystique et vraiment envoutante. Parmi les morceaux de son nouvel album, .Colour me in », et « The Greastest Bastard" sont parfaitement mises en valeur dans cet écrin.

Durant la prestation, le public  est très ( trop?) respectueux, imposant ainsi un silence quasi religieux, comme si personne ne voulait manquer une miette de cette performance assez saissante.J'ai particulièrement aimé de magnifiques  transitions, étonnantes par leur fluidité et leur émotion (Volcano/Elephant, Trusty & True / I remember, ) ;

Drôle et parlant français avec une vraie aisance, Damien Rice n'hésite pas à se dévoiler entre anecdotes un peu sybillines ( celui du jeune garçon avec sa valise d'euros qui doit patienter avant de l'utiliser?) et confidences plus intimes, .essayant  d’instaurer une proximité avec le public, nous faisant même participer à une immense chorale  pour former une version inédite et très intense de "Volcano.

Tour à tour amusant, charmeur, et finalement assez accessible, Rice a montré à ceux qui comme moi ne l'avaient jamais vu sur scène une personnalité vraiment charismatique.

Alors certes, j'ai pu parfois un peu regretter l'absence de musiciens derrière lui , en me disant qu'avec un piano et quelques cordes, quelques morceaux (comme le fameux "the blowers' daughter") auraient certainement encore pris plus d'ampleur et auraient donné encore plus de relief à ses si superbes compositions.

 Mais quoiqu'il en soit, ce concert fut un moment vraiment unique, symbiose parfaitement réussie entre une voix absolument ahurissante et  une personnalité franchement singulière et attachante, et le public, sorti de l'amphithéâtre avec des étoiles plein les yeux, semblaient partager largement mon avis.

Damien Rice - A woman like a man