Edouard Loubet – La Bastide de Capelongue

Par Gourmets&co

… le chef sert les plus belles assiettes aux parfums et aux saveurs de la Provence …

Edouard Loubet est-il un homme comblé ? Il devrait l’être. Une reconnaissance nationale et internationale, il est considéré comme l’un de nos meilleurs chefs, fut élu Chef de l’Année en 2011 par Gault&Millau, et possède deux étoiles Michelin fermement accrochées à son restaurant du Lubéron. Il fut d’ailleurs le plus jeune étoilé de France avec sa première étoile à 24 ans et la deuxième à 27 ans. Ses influences, ses rencontres ? Alain Chapel à Mionnay et Marc Veyrat à Annecy. Deux styles, deux cuisines qui l’ont tiré vers le haut. Il a construit un domaine de plusieurs hectares avec une magnifique bâtisse qui offre une vue imprenable sur le village de Bonnieux et sur la garrigue environnante. Il oscille en un équilibre parfait entre sa Savoie d’origine en hiver et les chaleurs de son pays adoptif, ces collines de l’arrière-pays provençal d’abord à Lourmarin et aujourd’hui à Capelongue.

Pourtant l’homme conserve toujours, enfouie quelque part, cette colère teintée de frustration d’avoir manqué la troisième étoile qu’il pense ou a pensé mériter… à juste titre. On peut le rassurer, même s’il n’est pas du genre à être inquiet, dépressif ou abattu. Au contraire, il dégage une vitalité incroyable, une volonté sans faille de continuer son métier au sommet, un désir naturel de plaire, de donner du plaisir, de peaufiner encore et toujours ce talent inné et acquis à la fois qui lui permet aujourd’hui de servir les plus belles assiettes aux parfums et aux saveurs de la Provence comme nulle part ailleurs avec des plats qui ressemblent au paysage alentour. Edouard Loubet est au plus haut de son talent et il faut en profiter vite et souvent.

Cet homme de l’art, comme parfois, a voulu retourner à l’essentiel, à la simplicité des choses naturelles, à l’évidence des plats qu’une tradition lui a laissé. Une cuisine de l’essentiel, chère à son cœur et à ses souvenirs. Il a construit La Bergerie, grande salle aux multiples coins et recoins, cheminée d’un côté rôtissoire de l’autre, tables en bois et décor brocante. Un gigot sur le feu des braises, un gratin pour l’accompagner, une ratatouille, des entrées traditionnelles, voilà le chef « passeur de recettes provençales » comme il se définit lui-même. Respect sinon amour du passé, de la tradition qu’il faut transmettre, conserver et vivre des moments simples de la joie toute bête d’être à table devant un plat qui fume.

De l’autre côté du terrain, dans son restaurant gastronomique, dans ce pays de chaleur et de vent, il a voulu trouver et transmettre dans sa cuisine toutes ces senteurs apportées par la nature. Il a son potager, ses producteurs qui vont façonner sa cuisine, ses plats du jour de la semaine ou du mois, ses classiques ou ses créations spontanées. Dans un légume, un fruit, une herbe, il prend tout, de la racine à la fleur, pour pénétrer jusqu’au fond du goût.

Et la truffe ! L’emblème du Lubéron, le champignon par excellence et de l’excellence. Il vit avec, l’aime, et la travaille comme personne. D’ailleurs, n’est-ce pas la première chose que vous goûtez chez lui, installé sur la terrasse pour l’apéritif en dégustant la carte, belle et riche ? Si, ces incroyables et légendaires Pizzas à la truffe, inégalables et inégalées. Ça commence bien…

À table, sur la terrasse à l’ombre des parasols, chaleur et douce brise se mélangent, un peu comme dans les assiettes du chef qui font vivre un festival de saveurs et de senteurs, des goûts et des couleurs incroyables, qui vous entrainent dans les sentiers de Provence, loin de la côte et de ces faux-semblants et au plus près de la vérité d’un terroir et d’un pays. Si Edouard Loubet était écrivain il serait Giono, cinéaste il serait Pagnol, peintre il serait Cézanne. Le chef possède tant la Provence qu’il la restitue dans sa vérité première.

L’énumération des plats, les assiettes qui arrivent et repartent, beauté éphémère mais qui marquent l’esprit et le corps, il faudrait en parler de chacune pour exprimer un enthousiasme et un bonheur de chaque instant passé à la table de Capelongue.

Carottes de Bonnieux chaudes et froides, purée de carottes au carvi émulsionnée à l’huile d’olive de Richard, jus de fanes à l’achillée (plante aromatique et fleur comestible). C’est beau, frais, jeune, vivant… le ton est donné.

Pour connaître enfin la saveur de l’artichaut, la Barigoule d’artichauts de Provence à l’hysope, lutée en soupière comme autrefois à l’huile de laurier, tartine de brousse de Roves et fèves. Une explosion d’odeurs lorsque la croûte s’ouvre et de saveurs proprement incroyables. Vous avez dit vérité du produit ? La voilà…

Un chef-d’œuvre absolu que ce classique du chef : Morille farcie comme un boudin blanc, poêlée croustillante, onctueuse (oh oui !) émulsion à la morille. Qualité extrême du produit, génie des alliances de saveurs.

C’est l ‘été mais la truffe est là, l’aestivum en croûte, relevée d’un coulis de maïs à la mélisse, pop corn poivrés, feuille de pimprenelle. Si la truffe et sa croûte légère et goûteuse est parfaite, les deux herbes emportent un peu le plat en tirant la couverture à elles et au fond ne s’entendent pas si bien que ça, surtout la pimprenelle et son léger goût de concombre.

Et voilà le Carré d’agneau au serpolet des Claparèdes légèrement fumé et infusé en cocotte, gratin de ma grand-mère ! Il est magnifique, fier dans sa cocotte noire en belle fonte, odorant, à la cuisson parfaite, aux discrètes mais présentes senteurs de thym doux, et au démentiel jus de cuisson. Quant au gratin,… merci grand-mère Loubet !

Le Filet mignon de porc du Ventoux sauté à la sauge du jardin, raviole d’endive et salsifis au jus réduit, est un léger ton en-dessous à cause d’une cuisson lente qui le rend mou du genou et du reste. Néanmoins, un plat élégant, harmonieux avec les légumes, dans la douceur comme ces petites pommes de terre fines et savoureuses, servies à côté.

Les desserts, comme il faut s’y attendre, sont magnifiques, surtout la « petite gâterie du pâtissier » comme la Soupe à l’angélique, sorbet à la brousse et crème brulée au thé au jasmin, simplement superbe et époustouflant de finesse.

Le Citron de Menton givré, sur sa soupe d’ananas à la coriandre et sablé citronné est lui quasiment inoubliable.

C’était un déjeuner chez Edouard Loubet, passeur de bonheur, de plaisir, et de joie simple. Rien de moins, mais quand même, sans en avoir l’air, l’une des plus belles et grandes tables de France.

Route de Lourmarin
Par D 232 et voie secondaire
Tél : 04 90 75 89 78
www.capelongue.com
reservation@capelongue.com
Fermé mardi midi et mercredi
Du 13 novembre au 28 décembre et du 10 janvier au 19 mars
Menus : 58 € (déjeuner en semaine)
140 € (5 plats) – 190 €
Carte : 130 € environ

La Bergerie
Fermé dimanche soir et lundi
Menu : 38 € (3 plats)
Carte : 60 € environ

18 chambres de 140 € à 480 €
11 suites
Petit-déjeuner : 22 €



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