Princess Century l’interview

Publié le 12 novembre 2015 par Hartzine

Multi-instrumentaliste et compositrice, Maya Postepski est d'abord connue pour ses talents de batteuse et son implication dans les accents dark wave d' Austra, projet qu'elle a fondé en 2009 avec Katie Stelmanis et Dorian Wolf. C'est elle aussi qui, entre 2010 et 2012, a rendu les premières prods de TR/ST si addictives, comme Bulbform ou Sulk, avant que Robert Alfons ne finisse par s'engluer dans une eurodance de fête foraine. Talentueuse mais effacée, Maya s'est composée un style caractéristique qui fédère ses différentes contributions autant que son public, et qu'on retrouve dans une approche synthétisée des influences qu'elle puise dans son activité de DJ, ce qui nous vaut l'impressionnante mixtape de plus d'une heure qui complète cette interview - avec du Makina Girgir, Hype Williams, LFO, Chris & Cosey et David Lynch dedans. Normal, donc, que dans son projet solo Princess Century, elle revisite avec un plaisir évident ce qui a façonné son imposant fond musical, triturant ici un peu de synth pop ou de cold wave, flirtant là avec l'EBM ou le disco. Après son premier album Lossless en 2013 et un EP, Lossy en début d'année, tous deux aussi discrets que leur auteure, la récente sortie de son LP Progress, dont on vous invite à découvrir deux extraits ci-après, est l'occasion de poser quelques questions à la Canadienne et de comprendre un peu mieux le processus créatif d'une nerd atypique.

Maya Postepski l'interview

Tout a commencé sous la forme d'une activité secrète dans ma chambre alors que je vivais encore chez ma mère. J'apprenais à utiliser des stations audionumériques comme Logic et je passais des heures à bidouiller en enregistrant mes idées. J'apprenais aussi une quantité phénoménale de nouvelles connaissances tout en travaillant avec Katie (Stelmanis, ndr) sur Austra, on utilisait ProTools à cette époque (c'est dingue d'y repenser!) et j'étais complètement intimidée mais fascinée à l'idée de faire de la musique sur un ordinateur. Je ne savais absolument pas ce que je faisais, mais j'étais pour ainsi dire poussée à poursuivre le travail pour comprendre comment produire de la musique avec un ordinateur. Avec mon éducation classique, la notion même d'utiliser un ordinateur, dans les faits un objet inanimé, pour générer du son m'était tout aussi hallucinante que passionnante. Aujourd'hui encore, je suis exaltée quand je produis des sons sur un ordinateur. J'adore les synthétiseurs analogiques, mais quand on fait de la musique avec un ordinateur, on passe par des moments infinis et surprenants. C'est un peu comme faire de la musique à l'envers.

C'est important de comprendre que Princess Century n'est pas un projet anti-groupe. J'ai vraiment adoré travailler avec Katie et Robert (Alfons, de TR/ST, ndr) sur nos projets respectifs et je pense que j'ai appris des choses incroyables en intégrant des groupes, non seulement en termes de musique mais aussi sur moi, sur ma vie. Princess Century est un genre de reliquat, les chutes si tu préfères... ce qui ne veut pas dire qu'elles ne sont plus bonnes ! Parle à n'importe quel boucher, il te dira que les abats sont les meilleures parties. Tu vois ce que je veux dire... J'essaie juste de dire que Princess Century n'interfère en rien dans ce que je fais pour Austra ou autre. J'aime collaborer et j'aime aussi travailler seule. C'est une simple question d'approche.

It started out as a secret activity in my bedroom while I was still living at my mom's house. I was learning how to use DAW's like Logic and I would spend hours messing around with recording my ideas. I was also learning a tremendous amount of new knowledge while working with Katie on the Austra stuff, we were using ProTools at the time (crazy to think about that!) and I was just completely intimidated yet fascinated by the idea of making music on a computer. I had no idea what the hell I was doing, but I was somehow compelled to continue working on understanding how to make music with a computer. Because I'm classically trained the notion of using a computer, a practically inanimate object to make sound, it was completely mind-blowing and exciting. It still excited me today when I make sounds on a computer. I love analogue synthesizers but there are limitless and surprising moments when you use a computer to make music. It's like making music backwards somehow.

It's important to note that Princess Century is not an anti-band project. I have really enjoyed working with Katie and Robert on our respective projects and I think I've learned incredible things through being in bands, not just in terms of music but also about myself, my life. Princess Century is kind of like the leftovers, the scraps if you will... not to say that they are bad! I mean talk to any butcher and they will tell you that the scraps are the most delicious parts. You know what I mean...I'm just trying to say that Princess Century has no interference with the stuff I do with with Austra or anyone else. I love collaborating and I love working alone as well. It's just a vibe thing.

Je suis contente que tu entendes un lien entre chacun des projets, parce que je travaille très dur à façonner les sons que j'aime écouter. J'ai une liste de référence remplie de sets préparés que j'ai minutieusement confectionnés toutes ces années. J'aime aussi mes synthétiseurs et je suis accro à eBay. J'ai depuis peu déménagé à Bruxelles, donc mes synthés sommeillent dans la cave de ma mère, mais je trouverai un moyen de me débrouiller sans. L'album Trust (TR/ST, 2012, ndr) a bien été conçu uniquement avec des instruments Logic...

I'm happy that you hear a link between each of these projects, because I work very hard on shaping the sounds that I like to hear. I have a go-to list of pre-sets that I've carefully crafted over the years. I also love my synthesizers and am an eBay addict. I recently moved to Brussels so now my synths are sleeping in my moms basement, but I'll find a way to make it happen without them. The whole Trust album was made using Logic instruments so... On dirait qu'il existe une connexion, au moins sémantique, entre ton premier album Lossless en 2013 et Lossy, ton EP sorti plus tôt cette année. Un truc en rapport avec la compression ou les techniques informatiques, peut-être? Est-ce que Progress entre dans cette case?
It looks like there's a connexion, at least a semantic one, between your debut album
Lossless in 2013 and Lossy, your EP earlier this year. Something about compression or computational techniques maybe? DoesProgress relate to this?

Oui, je pensais que ce serait une manière élégante de créer un lien entre un nouveau public et mes anciennes productions, les amener à une sorte de connexion. C'est aussi un titre un peu nerd, je pense qu'il sonne bien. Progress est une autre évolution, c'est sans doute pour ça que je l'ai appelé Progress... C'est comme si j'avais atteint un autre niveau dans mes travaux. À ce moment-là, je lisais un bouquin intitulé A Short History of Progress par Ronald Wright, excellent et source d'inspiration.

Yea I thought it would be an elegant way to tie in new listeners to the older material I released, get them to make some kind of connection. It's also a nerdy title which I think sounds good. Progress was another evolution, and that's why it's called Progress I suppose... It's like I moved onto some other level with my work, and I was also reading a book at the time called A Short History of Progress by Ronald Wright which was excellent and inspiring.

Cet album s'est présenté très naturellement, alors que je passais quelques jours seule dans mon appartement. Mon coloc de l'époque travaillait toute la journée, alors je me levais, prenais mon café, mon thé, je faisais des trucs habituels, puis je travaillais sur quelques concepts. Je n'avais pas de projets grandioses ou de planning, je jouais comme ça venait, et je pense que c'est pour ça que l'album couvre une telle superficie en termes de genres. Je partais tantôt sur une ambiance disco, tantôt dans une nostalgie mélancolique. Une fois les démos créées, je les ai emmenées en studio: on n'y a pas fait grand chose à part enregistrer en live un peu de repiquage batterie pour rendre les sections de percussions plus vibrantes. J'adore mélanger vraies batteries et boîtes à rythme pour créer plus d'émotion. J'ai aussi filtré quelques trucs grâce à des séquenceurs analogiques et des systèmes modulaires, mais il n'y a eu aucun composition en studio. C'était surtout du mixage.

J'ai évidemment beaucoup d'influences, et comme je suis aussi DJ, je n'arrête pas de courir après de nouvelles musiques pour mon inspiration. J'adore passer des heures à chercher de nouveaux albums et je suis toujours surprise de tomber sur des trucs bizarres et géniaux, ça me retourne le cerveau, c'est une obsession. Je ne puise pas mon inspiration dans un genre ou auprès d'une personne en particulier, ça évolue sans cesse et je ne peux pas répondre à cette question, mais il y a des références récurrentes dans mes playlists, comme Yoko Ono, Gina X, Legowlet, Giorgio Moroder et Donna Summer, Sade, Area Forty One, etc.

The album was some that happened very naturally over the course of a few random days when I was home alone at my apartment. My room mate at the time worked all day so I would get up, have my coffee, my tea, a little routine, and then get working on some ideas. I didn't have any grandiose plans or a schedule, I just played whatever I felt, which I think is why the album covers so much territory in terms of genres. Sometimes I was in a disco mood, other times in a melancholy nostalgia. The demos were done and I took them to the studio where we didn't do much except record some live drum kit overdubs that make the percussion sections come alive, I love mixing live drums with drum machines to make things move more. I also filtered some stuff through analog sequencers and modular systems, but there wasn't any composing in the studio. Mostly it was mixing. I have a lot of influences of course, and because I'm also a DJ I am constantly seeking out new music that inspires me. I love spending hours looking for new albums and I'm always so surprised when I find something weird and unique, it blows my mind and I get obsessed with it. I don't have one specific genre or person that inspires me, and it changes constantly so I can't really answer the question but there's definitely consistent players in my playlists such as LFO, Yoko Ono, Gina X, Legowelt, Giorgio Moroder and Donna Summer, Sade, Area Forty One etc.

Je ne suis pas vraiment en tournée, je cherche plutôt des dates au hasard. J'habite maintenant à Bruxelles, je me contente de dire aux gens ici que je suis dans les parages et je visite des amis un peu partout en Europe. On verra bien ce qui se passe!

Tu commences à promouvoir Progress en Europe, quels seront tes dates clés et combien de temps durera cette tournée?
You're starting to promote Progress in Europe, what will be your main venues and how long will you be touring?

Faire des litres de soupes pendant l'hiver et des tonnes de nouveaux sons.

I'm not so much Touring as much as I am looking for random gigs. I live in Brussels now so I'm just telling people in town that I'm here and I'm reaching out to friends around Europe- we'll see what happens!

Je laisse voguer mon esprit. J'y vais au feeling.

Cooking lots of soups over the winter and making tons of new music.

Mixtape

Freeflow in my mind. I just felt it.

Vidéos

Tracklisting

01. Bros vs UFOs
02. Sunscream
03. Tokyo Hands
04. Sheughnessy
05. Sunrise 101/Last Disco
06. Rosé
07. Domestic
08. Fata Morgana
09. Metro

Princess Century - Progress (Paper Bag Records, 16 octobre 2015)