En cas de malheur - 8/10

Par Aelezig

Un film de Claude Autant-Lara (1958 - France, Italie) avec Jean Gabin, Brigitte Bardot, Edwige Feuillère, Franco Interlenghi, Nicole Berger, Madeleine Barbulée - en N.B.

Magnifique Gabin.

L'histoire : Yvette a la beauté du diable, mais les fonds de poche bien vides. Alors elle vit le plus souvent de ses charmes, mais aspire à autre chose, une vraie vie, une belle vie. Un soir, avec son amie, elle braque un petit horloger avec un pistolet en plastique. Mais l'épouse arrive, se met à crier et Yvette lui tape dessus avant de s'enfuir. Les deux jeunes femmes sont rapidement rattrapées et c'est ainsi qu'Yvette se retrouve devant Maître André Gobillot, ténor du barreau, la bonne cinquantaine. Lorsqu'il lui apprend qu'un avocat, ça se paie, la belle tombe des nues... et propose un règlement en nature. André refuse, mais accepte de la défendre. Car il est tombé fou amoureux de la jeune femme. Son épouse accepte ; elle est habituée à ses incartades. Mais elle a peur : cette fois, c'est très sérieux. André a trouvé l'amour de sa vie et l'installe dans un petit appartement...

Mon avis : Quel beau film ! Belle image, belle histoire, belle fluidité narrative, beaux acteurs... Quoi de mieux ?

J'imagine qu'à l'époque, cela a dû en choquer plus d'un. L'amour adultère, avec une fille délurée (qu'on voit une seconde totalement nue d'ailleurs) et sans morale, et même la suggestion d'une nuit à trois ! Aujourd'hui, si on est moins offusqué, on reste en tous cas sans voix devant la prestation de Gabin, bouleversant, mais aussi de Bardot, d'une beauté incendiaire. Comment ne pas craquer pour ce petit bouchon ? Elle ne joue pas bien ? Grande question. Elle est parfois maniérée, c'est vrai, mais on la plaçait toujours dans des rôles de midinettes ; c'est le phrasé des "titis parisiens" et des jeunes filles qui minaudent. Le même qu'elle avait dans la vie. Ca peut agacer, mais on ne peut pas lui reprocher de ne pas être naturelle ; elle l'est. Et au niveau de l'expression du visage et du corps, désolée, elle joue magnifiquement cette jeune femme à la fois sauvage comme un petit animal et d'une grande candeur. Et Edwige Feuillère, en grande bourgeoise blessée, un régal !

On pourrait croire le couple mal assorti, mais ça fonctionne à merveille. Lui, évidemment, on peut comprendre qu'il tombe en adoration devant cette nymphe ; pour elle, c'est plus difficile, Gobillot doit lui faire l'effet d'un vieux barbon. Et bien on y croit ! Ce qui confirme encore que Bardot, n'était pas qu'une ravissante idiote. Au fur et à mesure, on voit qu'elle s'attache à lui, au-delà du côté financier, et pourquoi elle s'attache. Il est tout de même craquant, cet André, quand il apprend, par exemple, qu'il va être papa (entre autres scènes)...

Malgré son sujet, où l'on pressent le drame à chaque instant, le film comporte plein de petites répliques ou situations comiques (la secrétaire - impayable Madeleine Barbulée - qui saute de joie toute seule dans l'appartement, les réflexions de BB...) qui m'ont franchement fait rire. Un mélange très habile, très subtil. Une réussite.

Le film est adapté d'un roman de Georges Simenon. Tout ça n'a pas vieilli du tout, ni l'histoire, ni la mise en scène. Un grand et beau classique.