Retour sur la SOIRÉE OPÉRA BOUFFE au Théâtre Jean-Claude Carrière

Publié le 05 décembre 2015 par Idherault.tv @ebola34
Retour sur la SOIRÉE OPÉRA BOUFFE au Théâtre Jean-Claude Carrière - Domaine d'O - Montpellier

OPÉRA BOUFFE - Impressions et compte-rendu
Théâtre Jean-Claude Carrière - Domaine d'O - Montpellier
Vendredi 4 décembre 2015

Opéra Bouffe, peut-être faudrait-il, en débutant ce propos, essayer de savoir ce qui se cache derrière ces mots ! Opéra, on connaît, bouffe, aussi, avec une forte connotation alimentaire, mais alimentaire plaisant, " la grande bouffe " !

Pour Larousse, cela " se dit d'un opéra de caractère léger par opposition au grand opéra (opera seria) ". Pour d'autres, c'est une " sorte d'opéra léger et populaire ou traitant d'un sujet comique ". On trouvera, aussi, " petit opéra particulièrement en vogue au XVIIIe siècle, dont les personnages et l'intrigue appartiennent à la comédie ".
Il s'agit donc bien d'opéra mais avec une notion de comique, d'amusement !
Ce soir, l'amusement était, comme prévu, au rendez-vous.

Génial Gilles Benizio, ex Dino (sans Shirley), qui d'emblée met la barre au bon niveau, celui de la légèreté et de la plaisanterie.
La surprenante opérette alsacienne, "Lischen et Fritzchen ", nous invite à découvrir un Offenbach, plutôt décalé, mais dont le talent est toujours bien présent. Le metteur en scène, inspiré, en a " remis une couche " en nous livrant un Fritzchen arrivant sur scène en skis, sac au dos, sur un déguisement de pingouin. Et il insiste, en faisant de Lischen un chef indien, entrant en poussant un caddie où sont rangés les petits " palais " (balais) qu'elle espère vendre. Le public rit, on s'amuse du comique de circonstance à l'évocation des vêtements typiquement alsaciens de l'héroïne. Un bon moment, porté par des voix de qualité, celles de la soprano Isabelle Ribet et du ténor Pascal Bourgeois.

La suite ne détonne pas, le burlesque prend, avec " Tristœil et Brunehouille " de Van Parys, une dimension quasi surréaliste. Bien commentée par " Dino " la pochade nous livre, tour à tour, un acte de Rossini, le suivant de Wagner, le troisième d'Offenbach et s'achève sur l'intervention de Debussy. C'est irrévérencieux, inventif et très pro, bien " Van Parysien " ! La mise en scène, les vêtements des personnages, ne vont pas dans le sens de la modération : le cheval jupon de Tristœil, une vraie friandise. Quant au présentateur, il n'en rate pas une et avec la mention de l'opéra célèbre de Debussy, " Pédéraste et Médisante ", ne fait pas dans la dentelle. Toujours admirablement servie par la voix d' Isabelle Ribet, admirable dans " L'ode à la lune " de Dvorak, auxquelles s'ajoutent celles de l'altus Robert Expert, de la soprano Domitille Maillet et du baryton-martin Pascal Terrien, cette œuvre comique demeure une vraie œuvre lyrique.

La " surprise ", annoncée par Gilles " Dino ", quinze minutes d'entracte, nous laisse hilares, détendus, prêts pour la suite.
Petit tour au Bistro d'O, un peu d'air frais en prime, et c'est reparti !

Et bien, non, ce n'est pas du tout pareil !
" Socrate " de Satie, une plaisanterie au deuxième degré. En 1920, ils se sont bien " marrés " de la dernière de Satie. Socrate pour rire ! Et voilà le deuxième degré, ce n'est pas rigolo ! Cette œuvre sérieuse, donnée comme le " chef d'œuvre " de Satie par de nombreux musicologues, nous introduit à la vie du grand philosophe et nous " lâche " sur sa mort. Un texte en béton, traduit du grec par Victor Cousin à partir des dialogues de Platon, une musique qui fait mouche, composée à l'origine pour piano seul, c'est le premier opéra moderne qu'il nous est donné d'écouter. Nous ne sommes plus dans l'opéra bouffe, mais dans l'opéra tout court. Des accents de passion de Bach, la mort de Socrate c'est un peu, pardon pour le blasphème, celle du Christ. La description de ses derniers moments frise la grandeur, l'atteint même !

Bravo pour le coup de génie qui consiste à partir sur un " délire " et terminer sur un " drame ". Le public accepte, applaudit aussi mais sans un vrai enthousiasme. Ce type d'œuvre peut vous " plomber " l'ambiance. Etait-ce le cas ?

Ma compagne et moi-même, toute émotion avalée, avons ressenti un petit creux. Opéra bouffe... repas ! Oui je sais, c'est facile, mais le Bistro d'O n'est pas loin. Une assiette de tapas après, quelle chance de finir la soirée à côté des artistes qui, eux aussi, avaient faim !
Une mention spéciale pour la beauté et la grâce de Sophie Grattard, dont le piano nous a accompagné durant toute la soirée, avec talent et entrain.

Evénement

Cette soirée est marquée par un partenariat avec la Faculté des Sciences, Université de Montpellier.
Des parfums inédits, véritable empreinte olfactive de la soirée Opéra bouffe ! Les étudiants de la licence professionnelle "Parfums, arômes et cosmétiques " et des étudiants en chimie ont élaboré des parfums originaux en lien avec les opéras présentés au domaine d'O.

Biographies

Jacques Offenbach

Né à Cologne en 1819 dans une famille juive allemande, Jacques Offenbach arrive à Paris à 14 ans pour y poursuivre au Conservatoire ses études de violoncelle.
Il quitte l'école un an plus tard et entame une carrière de soliste virtuose. Directeur musical de la Comédie Française, il crée son propre théâtre, les Bouffes Parisiens, sur les Champs-Elysées en 1855. C'est dans ses murs qu'il donne la première représentation parisienne de son opérette alsacienne " Lischen et Fritzchen " le 5 juillet 1864. Offenbach, dont le nom est étroitement lié à la légèreté du Second Empire est le créateur de l'opéra-bouffe français.

Georges Van Parys

S'il n'y a qu'une seule chanson à retenir de l'abondante production de Georges Van Parys, il faut citer La complainte de la Butte, interprétée par Cora Vaucaire dans " French Cancan " tourné par Jean Renoir en 1954. Compositeur prolifique, Georges Van Parys, né à Paris en 1902 et décédé en 1971, aurait composé une trentaine d'opérettes et plus de trois cents musiques de films ! Nombre de génériques ne comporteraient pas son patronyme. Proche du Groupe des Six, de Ravel et de Debussy, il rencontre René Clair en 1930 et compose la musique du premier film sonore musical français, " Le Million ". Première œuvre d'une carrière au cours de laquelle les plus grands noms du cinéma français feront appel à lui et qui se terminera en 1970 avec le célèbre " Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas mais... elle cause ! " de Michel Audiard.

Erik Satie

Né à Honfleur en 1866 et mort à Paris en 1925, ami des dadaïstes et des cubistes et membre du parti Communiste, Satie a été toute sa vie à la marge des grands courants artistiques de son temps. Son humour irrévérencieux, sa vie de bohème et la misère dans laquelle il vécut les dernières années de sa vie ont façonné une image à l'emporte-pièce probablement très éloignée de ce qu'était véritablement le musicien Erik Satie. Socrate, écrit en 1916, et désormais considéré comme son chef-d'oeuvre n'a pas échappé à la contre-réputation de son auteur.
Lors de la création de sa version pour orchestre en 1920, le public hilare pensait avoir assisté à une nouvelle bouffonnerie de celui qui composa " La Sonatine Bureaucratique " et un pastiche de la Marche funèbre de Chopin, dans un recueil qu'il avait appelé Embryons desséchés.

Liens

Vidéos

Lischen et Fritzchen d'Offenbach - Duo des alsaciens

Socrate de Satie - Portrait de Socrate (Piano: Deborah Richards, Alto: Hilke Helling)