Zohra Drif-Bitat : “Bouteflika doit parler”

Publié le 18 décembre 2015 par Amroune Layachi

N’ayant pas reçu de réponse un mois et demi après leur demande d’audience, alors que Bouteflika est montré présidant un conseil restreint autour de l’avant-projet de révision de la Constitution, Zohra Drif-Bitat et Khalida Toumi, membres des “19-4”, rappellent que “la Constitution stipule que le Président s’adresse directement à la nation et non pas à travers des intermédiaires”.

L’apparition d’Abdelaziz Bouteflika à la télévision à trois reprises au courant de la semaine, présidant des réunions et recevant des personnalités étrangères, ne semble pas dissiper les doutes des “19-4”, qui, plus d’un mois après avoir introduit une demande d’audience, n’ont toujours pas obtenu de réponse.

Se refusant à croire que le Président aurait pu recevoir leur lettre et qu’il refuse d’y donner une suite favorable, la sénatrice et moudjahida Zohra Drif-Bitat, ainsi que l’ancienne ministre de la Culture Khalida Toumi, avec lesquelles nous avons longuement discuté hier à Alger, pensent que ces apparitions répétitives apportent de l’eau à leur moulin. “Puisqu’on nous le montre à la télévision, puisqu’il reçoit des personnalités étrangères et préside des réunions, nous pouvons considérer alors que le président de la République a les capacités de recevoir des gens et les écouter.

Il n’y aurait donc aucune raison pour qu’Abdelaziz Bouteflika ne reçoive pas des citoyens qui ont demandé à le voir et qui ont des choses très graves à lui dire...”, ont-elles relevé, tour à tour. Zohra Drif-Bitat et Khalida Toumi continuent de marteler que ces “faits graves” ne peuvent être portés qu’à la connaissance de la seule personne du président de la République, puisque, affirment-elles, elles ne reconnaissent que l’“ordre constitutionnel”.

Les deux signataires de la lettre des “19-4” rappellent d’ailleurs que “seul le Président incarne l’État et la nation, à l’extérieur et à l’intérieur du pays”. D’où d’ailleurs, cet autre rappel qui, venant de deux personnalités connues pour être proches du Président, résonne fort : “La Constitution stipule que le Président s’adresse directement à la nation et non pas à travers des intermédiaires.”

Le propos, chargé d’allusions, se comprend comme une réponse à ceux qui ont pris sur eux de signifier une fin de non-recevoir à la demande d’audience des “19-4”. Zohra Drif-Bitat et Khalida Toumi disent ne pas comprendre pourquoi, en plus d’avoir “accaparé la parole et les prérogatives du Président”, ces derniers se rendent à “des réactions d’une violence inouïe contre une simple demande d’audience”. La dernière réaction violente en date est mise à l’actif du député du Front de libération nationale (FLN), et vice-président de l’Assemblée populaire nationale (APN), Baha-Eddine Tliba, qui a accusé, lors d’un passage sur une chaîne de télévision privée, l’ancienne ministre de la Culture de corruption.

Des attaques auxquelles Khalida Toumi répond, en s’interrogeant sur qui peut avoir missionné “cet immense menteur” pour “insulter des personnes propres et intègres”. Elle considère que c’est parce que la “bande mafieuse” qui a actionné Baha-Eddine Tliba “n’a pas d’arguments politiques” qu’“elle passe à des tentatives, de toute manière vouées à l’échec, pour disqualifier notre démarche en harponnant symboliquement certaines personnalités”. Khalida Toumi pense aussi que “parce qu’ils sont dans des logiques mafieuses, qu’ils ne reculeront devant aucun mensonge, même le plus énorme, pour salir, calomnier et peut-être même fabriquer des dossiers”. Cependant, l’ancienne ministre de la Culture persiste et signe : “Quelles que soient leurs intentions, nous ne reculerons pas d’un pas.” Car pour elle, “des gens qui en arrivent là, c'est-à-dire à agir en bande mafieuse, c’est qu’ils déclarent au monde entier qu’il n’y a plus d’État algérien”.