Semaine cinéma coréen – 2009 Lost Memories

Par Bebealien

Continuons notre petit tour d’horizon du cinéma coréen avec un film supplémentaire disponible directement en DVD. Aujourd’hui c’est de la SF d’anticipation, matinée de film historique et de film d’action. 2009 Lost Memories avait battu en son temps le record du plus gros budget de film sud-coréen et ca se voit à l’écran. Quand la Corée rencontre Philippe K. Dick et son Maître du haut-château…

2009 Lost Memories – Philippe K Dick et la Corée…

1909. Contrairement à ce que nous connaissons, Hiro Ito ne se fait pas assassiner en gare de Harbin. L’Histoire change. Le Japon devient une méga-puissance et se bat aux côtés des alliés pendant la seconde guerre mondiale. La bombe atomique est lâchée sur Berlin. 2009. La Corée est un territoire japonais. Deux agents du JBI (Japanese Bureau of Investigation) enquêtent sur un groupuscule terroriste indépendantiste s’en prenant aux œuvres d’art…

La jaquette, belle et présentant les deux principaux protagonistes

2009 Lost Memories est une bombe. Encore une fois, l’histoire très particulière de la Corée explique la subtilité du scénario et la critique implicite qu’il fait de l’état du monde actuel. En effet, l’assassinat de Hiro Ito (qui a bien réussi dans la vie réelle) est considéré comme un acte fort et fondateur de l’histoire Coréenne, a une époque ou la Japon annexait ses territoires. L’assassinat ayant permis aux Coréens d’accéder à l’indépendance.

Cette uchronie fait immédiatement penser à du Philip K Dick, et son roman Le Maître du Haut Château où les USA cèdent devant les nazis et le Japon lors de la deuxième guerre mondiale. Le principe est fort, car il permet de s’interroger sur l’histoire et sur cet effet papillon qui implique que des actes passés donnent la situation géopolitique actuelle. Le film reviendra à de nombreuses reprises sur cet assassinat qui est la clé du film… mais dur d’en dire plus sans déflorer l’intrigue outre mesure (qui réserve de belles surprises).

Le JBI s’apprète à prendre d’assaut un musée où se sont retranchés les terroristes

Au-delà du scénario brillant et qui justifie à lui seul la vision du film, 2009 Lost Memories est aussi une réussite artistique totale. Ce qui me vient en premier à l’esprit est la musique. Géniale, transcendante, j’ai eu un mal de chien à me la procurer et je ne cesse d’écouter en boucle ce thème d’intro du film où sont présentés l’assassinat raté puis une brève description des évènements marquants menant jusqu’en 2009. La musique de ce film n’est pas juste bien, elle est extraordinaire. John Williams (Star Wars, Indiana Jones…) ou Danny Elfman (les Tim Burton, Spiderman…) font limite petits joueurs à côté de Dong-Jun Lee. Sa BO c’est du pur bonheur, comme on en trouve que rarement. A la fois lyrique, inspiré, guerrier ou intimiste. Une tuerie.

Jang Dong-gun, un des deux enquêteurs. Vous ne lui trouvez pas un petit air de Chow Yun Fat ?

Le film fourmille aussi de détails consécutifs à l’annexion de la Corée par le Japon : que ce soit la conduite à gauche, les monuments qui changent, les accents des protagonistes (mais je suis incapable de le vérifier ne parlant ni coréen ni japonais… mais il parait que c’est le cas !). Bref c’est travaillé, bien pensé et totalement jouissif.

Suivant l’enquête d’un inspecteur du JBI poursuivant des terroristes, le film laisse forcément une place importante aux scènes d’action, tournées souvent au ralenti, ce qui pourrait être frustrant ou ridicule. Mais encore une fois, de part les choix du metteur en scène Lee Si-myung, et encore une fois grâce à la fabuleuse musique, le tout passe comme une lettre à la Poste. Tout juste pourra-t-on regretter quelques scènes finales abusant un peu trop des effets spéciaux mal incrustés.

Une image qui pourrait faire penser que ce film est un pur action-movie… Mais ne vous y trompez pas, c’est avant tout de la SF, et intelligente de surcroît !

Impossible également de ne pas parler du casting, mené par Jang Dong-gun, sorte de Chow Yun Fat coréen, au charisme animal qui bouffe littéralement la pellicule. Il a tourné peu après dans Frères de Sang, autre grand film sur la guerre en 1950 entre le Nord et le Sud, et qui a explosé une fois de plus le box-office local. Dès qu’il apparaît à l’écran, le film gagne en intensité et en profondeur. Peut d’acteurs font cet effet là, lui à l’air de le faire naturellement…

2009 Lost Memories, c’est du film intelligent et bien foutu, à la fois divertissant et parlant d’un sujet très sérieux, super bien joué, beau à regarder, avec une BO de folie. Il n’est pas encore dans votre DVDthèque ? Mais enfin, foncez l’acheter !