Le notaire a droit à ses honoraires

Publié le 12 janvier 2016 par Christophe Buffet
"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 1er décembre 2014), que la société B..., notaire (le notaire), a assigné Mme X... et M. Y...qui lui avaient confié un mandat de vente d'un immeuble en paiement d'honoraires à la suite de la vente de ce bien, un autre notaire ayant dressé l'acte ;

Attendu que Mme X... et M. Y...font grief à l'arrêt de dire le notaire recevable en ses prétentions et de les condamner à lui payer une somme de 7 000 euros ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le mandat donné par les vendeurs au notaire prévoyait à leur charge une rémunération pour la négociation dont le montant était déterminé, qu'ils s'interdisaient de contracter directement avec un acquéreur qui leur serait présenté par celui-ci et que les parties à la vente intervenue avaient été mises en relation par le notaire, de sorte que ce dernier avait rempli ses engagements et rempli les diligences qui lui étaient demandées, même s'il n'était pas intervenu lors de l'établissement de l'acte de vente pour une cause qui lui est étrangère, ce dont il ressortait que, malgré l'emploi erroné du terme émolument, il avait été statué sur la demande d'honoraires libres formée par le notaire conformément aux dispositions de l'article 4 du décret du 8 mars 1978, lesquels ne sont pas soumis à la vérification préalable du greffe et, abstraction faite du motif surabondant relatif à l'article 11 de ce décret, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... et M. Y...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... et M. Y...à payer à la société B... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quinze.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour Mme X...et M. Y...


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué

D'AVOIR déclaré la SCP notariale B... recevable en ses prétentions

AUX MOTIFS QUE la procédure prévue aux articles 704 à 709 du code de procédure civile figurait dans le chapitre relatif à la vérification et au recouvrement des dépens ; que la demande de la SCP ne concernait pas le recouvrement de dépens, au sens de l'article 695 du code de procédure civile ; que la SCP prétendait à juste titre que cette demande relevait des dispositions de l'article 720 dudit code ;

ET AUX MOTIFS, repris des premiers juges, QUE selon l'article 720 du code de procédure civile, les contestations relatives aux honoraires des officiers publics dont le mode de calcul n'était pas déterminé par une disposition réglementaire, demeurait soumise aux règles qui leur étaient propres ; qu'il convenait d'appliquer les dispositions de l'article 52, alinéa 2 du code de procédure civile selon lesquelles les contestations relatives aux honoraires devaient être portées devant le Tribunal de grande instance ou le tribunal d'instance dans le ressort duquel l'officier public exerçait ses fonctions ;

ALORS QUE les notaires demandaient un émolument en raison de la prestation de négociation d'un bien immobilier ; qu'il s'agissait d'une contestation relative à des émoluments tarifés ; que la demande, formée directement devant le tribunal d'instance, n'était pas recevable, faute pour la SCP B... d'avoir suivi la procédure spécifique de taxe, imposant la vérification préliminaire, par le greffe de la juridiction, des émoluments contestés ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé, ensemble, les articles 704, 719 à 721 du code de procédure civile et l'article 4 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978.


SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point

D'AVOIR condamné Madame X...et Monsieur Y...à payer la somme de 7000 euros à titre principal à la SCP B..., outre 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE le paiement d'un émolument de négociation était subordonné aux conditions prévues par l'article 11 du décret du 8 mars 1978, à savoir l'existence d'un mandat, la découverte du cocontractant, la mise en relation des cocontractants et la réception ou la participation à la réception de l'acte de vente ; que les émoluments de négociation étaient dus, dès lors qu'il était démontré une mise en relation du vendeur et de l'acquéreur par le notaire, même si ce dernier n'était pas intervenu lors de l'établissement de l'acte de vente pour une cause qui lui était étrangère ; que l'agence sous l'égide de laquelle avait eu lieu la transaction, avait reconnu qu'elle était parvenue à trouver un accord entre les parties, précisant que l'office notarial n'y était pas parvenu ; que les intimés ne pouvaient pas prétendre que la vente aux époux A...aurait été due à une pure coïncidence ; que le mandat confié à la SCP B... comportait une clause interdisant aux souscripteurs de contracter directement avec quelqu'un qui leur aurait été présenté dans le cadre de ce mandat ; que l'offre d'achat avait été faite sur papier à en-tête de la SCP ; que le caractère exclusif ou non du mandat était indifférent ; que la mise en relation des partes avait bien eu lieu de la part de la SCP ; que les vendeurs n'avaient pas fait face à leurs obligations envers elle ; qu'il convenait de faire droit à la demande des notaires ;

ALORS QUE, comme l'a rappelé la Cour d'appel elle-même, le notaire ne peut recevoir un émolument de négociation que s'il a reçu l'acte de vente ou participé à sa rédaction ; que le notaire, dans le cas inverse, ne peut rien réclamer, sauf à invoquer la responsabilité pour fraude de son client ; qu'en accordant à la SCP B... des honoraires de négociation, tout en constatant qu'elle n'avait pas reçu l'acte de vente ou participé à sa réception, la Cour d'appel a violé l'article 11 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978."