Parmi ceux-ci la tétralogie racontant la vie de Rabbit Angstrom.
Tout comme La Chute d'Albert Camus ou As I Lay Dying de William Faulkner, le roman est écrit au présent. Ce qui permet de passer avec une curieuse facilité de l'état d'esprit d'un personnage à un autre avec une certaine poésie, un rythme, une musique que seul l'utilisation du présent offre et que le passé calibre plus mal. Le livre est tout à fait de son époque (les jeunes années 60) et déjà il a un parfum de nostalgie.
1971: Parution de Rabbit, Redux qui raconte l'été d'Angstrom, largué par sa femme, partie avec un autre homme en 1969, avec en arrière plan l'été de Woodstock et l'alunissage d'Apollo 11. On explore le racisme, les liaisons père-fils (Harry a maintenant un fils de 13 ans), la guerre du Vietnam, le cynisme et la destruction de l'univers de la drogue. À nouveau, Updike se fait l'écho d'une certaine imperfection Étatsunienne à l'aube des années 70.
Harry Rabbit Angstrom n'était pas l'alter ego de John Updike. Pour cela il faut se tourner vers ses livres mettant en vedette Henry Bech.
Upidke fait le portrait en 4 livres et un personnage imparfait, de ses États-Unis des années 60, 70, début des années 80, fin des années 80.
Dans le tout premier livre, notre lapin perd la tête parce que sa femme ne veut pas baiser. Il se demande même si ils ont eu un enfant par immaculée conception. Il quitte la maison, convaincu que ce qu'il cherche est ailleurs.
Et Rabbit, de livre en livre, cherche. Se cherche,
Il est entre autre obsédé par les pipes et les suceuses. Quand il quitte sa femme dans le premier livre, il va voir sa maîtresse, se fait faire une pipe et ne lui parlera plus jamais (!). Dans le second livre, une exploration du changement de génération aux États-Unis et de la prise de position raciale, Updike plante son épiphanie chez Harry quand sa blonde et blanche maîtresse de 17 ans fait une pipe à un militant des Black Panthers, noir. Dans le troisième volet, Rabbit se demande combien de fois son fils de 22 ans a déjà savouré le plaisir de se faire sucer.
Il n'y a que chez les écrivains que les belles jeunes filles sucent les vieux gâteux.
Et Updike était un rêveur. Un rêveur d'une autre Amérique. Il brillait dans son écriture par l'acuité des portraits qu'il dépeignait. On reconnaissait facilement les gens qui peuplent son pays dans ses écrits. C'est ce qui a expliqué son grand succès dans son lectorat.
Dans le quatrième livre, Rabbit n'est pas réellement riche, Sa femme l'est. Il est cynique. Il parle de voitures, Il scrute l'anatomie des femmes. il méprise son fils et son style de vie, Il fantasme sur l'idée de baiser la femme de son ami, fait des commentaires sexistes et racistes, Veut beaucoup baiser. Surtout pas sa femme.
Mais la candeur de ses pensées nous le garde étrangement près du coeur. Un coeur de lièvre. Qui sera d'ailleurs le titre du tout premier livre, lorsque traduit en français.
Harry, sa femme, son fils prennent la clé des champs chacun leur tour, à leur manière.
Ils désertent.
Updike voulait en quelque sorte écrire une riposte au On The Road de Jack Kerouac et faire une démonstration réaliste des effets dévastateurs sur une famille quand on la largue.
Médiocres, même. Mais écrire en prose la vie de ceux qui sont bien au soleil, tout en se concentrant sur les fois où ils ne sont pas sous les rayons et gèlent est super intéressant.
Updike nous explique aussi, sans le vouloir, qui là-bas pourrait voter pour un Donald Trump.
Updike était un écrivain de type "peintre".
Un portraitiste hors pair.
L'ai acheté sur Amazon.