La stratégie de la pomme de terre.

Publié le 13 juin 2008 par Josst


     


Hier encore, suffocant, attrapé à la gorge par l'actualité d'un monde à l'agonie, je désespérais de ne trouver à mon avenir, qu'une vie convenable par intérim. Un avenir que j'entrevoyais déjà au travers d'un présent bien sombre, ponctué d'hypothétiques "missions d'existence", entrecoupées de longues périodes de survie. Bref, tout ça; ma clairvoyance pessimiste du futur, mon affliction pour la cherté démocratisée du pétrole, pour la hausse du prix des principales denrées alimentaires, pour l'éviction de PPDA du journal de 20h, me rongeait et plus étonnant, m'avait poussé à la consultation quasi inconsciente d'un article de la FAO sur la pomme de terre.
...Je lus l'article. Ma vision de la patate en fut changée et mon Être, probablement sauvée d'une lourde dépression.

Pour moi jusqu'à présent, la patate n'était rien d'autre qu'un féculent un peu bourratif qui accompagnait le rôti de mes repas dominicaux en famille et accessoirement, un truc dont on se servait pour produire de l'électricité à titre expérimental. Pour la FAO en revanche, la pomme de terre constitue bien plus que ça, et pourrait devenir un aliment stratégique, un élément de la lutte contre le déficit de certaines matières agricoles et au delà, devenir un remède contre la faim au service des pays les plus pauvres.

La pomme de terre joue en effet un rôle clé dans le système alimentaire mondial. Principale denrée nourricière non céréalière du monde, sa production atteignait 320 millions de tonnes en 2007 dont plus de la moitié était destinée à alimenter les pays développés.
Peu intégrée aux marchés internationaux, soumis à des courts fluctuants, la pomme de terre dépend avant tout des coûts de production locaux ce qui en fait une valeur sûre pour la sécurité alimentaire.
De plus en plus, on préconise d'utiliser "l'humble tubercule" en lieu et place des céréales devenus, par leur déficit ainsi que par les spéculations dont ils font l'objet, des denrées trop chères. Dans certains pays comme au Pérou, l'on incite par exemple la population à manger du pain produit à partir de farine de pomme de terre afin de réduire les importations céréalières devenues trop coûteuses.

Si la pomme de terre apparaît aujourd'hui comme le "pain du pauvre" destiné à faire partie intégrante des stratégies de la FAO visant à fournir une alimentation nutritive aux pays les plus touchés par la crise alimentaire, c'est qu'au delà de son coût attractif, cette dernière porte en elle de nombreux avantages.
Riche en glucides (2.1%), chargée de protéines et de vitamine C, la pomme de terre produit d'avantage de nourriture sur de petites surfaces puisque c'est près de 85% de la plante qui est comestible pour l'homme tandis que ce chiffre atteint seulement 50 % pour les céréales les plus rentables. Une richesse nutritive qui a cette avantage sur les céréales de pouvoir être consommée sans transformation industrielle préalable. Ce dernier élément peu paraître relativement anodin. Pourtant le simple fait que la pomme de terre soit une fois cultivée, prête à la consommation, ralentit fortement l'intérêt qui peux lui être porté, notamment par l'industrie agroalimentaire. Ainsi, la pomme de terre restant  avant tout d'usage local, peu insérée dans le marché mondiale, pourrait protéger les paysans du "sud" des processus pervers de domination entre pays producteurs et pays consommateurs et du même coup, diminuer les dépendances alimentaires des pays en développement en multipliant le nombre de leurs cultures vivrières.

D'ici à vingt ans, la population mondiale aura gagné d'après les prévisions moyennes, environ 2 milliards d'habitants. Une population supplémentaire qui se concentrera à 95% dans les PVD. Pays qui connaissent déjà des pressions sur les terres et sur certaines ressources comme l'eau. La pomme de terre pourrait être un élément important des efforts déployés par la communauté internationale pour relever le défi; à savoir garantir la sécurité alimentaire des futures générations tout en préservant la bonne tenue des ressources naturelles et de l'environnement dont nous dépendons.

+ d'articles:

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- Pomme de terre, aliment du futur.
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