Qu'est-ce que l'agroécologie : fiche pratique

Publié le 06 avril 2016 par Bioaddict @bioaddict
Quelles pratiques agricoles sont utilisées en agroécologie ? Quels sont les avantages pour l'environnement et les agriculteurs (cultivateurs et éleveurs) ? Quelles différences existe-t-il avec l'agriculture conventionnelle et l'agriculture biologique ? Où et comment se former ? Fiche pratique. 1/4 Les avantages de l'agroecologie - www.osez-agroecologie.org

L'agro-écologie désigne les pratiques agricoles qui lient l'agronomie (science de l'agriculture) et l'écologie (science de l'environnement). Solution pour remplacer les pesticides, pour réduire les nitrates dans nos rivières, pour mieux atténuer les effets de l'agriculture sur le dérèglement climatique, pour proposer une nourriture plus saine aux citoyens... Elle est une agriculture qui se veut durable, plus respectueuse des Hommes, des terres et des animaux que l'agriculture conventionnelle. Elle permet également de mieux rémunérer les agriculteurs.

Réduire l'empreinte environnementale et tenir compte de la biodiversité

La ligne directrice que suivent les agriculteurs inscrits dans une démarche agro-écologique consiste à réduire l'impact environnemental des exploitations en tenant compte de la biodiversité. Comment ? Principalement en réduisant les intrants, c'est-à-dire l'ensemble des ressources externes (pesticides, engrais, antibiotiques mais aussi carburants, eau d'irrigation, aliments pour le bétail...).

En moyenne pour un agriculteur, ces intrants représentent une dépense de 50 à 60 % du chiffre d'affaires. Un coût économique qui s'ajoute à un impact environnemental désastreux : certains sont en effet à l'origine d'une part importante de la pollution de l'air, des eaux et des sols, causent des dommages sur la santé des agriculteurs et de leurs consommateurs, contribuent au changement climatique, nuisent ou détruisent la biodiversité locale... C'est pourtant cette biodiversité qui représente l'alternative. Car développer une démarche agro-écologique, c'est remplacer une utilisation massive d'intrants par des pratiques qui tiennent compte des équilibres de la nature et des services qu'elle rend.

Toutes les pratiques agricoles de l'agroécologie ont pour but de stimuler la vie du sol et des petites bêtes qui y grouillent. Pourquoi ? parce que le sol est un concentré de vie né de la collaboration des racines des plantes et des micro-organismes. Toute la fertilité des forêts, mais aussi des prairies, des steppes,... dépend de leurs interactions.

Parmi les techniques utilisées en agroécologie, on peu citer : le paillage, la culture sur buttes, les couches chaudes, les engrais verts, la rotation ou encore le compostage.

Retrouvez plus d'informations sur ces techniques sur le site http://terre-humanisme.org/agroecologie/technique-agroecologie.

Quelle différence avec l'agriculture biologique ?

A la différence de l'agriculture biologique qui possède son label témoignant du non usage de pesticides et engrais de synthèse, l'agro-écologie ne possède pas son étiquette. En effet, le terme désigne avant tout une approche agricole, dont les agriculteurs bio sont souvent les meilleurs représentants.

Cependant, si de cette approche découle un tissu de pratiques, chaque exploitant les adapte, en conçoit et en développe en fonction des spécificités de son territoire et de la nature de son exploitation. Il n'y a donc pas d'uniformité dans les pratiques.

Mais la certification Haute Valeur Environnementale (HVE) témoigne très généralement d'une telle démarche. En effet, le cahier des charges HVE impose deux grands indicateurs de l'agro-écologie. D'une part, une part maximale de 30 % d'intrants dans le chiffre d'affaires. De l'autre, un minimum de 10 % des surfaces agricoles composées d'éléments paysagers accueillant de la biodiversité (haies, mares, bandes d'herbes...).

Exemple pratique : quand faune et flore travaillent pour les terres

Concrètement, cela donne quoi ? Antoine, cultivateur de région parisienne a réduit son usage de pesticides en découpant une de ses parcelles de 36 hectares en quatre grâce à des haies. Ces dernières attirent des espèces qui se nourrissent de pucerons et autres ravageurs de plantes.

Cette segmentation du terrain a également permis d'allonger la rotation de ses cultures, c'est-à-dire que chaque année, les cultures passent d'une parcelle à l'autre pour revenir à la première au bout de 5 voire 7 ans. Ces changements de place préviennent l'installation durable de maladies, de ravageurs et d'herbes entrant en concurrence avec la culture. A l'opposé des monocultures pratiquées par l'agriculture industrielle, la rotation des cultures permet donc de réduire l'utilisation des pesticides.

De plus, Antoine a arrêté de labourer ses 160 hectares de terres. Ce labour est à l'origine de l'érosion des sols et s'avère être une des dépenses énergétiques majeures pour son exploitation. Les vers de terre sont revenus dans les champs puisque leur habitat n'est plus détruit chaque année. Ils ont ainsi pu assurer l'aération des sols de façon naturelle et gratuite. Un gain de temps, d'énergie et d'argent pour l'agriculteur, mais également un gain pour la biodiversité de sa ferme et pour la résilience de son système agricole.

La diversité bénéficie également aux élevages !

Utiliser les sciences de l'environnement à bon escient n'est pas réservé qu'aux cultivateurs. Des éleveurs s'y mettent aussi, à l'image de Marie et Patrick en Rhône-Alpes. Monsieur a hérité d'une exploitation laitière exclusivement composée d'Holstein, fameuses vaches blanches et noires, que son père nourrissait avant tout avec du soja et du maïs.

Avec la succession, Patrick a intégré 7 nouvelles races plus rustiques (Abondance, Tarine,...). Elles ont rendu le troupeau plus résistant aux maladies et le lait est plus riche. Elles ont permis aussi une meilleure valorisation de la qualité bouchère de la viande avec des races dites " mixtes " comme les Simmentales.

Le lait est également meilleur grâce à une alimentation plus saine. Exit le soja OGM importé. Si les vaches mangent encore du maïs, elles se nourrissent principalement de foin et d'herbes broutées dans les prairies. Le couple complète avec des aliments de culture de leur exploitation ce qui réduit, là encore, la part d'intrants. Leur exploitation est ainsi plus ancrée à l'échelle locale et moins dépendante des cours du marché.

D'ailleurs, ils transforment dans leur atelier une partie du lait en fromage blanc et yaourt. Le couple vend sa production dans une AMAP (Association pour le Maintien d'une Agriculture Paysanne) de 12 agriculteurs qui nourrit une partie du voisinage, dans un magasin de producteurs et en vente directe. La diversification de leurs débouchés a permis à leur ferme d'être plus stable financièrement d'une année sur l'autre.

Gagner plus en produisant moins mais mieux

L'agroécologie est donc une discipline qui offre une agriculture moins consommatrice de ressources extérieures, plus diversifiée, davantage adaptée au territoire local et moins polluante et destructrice de biodiversité.

"Il est parfois difficile d'expliquer aux autres agriculteurs que je gagne plus d'argent qu'avant mais que je produis moins !" observe Patrick.

En effet, si l'agroécologie coûte moins cher aux agriculteurs et à l'environnement, l'objectif est aussi qu'elle rapporte plus aux agriculteurs : l'idée est d'augmenter la qualité environnementale, sociale et éthique des produits - donc leur valeur ajoutée - et de la faire rémunérer par le consommateur. En diversifiant leurs productions et leurs débouchés, les agriculteurs trouvent également une plus grande sécurité face aux fluctuations des prix de l'alimentaire.

C'est une démarche au long cours, qui s'avère plus durable car les sols s'épuisent moins et la richesse de la biodiversité arme mieux les exploitations face aux aléas sanitaires et climatiques. Elles sont plus résilientes et mieux adaptées au contexte local. Cette meilleure prise en compte de la nature évite une dangereuse escalade de réponses artificielles à des problèmes introduits par l'Homme lui-même.

Comment et où se former à l'agroécologie ?

La fédération France Nature Environnement (FNE) propose des formations à l'ensemble des associations territoriales. Plus d'infos sur le site www.fne.asso.fr.

Le Ministère de l'agriculture propose une e-formation en ligne avec 4 modules pédagogiques afin de comprendre en quoi " produire autrement " est une réponse nécessaire de l'agriculture aux enjeux de la planète. Accessible à tous, elle formation regroupe des apports d'experts sur les principes fondateurs de l'agroécologie, des illustrations concrètes de systèmes visant la triple performance, des témoignages d'acteurs en vidéo, et même des quizz pour tester ses connaissances. A découvrir ici : www.infoma-foad.fr/PAE/co/PUBLICATIONS_web_module1_2.html

Terre et Humanisme propose également des stages qui alternent cours théoriques en salle et ateliers pratiques dans les jardins dans 5 centres de formation : en Ardèche méridionale, en Côtes-d'Armor, en Ariège, en Lozère et en Haute-Garonne. Infos sur le site http://terre-humanisme.org/formation. Comptez environ 485 euros pour un stage de 5 jours.

Pour découvrir les techniques de l'agroécologie en vidéo, cliquez ici.

Pour découvrir des témoignages d'agriculteurs, rendez-vous sur la plateforme d'échanges pour la mise en pratique de l'agroécologie : www.osez-agroecologie.org

A lire : "Les moissons du futur. Comment l'agroécologie peut nourrir le monde" de Marie-Monique Robin

A lire : "L'agroécologie, une éthique de vie. Changer d'agriculture pour changer de société" de Jacques Caplat avec Pierre Rabhi

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