L’évolution nécessaire de la publicité

Publié le 12 mai 2016 par Marketingcommunity @marketing_cmnty

La publicité telle que nous la connaissons a été conçue pour un monde où les médias existaient en quantité finie et où elle pouvait être imposée au consommateur.

L'équation était simple : davantage de spots publicitaires + davantage d'encarts dans la presse = plus de ventes. Ce modèle est mort et aujourd'hui sans aucun avenir.

Au départ, la publicité s'imposait et il n'y avait guère moyen de lui échapper. De plus, il était facile pour une marque d' " arroser " le nombre (limité) de médias nécessaires pour toucher sa cible. Laquelle cible était vaguement segmentée en fonction de la catégorie socioprofessionnelle, de l'âge, du sexe et de quelques autres facteurs faisant rentrer chacun dans une case composée de personnes ayant un dénominateur commun minimum. Aujourd'hui, la masse de médias disponibles est quasi illimitée et la publicité qui cherchait à " voler " l'attention du consommateur (rappelez-vous donc la fameuse anecdote du " temps de cerveau disponible ") est désormais une interruption et une intrusion que celui-ci fuit en changeant de chaîne ou en mettant en place des " bloqueurs de publicités " sur son navigateur internet. Et lorsque la publicité arrive, par miracle, à atteindre le consommateur, elle ne le touche pas.

Ce qui nous distingue en tant qu'individu n'est pas ce qui nous rapproche des autres.

Chacun a toujours voulu être reconnu comme étant unique et non comme un membre d'un vague ensemble avec lequel il partage quelques similarités. Ce qui nous distingue en tant qu'individu - et en tant que consommateur - n'est pas ce qui nous rapproche des autres, ce que l'on a en commun avec eux, mais au contraire ce qui nous en différencie. Les 20%, 30% ou 40% de traits qui nous sont propres et nous distinguent de ceux à qui nous ressemblons par ailleurs. L' Homme Digital, contrairement à ses prédécesseurs, a les moyens de faire prévaloir sa singularité, voire d'exiger sa prise en compte.

Tout d'abord parce que contrairement à ses prédécesseurs, il " existe " au vu et su de tous et peut étaler, proclamer, faire connaître sa singularité. Blogs, Facebook, Twitter, Youtube, LinkedIn sont autant de canaux pour promouvoir cette singularité, cette identité, cette marque personnelle. Tel le héros de la série Le Prisonnier, il n'entend plus être un numéro mais un homme libre.

Ensuite, parce qu'il sait qu'en fonction de ses actions sur le web, de ce que les marques savent déjà sur lui dans leurs fichiers clients - et a fortiori s'il est détendeur d'une carte de fidélité -, elles ont les moyens de comprendre sa singularité. Qui est-il, que fait-il, quelles sont ses valeurs, ses goûts, qui est-il en tant que professionnel, en tant que personne ? Et d'ailleurs, les marques ne se privent pas de collecter et d'analyser toutes ces données ; c'est simplement l'usage qui en est fait qui est inadéquat.

Aujourd'hui, la publicité ciblée sur internet n'est plus une nouveauté. Mais pour quel taux de clic ? quelle pertinence ? Trop de messages sont diffusés et pas nécessairement sur les " bons écrans ". La publicité doit - et va - non seulement devenir servicielle mais se déplacer vers de nouveaux écrans là et au moment où elle est pertinente. Et les possibilités sont infinies.

Pourquoi dois-je regarder les mêmes publicités que mon voisin du dessus qui regarde le même programme télévisé à la même heure ? Nous avons 30 ans d'écart, pas le même mode de vie ni les mêmes attentes. Il serait tellement plus efficace - et techniquement possible - de me diffuser un écran publicitaire fait pour moi, qui m'intéresserait au lieu de me donner envie de zapper ou aller me servir un verre à la cuisine !

Le digital permet de rentrer dans l'ère du marketing de l'intention.

On ne nous proposera plus de produits mais des services qui, à ce moment précis, résolvent un problème ou réalisent ce que l'on a en tête. Le message devient donc hautement contextuel, s'affiche sur l'écran le plus approprié pour ne pas gêner nos activités prioritaires et est directement " actionnable " : peu importe l'écran ou le format, puisqu'on y réagira depuis l'écran émetteur ou notre smartphone.

Dans ce contexte, les marques se trouvent contraintes de réinventer leur modèle marketing. Fini l'époque où elles " achetaient " des profils sociodémographiques (ah la fameuse ménagère de moins de 50 ans ...), elles se dirigent aujourd'hui vers des personnes qui ont tel besoin, tel problème à un moment donné. L' achat de données, de data, remplacera l'achat média puisque souvent le média sera le téléphone de la personne qui permettra non plus de toucher une personne qui un jour peut-être passera devant un magasin, mais quelqu'un qui est à proximité du magasin, dont on connaît les habitudes et à qui on peut proposer une offre immédiatement, une offre qui correspond au temps d'attente dans le magasin, aux stocks, aux habitudes de la personne à cette heure-ci de la journée. Un distributeur de café le fait déjà aux Etats-Unis.

Les données prennent une telle importance - certains parlent de nouveau pétrole - qu'elles vont devenir une monnaie.

Le produit ou le service sera offert ou vendu avec une large remise en contrepartie de l'accès aux données personnelles du client, lesquelles données permettront d'offrir des services personnalisés gratuits ou payants et de proposer des offres sans cesse plus ciblées, donc pertinentes, que le client verra comme une opportunité et non comme une intrusion. Ce modèle est-il viable à l'époque où de plus en plus de personnes sont inquiètes de l'utilisation faite de leurs données ? Une enquête de l'Institut Toluna à la demande de Havas Media, réalisée en 2014, montre que si 84% des sondés français sont effectivement inquiets, 45% sont déjà prêts à autoriser l'utilisation de leurs données si contrepartie financière. L'occasion d'un " deal " gagnant-gagnant avec une marque, pourvu que les conditions soient claires et régies par une certaine éthique ?

Extrait de

Tous digitalisés
Et si votre futur avait commencé sans vous ?
Manuel Diaz
Collection: Hors collection, Dunod
2015 - 184 pages - 140×220 mm
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