[critique] (7/10) LISTEN UP PHILIP par Matthieu EB.

Par Christian Papia @ChristianPAPIA

Synopsis : À la sortie de son deuxième roman, Philip est nerveux. D’autant plus que New York l’oppresse et que la relation avec sa petite amie Ashley se détériore. Quand Ike Zimmerman, son idole, l’invite dans sa maison de vacances, Philip trouve enfin la sérénité et parvient à se concentrer sur son sujet préféré : lui-même.

Alex Ross Perry, pionnier du mouvement mumblercore, signe un nouveau petit joyau indépendant après Color Wheel (2012) qui avait déjà fait beaucoup parlé de lui. On retrouve dans Listen Up Philip les caractéristiques esthétiques primaires de ce cinéma que l'on pourrait qualifier d'indie mais qui finalement va bien au-delà de cette appellation cloisonnée. En effet, Color Wheel dans sa lecture primaire, mettait en scène un road trip familial incestueux dont la conclusion finale étonnante n'était que la juste conséquence d'une relation entre un frère et une sœur que tout séparait mais qui finalement tendait vers une frustration amoureuse et physique logique. 

Son amour pour les esprits vagabonds solitaires, asociales et frustrés prend une toute autre forme dans Listen Up Philip qui dans le prolongement d'un cinéma chanté sans pur rebond narratif offre une caricature crue et pessimiste entre hommes et femmes. Il y a dans le cinéma d’Alex Ross Perry un grain de folie (la folie d'Elizabeth Moss dans Queen of Earth etla folie incestueuse dans The Color Wheel) qui est à prendre dans son sens premier et de façon totalement polysémique. Une folie qui se caractérise par un comportement anormal, en dehors des normes. Ici c'est Philip, qui dans sa bulle étanche détruit tout ce qu'il touche par son caractère sombre et presque vindicatif. Fuyant toutes formes de sympathie sociale, il se retrouve perdu aux côtés de son mentor, un ancien écrivain célèbre. Tous deux atteints par cette folie interne, de ce dérèglement social qui leur fait détester leur environnement rejetant toutes formes féminines. Leur comportant envers les femmes va de pair avec leur attitude misanthrope. C'est à l'image de Philip qui se refuse d'écouter et de comprendre ses conquêtes, que le narrateur et Alex Ross Perry nous exposent ce que justement, ils refusent d'entendre. Un narrateur externe décryptant chaque sentiment et situation. 

Habilement utilisé, parfois sur un dialogue, parfois sur une musique, il se glisse parfaitement dans la chronologie narrative. Or il y a dans les films d’Alex Ross Perry une sorte de fatalité, de sort qui ne peut être déjoué. La folie comme dans Queen of Earth est inévitable tout comme le rapprochement surnaturel du frère et de la sœur dans Color Wheel, Philip ne guérit pas et toutes ses expériences ne l'auront finalement pas changé. Dure réalité de la vie, ce personnage meurtri à la fois sadique et agaçant récolte ce qu'il a semé. Débordant d'arrogance et de clichés, ce personnage trouve finalement un équilibre et une force qui grâce à un dosage audacieux des perspectives dans le film, convainc. Œuvre hors-normes et délirante, Listen Up Philip est marquée par une esthétique automnale et cocon dans un environnement bourgeois et littéraire. Mais là où tous les ingrédients de cette tragédie humaine indie formeraient un film assez indigeste et prétentieux, Alex Ross Perry les façonne dans une époque elle aussi peu conformiste, presque hors du temps (des décors et costumes des années 70 sans aucune corrélation avec l’époque) pour créer une œuvre dense et singulière.

Listen Up Philip TRAILER 1 (2014) - Jason Schwartzman, Elisabeth Moss Movie HD

MATTHIEU EB.

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