[Critique] Stranger Things Saison 1 – Récit de l’ennui en 8 épisode

Par Neodandy @Mr_Esthete

Netflix, société américaine spécialisée dans la commercialisation du « contenu numérique », dispose des moyens de production et de séduction pour nous abonner à ses services. En juillet 2016, la série télévisée originale Stranger Things a bénéficié d’une excellente presse. Spectateurs et ordonnateurs d’opinions délivraient une conclusion unanime : immanquable, incontournable, incroyable … Et si Stranger Things était tout simplement indigeste ?

Originalement vôtre ?

Dans les années 1980, Hawkins, une petite ville américaine, devient le théâtre de disparitions inquiétantes d’enfants dont celle de Bill Wyers. Sa famille et ses amis de classe se persuadent ni de sa mort ni de sa fugue mais bien d’événements étranges.

Stranger Things fut sponsorisé par Donjons & Dragons Cie.

En toile de fond, la Guerre Froide grésille à tue-tête sur les écrans TV cathodiques, thanksgiving et Noël constituent des moments clefs de la série pour réunir les familles, les chambres des adolescents se peuplent d’affiches trouvées par hasard des grandes productions de Steven Spielberg et l’on joue aux jeux de rôle sur plateaux, Donjons et Dragons visiblement très plébiscité dans tous les foyers américains, après la fin de l’école. Le décor rapidement esquissé manquerait d’être exact sans un soupçon de complot : les Etats-Unis excellent à déployer CIA, à multiplier les agents secrets déguisés en réparateurs, à dissimuler des sociétés d’essais chimiques voire nucléaires grillagés par du barbelé à côté de petites villes sans histoires. A l’exemple du verre à moitié plein ou à moitié vide, l’on peut y voir un cadre rassurant, confortable voire loué pour sa simplicité ou tout simplement une trame convenue, agaçante, prête à se caricaturer elle-même. Originale dans le nom, issue d’un scénario rédigé par Matt et Ross Duffer  (Surnommé The Duffer Brothers aux Etats-Unis) pour être adapté, certes, la série télévisée dite référentielle recycle à n’en plus pouvoir. Dans la même catégorie, accueilli avec beaucoup moins d’emphase ou d’adhésion revendiquée à la nostalgie, de nombreux points communs pourraient relier Stranger Things à Super 8 de J.J. Abrams. Dans le dernier cas, Super 8 eut l’honnêteté d’être un projet personnel, un plaisir égocentrique avoué du réalisateur et échelonné sur 114 minutes et non pas destiné à traîner longuement un scénario épais comme « une ficelle d’acrobate ».

Série télévisée, un prétexte idéal

Références et insouciance, impossible de ne pas penser à E.T. et d’autres idées parsemées … Avec de nombreuses et fréquentes longueurs.

Aux sources de l’horreur, inspirations fièrement cultivées par Stranger Things, le spectateur dispose souvent d’un temps d’avance sur les personnages. Quel que soit leurs sorts, l’effet fonctionne sur  une heure, s’amollit au-delà, fond comme neige au soleil sur une moyenne de 6 h. (A raison de 8 épisodes d’une moyenne de 50 minutes environ.) La force attractive et populaire de Breaking Bad ou de Game of Thrones, deux créations capable de s’adresser à une audience parfois peu habituée aux séries télévisées, s’est notamment jouée sur le bouche à oreilles et une certaine habileté à manier le suspens. Or, en 8 épisodes, rien n’interroge le spectateur.

L’épisode 8 suggère qu’une saison 2 en préparation pourrait encore avoir besoin des pions de Donjons & Dragons pour connaître leur(s) futur(s) adversaires.

L’effort de simplification porté haut par les créateurs de la série télévisée se transforme en infantilisation : l’apparition du monstre central de l’histoire (Nommé Demogorgon par les enfants-acteurs en référence à Donjons et Dragons mais, en réalité, sans nom.) n’est entourée d’aucun doute quant à la disparition de Bill Wyders, celle-ci se transforme un personnage autrefois marginal en personnalité centrale de chaque épisode.  Peut-être conscients d’avoir abusé du temps libre des spectateurs, nombre d’indices incite à visionner au moins par curiosité la deuxième saison annoncée en août 2016 dernier : quel est l’avenir des personnages ? Qu’est-ce que le « monde inversé » ? (Upside-down dans VOSTFR) Comment est né le monstre-plante de la Saison 1 de Stranger Things ? Procès sévère, probablement, la série télévisée recèle d’au moins un atout : ses acteurs, une actrice longtemps disparue du petit comme du grand écran.

Winona Ryder renoue avec le fantastique

Winona Ryder façonne son rôle et contribue grandement à rendre le personnage singulièrement intéressant.

Depuis Edward aux mains d’argent (1990) ou Beetlejuice (1998), deux longs-métrages de Tim Burton, Winona Ryder n’est pas apparue dans un rôle ou dans une réalisation capable d’honorer l’actrice. Doublages de dessins animés, échecs commerciaux, ou vie privée mis à l’écart, son retour médiatique calculé dans un second rôle, celui de la mère de Bill Wyders, lui permettent d’être à nouveau au-devant de la scène. Si d’innombrables qualificatifs valorisent la personnalité surnaturelle de Onze (Eleven), l’héroïne mutique aux pouvoirs surnaturels jouée par Millie Bobby Brown, Winona Ryder crée l’attachement. Désemparée, déconsidérée, elle devient la seule à chercher des solutions folles pour retrouver son fils.

Muette, androgyne, Millie Bobby Brown ne surjoue pas l’étrangeté de son rôle. La saison 2 se contentera, très probablement, de préciser de nombreux éléments non abordés.

Stranger Things manque d’émotions dans sa représentation d’une société américaine convenue animée par sa rivalité à l’URSS. Sa longueur l’a empêché d’être un long-métrage honnête, son absence de suspens le range au bord sage des divertissements sans pouvoir prétendre à davantage. Pourtant, rares sont les réalisations à savoir créer une harmonie d’acteurs où l’enfance est à l’honneur au côté d’acteurs compétents. Une qualité portée par deux jeux d’actrice : si Millie Bobby Brown détient l’un de ses premiers grands rôles à l’écran, Winona Ryder n’a pas à rougir d’un retour réussi à travers un personnage secondaire incarné à juste mesure pour devenir bien plus prioritaire.

On a détesté :

-Un format « série télévisée » sans suspens.

-La Guerre Froide, un nerf inoubliable ressassé une énième fois.

-Suspicion et complots à chaque épisode.

-D’hommages en célébrations de la simplicité des années 1980, où est l’identité de Stranger Thing ?

-Les points forts de l’intrigue relayés à une Saison 2.

On a aimé :

+ Millie Brown, l’actrice méconnaissable et quasi androgyne de Onze (Eleven).

+  Le retour cinématographique de Winona Ryder.

+ Une série télévisée où enfants et adultes jouent ensemble, en parfaite cohérence.