La région lombaire de la moelle épinière contient des réseaux complexes de neurones qui activent les muscles des jambes lorsque l’on marche. Des faisceaux de nerfs issus du cerveau transportent à la moelle épinière l’information nécessaire pour activer les muscles de la jambe dans le but souhaité. Mais, en cas de lésions à la moelle épinière, ces informations ne parviennent plus aux muscles des jambes, ce qui conduit à la paralysie. Même si le cortex moteur est toujours capable de produire l’activité électrique contrôlant la marche, et même si, de leur côté, les réseaux neuronaux qui activent les muscles de la jambe paralysée demeurent intacts et peuvent toujours générer des mouvements des jambes.
Le système neuroprosthétique appelé » interface cerveau-moelle épinière » va court-circuiter la lésion et rétablir la communication, en temps réel et sans fil, entre le cerveau et la moelle épinière. Il décode l’activité cérébrale associée aux mouvements de marche et relaie cette information à la moelle épinière – en aval de la lésion – par des électrodes qui stimulent la voie neuronale activant les muscles pendant la locomotion naturelle. Sa grande innovation, sa capacité à renouer le lien, à distance, entre le décodage du cerveau et la stimulation de la moelle épinière.
Ici, c’est le système sans fil qui travaille en temps réel qui permet au primate de se comporter librement, sans la contrainte d’une électronique raccordée par des câbles. Cela signifie que les chercheurs ont su » récupérer » les signaux cérébraux qui encodent les mouvements de flexion et d’extension de la jambe avec un algorithme mathématique puis retransmettre ces signaux de manière à sensibiliser les zones sensibles de la moelle épinière qui induisent le mouvement de la marche. Les scientifiques montrent que pour des lésions partielles, l’interface cerveau-moelle épinière fonctionne instantanément. L’interface devrait aussi fonctionner pour des lésions plus sévères de la moelle épinière, selon les scientifiques, vraisemblablement avec l’aide d’agents pharmacologiques. Il est à noter que pour des lésions partielles de la moelle épinière, le primate est capable de retrouver spontanément une mobilité complète après trois mois de réhabilitation.
Conçue à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), en Suisse, l’interface neuroprosthétique est néanmoins le fruit d’une collaboration internationale dont le département R&D du fabricant Medtronic et des équipes de recherche de la Brown University, de l’Institut Frauenhofer ICT-IMM et a été testée à l’Université de Bordeaux, au Motac Neuroscience et à l’Hôpital universitaire de Lausanne.
Sources: Nature 09 November 2016 doi:10.1038/nature20118 A brain–spine interface alleviating gait deficits after spinal cord injury in primates (Visuel EPFL)