Jack Palmer, T15 : Palmer en Bretagne

Par Belzaran


Titre : Jack Palmer, T15 : Jack Palmer en Bretagne
Scénariste : René Pétillon
Dessinateur : René Pétillon
Parution : Septembre 2013


Jack Palmer est un héros de mon enfance dont le sens où les albums contant ses aventures habillaient la bibliothèque parentale. Petit, j’avais du mal à saisir pleinement la richesse et l’attrait de son univers. C’est donc avec les années que j’ai appris à apprécier La dent creuse ou Les disparus d’Apostrophe. Mon affection pour le curieux détective privé est suffisamment forte pour que je guette chaque nouvelle parution de ses enquêtes. La dernière en date s’intitule sobrement Palmer en Bretagne. La couverture nous présente le héros debout sur un tas de caillou au milieu de la mer, trompé apparemment par la marée. Ce bouquin est édité chez Dargaud et est comme toujours écrit par Pétillon. Son format est classique et son nombre de pages avoisine la cinquantaine. Il coûte quatorze euros.

Le résumé proposé sur le site BDgest.com est le suivant : « C’est en Bretagne que se déroule cette quinzième enquête de Jack Palmer. Après ses missions en Corse et une plongée dans un paradis fiscal proche du Liechtenstein, Jack Palmer est engagé comme garde du corps auprès d’un milliardaire collectionneur d’art contemporain. Tout pourrait être idyllique dans cette région magnifique. Hélas ! Les algues vertes, la cupidité, un crime mystérieux et la légendaire maladresse du détective vont transformer ce séjour breton en un réjouissant désordre, dans lequel René Pétillon déploie son humour ravageur et sa connaissance intime des particularismes locaux. »

Ce tome peut se lire indépendamment des précédents opus de la saga. Un néophyte n’aura aucun mal à se faire une image précise du personnage de Jack Palmer. L’imaginer garde du corps est finalement assez difficile en tenant un raisonnement rationnel. Cela fait partie de l’attrait de la série. Découvrir ce détective sans aucun talent, particulièrement gaffeur et a priori perpétuellement en décalage avec la réalité donne lieu à de vrais moments de rires. Pourvu de son célèbre chapeau et de son légendaire imperméable, il est un contre-exemple au dicton « L’habit ne fait pas le moine ».

Jouer des stéréotypes et particularismes bretons

Le titre me laisser penser qu’à la manière d’un album de Astérix, l’auteur allait jouer des stéréotypes et des particularismes bretons pour chatouiller nos zygomatiques. La Bretagne possède un nombre de clichés proche de celui touchant les corses. L’enquête corse m’avait fait beaucoup rire, j’en espérais donc tout autant de ce Palmer en Bretagne. La marée, les éleveurs de porcs, les algues vertes, les fruits de met, le kouign-amann… Personne n’est oublié. Néanmoins, la mayonnaise ne prend jamais vraiment. Les références locales sont déposées comme des pastilles et ne sont pas réellement intégrés dans l’intrigue. Cela fait qu’on les remarque mais sans pour autant en rire ou même en sourire. Certaines font mouche mais au final, cet aspect de l’ouvrage est assez décevant.

La dimension folklorique bretonne accompagne et entoure une intrigue utilisant les codes du huis clos. Tous les personnages semblent coincés sur une petite île au gré de la marée. Pétillon nous fait découvrir un groupe de personnes relativement riches gravitant dans des arcanes médiatiques. L’art contemporain est au centre de l’histoire. Là encore, les personnages caricaturaux peuvent facilement donner lieu à quelques réalités grinçantes sur les grands de ce monde. Certaines piques sont efficaces mais je les trouve également assez répétitives. Le casting est important en quantité. Mais cette diversité n’est pas suffisamment exploitée à mes yeux. Elle devrait donner lieu à un humour à plusieurs cordes. Finalement l’ensemble apparait monotone sans variation de tons. C’est dommage. Cela fait d’ailleurs que l’enquête menée ne m’a jamais réellement passionnée. Je suis resté assez spectateur quant à la résolution. C’est dommage.

Pétillon possède un style graphique facilement reconnaissable. J’apprécie toujours devoir un dessinateur posséder une réelle identité. Cette qualité est relativement rare chez les auteurs qui se chargent à la fois du scénario et du dessin. Personnellement, je suis plutôt conquis par le trait de cet écrivain. Les personnages sont aisément reconnaissables et possèdent rapidement une existence dans notre univers de lecteur. Les décors sont également habilement travaillés. Je trouve les cases relativement denses sans pour autant être surchargées. Les couleurs sont savamment déposées pour alléger un petit peu la densité graphique de certaines planches. Dans le domaine des illustrations, je trouve que Palmer en Bretagne est un excellent cru. 

Au final, cet album est assez inégal. Certains moments sont bien construits et très drôles. D’autres sont moins fins car répétitifs ou prévisibles. Je le trouve moins dense sur le plan qualitatif que les récents L’affaire du voile ou L’enquête corse. Les familiers de Jack Palmer prendront plaisir à retrouver ce anti-héros incompétent. Quant aux novices, je leur conseille de commencer par un autre épisode de ses aventures. Cela leur permettra de prendre conscience de toute l’aura qui accompagne les pérégrinations de ce détective unique dans son genre…