Sur les pas d’Abraham à Harran. Turquie

Publié le 26 octobre 2016 par Actu34

" Terah prit son fils Abram, son petit-fils lot, fils de Harân, et sa bru Saraï, femme d'Abram. Il les fit sortir d'Ur des Chaldéens pour aller au pays de Canaan, mais, arrivés à Harân, ils s'y établirent. [...]

Abram avait soixante-quinze ans lorsqu'il quitta Harân. Abram prit sa femme Saraï, son neveu Lot, tout l'avoir qu'ils avaient amassé et le personnel qu'ils avaient acquis à Harân. Ils se mirent en route pour le pays de Canaan et ils y arrivèrent. " La Genèse.

Lors d'un " road trip " d'Islamabad à Istanbul, j'ai souhaité faire une halte à Harran, le Harân de la Bible, un lieu qui se situe à une trentaine de kilomètres au sud d'Urfa, aujourd'hui nommée Şanlıurfa, Urfa la Glorieuse, l'ancienne Edesse. Par la même occasion, j'allais découvrir que la ville d'Urfa où je séjournai était aussi très liée à Abraham, puisqu'il y serait né et y aurait grandi.

Selon la tradition islamique, Urfa serait aussi l'Ur des Chaldéens (Ur Kasdim) de la Bible, le lieu de la naissance d'Abraham, que de nombreux chercheurs situent plutôt dans l'Iraq actuel, la fameuse Ur de Mésopotamie. Mais rien ne permet d'avoir la certitude de l'emplacement réel d'Ur des Chaldéens. Cependant, à Urfa, point de chrétiens tandis que les pèlerins musulmans affluent en permanence vers la grotte où serait né Abraham. Les femmes, en particulier, viennent accompagnées de leurs jeunes enfants, boire et leur faire boire l'eau supposée les guérir.

Pour les musulmans, pas de doute, le lieu de naissance d'Abraham est bien là. Et voici ce que l'on peut lire à l'entrée de la grotte nommée Mevlid-i Halil Cave (mevlid signifie " sainte nativité ") : " Selon la croyance, Abraham est né dans cette grotte. D'après la légende, lorsque les oracles du roi Nimrod lui apprirent qu'un fils allait naître, qui mettrait fin à sa dynastie et à sa religion, Nimrod ordonna que l'on tue tous les garçons nés cette année. Cette année-là, Nuna, la mère d'Abraham, découvrit qu'elle était enceinte. Lorsque la délivrance arriva, elle se cacha dans cette grotte où nacquit Abraham. Terah remit à Nimrod le nouveau-né d'une de ses esclaves en le faisant passer pour son propre fils. Après la naissance, la mère d'Abraham se rendait chaque jour en secret dans la grotte pour nourrir son fils. "

L'ancienne citadelle surplombe la grotte et la ville nouvelle d'Urfa. A l'intérieur de la citadelle se trouvait le palais du roi Nimrod, dont Terah, le père d'Abraham, était le premier ministre. A l'époque, les Mésopotamiens vénéraient le dieu de la Lune, Sîn, le roi des dieux. Ainsi en était-il de Terah et Nimrod.

L'on raconte qu'Abraham un jour brisa les statues des dieux et que suite à cela, Nimrod le fit immoler par le feu. Selon la légende, le Dieu d'Abraham apaisa la chaleur des flammes et Abraham fut sauvé. Aujourd'hui, à l'emplacement du bûcher se trouve Balikli Göl, un long bassin empli de poissons qui sont, dit-on ici, chacun une braise éteinte du feu dans lequel Abraham fut plongé.

Il existe de nombreuses versions concernant la jeunesse d'Abraham, la plupart s'étant transmises de bouche à oreille, et les habitants d'Urfa ont tous leur histoire à raconter. La tradition juive quant à elle, donne des informations intéressantes, et je vous propose de lire ceci :

Abraham's early life Nimrod and Abraham

L'histoire ne dit pas pourquoi par la suite Thera et sa famille s'établirent à Harân. Probablement parce qu'elle était une des cités majeures de Haute Mésopotamie. Ce qui est certain, c'est qu'ils y vécurent longtemps puisque Terah y mourut à un âge avancé (deux cent cinq ans) et qu' " Abram avait soixante-quinze ans lorsqu'il quitta Harân ".

Aujourd'hui, Harran (orthographe actuelle), consiste en une série de monticules arides parsemés de pierres, ruines d'où n'émergent plus qu'une des portes d'entrée de l'ancienne citadelle, le minaret de la plus ancienne mosquée d'Anatolie (postérieure à Abraham évidemment) et les ruines de la plus ancienne université au monde.

La citadelle d'Harran aurait été bâtie à l'emplacement d'un ancien temple dédié à Sîn, le dieu de la Lune, roi des dieux vénérés par les Mésopotamiens.

A Harran se trouvait la première université au monde et l'on raconte ici qu'Abraham y avait étudié, en particulier l'astronomie.

Alors que j'avais toujours imaginé Abraham comme un berger marchant sur les chemins de Mésopotamie, je quittai Urfa avec l'idée d'un Abraham fils de très bonne famille, citadin et érudit.

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À propos de Sylvie Lasserre

Vous en une ligne Sylvie Lasserre est grand reporter et photographe. Elle se passionne en particulier pour l'Asie centrale et le monde türk, qui s'étend de la Turquie à la Chine en passant par l'Asie centrale. Aujourd'hui, elle travaille pour la presse française et internationale : Le Monde 2, Le Soir, Le Temps, Die Welt, L'Actualité, La Stampa, Internazionale, Courrier international, Libération, Le Monde, Marie-Claire et Elle international, Cosmopolitan, La Presse, L'Hebdo, Hommes et Libertés, The Guardian, Les Echos, L'Express mag... Elle est membre de la Société Asiatique. Note à l'attention des lecteurs Vous êtes de plus en plus nombreuses et nombreux à me contacter au sujet de l'Asie centrale ou du journalisme et je vous en remercie. Je ne peux malheureusement plus répondre ni renseigner tout le monde, faute de temps. J'en suis désolée. Aussi ai-je décidé d'instaurer des rencontres autour de l'Asie centrale. Celles-ci se tiendront une ou deux fois par mois, dans un café parisien. Ce sera l'occasion de nous retrouver de manière informelle autour d'un café et d'échanger des informations. Pour être informé de la date de la prochaine rencontre, il vous suffit de vous abonner à la newsletter de ce blog (page d'accueil, en haut à gauche). C'est par ce biais que vous serez prévenus. Merci encore à toutes et à tous de l'intérêt que vous manifestez pour ce blog. Contact : sylvielasserre@hotmail.com Biographie Sylvie Lasserre est docteur en physique. En 2004 elle a choisi de quitter une carrière d'ingénieur pour se consacrer au journalisme, à la photographie et à l'étude des peuples türks d'Asie centrale. Aujourd'hui elle est grand reporter et vit entre Paris, l'Asie centrale et la Turquie. Née au Maroc, elle a vécu en Belgique et en Italie avant de se baser en France. Elle parle six langues. Aujourd'hui, elle partage son temps entre le reportage, la photographie, l'ethnologie et l'écriture. Ses derniers travaux l'ont menée au Kazakhstan, au Kirghizistan, en Egypte, au Maroc, en Suisse, en Iran, en Ouzbékistan, au Turkménistan, en Turquie, en Grèce, au Tadjikistan, en Chine... A propos de ce blog Sauf exception, et alors je le signale, vous ne trouverez aucun de mes reportages sur ce blog, puisque je les destine à la presse écrite. Ici, je regroupe des anecdotes, des récits, des impressions, parfois aussi des prises de positions... bref, un peu tout ce qui se passe " hors du champ " de mes reportages, et qui, bien que très intéressant, ne trouve pas sa place dans un support magazine. Vous l'aurez peut-être remarqué, je ne respecte aucune chronologie dans ce blog. Certains me croiront au Kirghizistan alors que je suis à Paris, et vice versa ;-) Les notes sont écrites au gré de mes envies ou de l'actualité. Mais leur ordre - ou leur désordre - n'entâche en rien la réalité. Grâce à ce blog j'espère vous donner une image de l'Asie centrale plus réaliste - même s'il s'agit de MA réalité, très subjective - que celle, lisse et formatée, que l'on trouve dans la presse en général ou bien dans les guides touristiques. Non ! L'Asie centrale ne se limite pas à la Route de la Soie... Tous les textes, photos et enregistrements sonores de ce blog sont protégés par copyright et ne peuvent pas être réutilisés sans mon accord : © Sylvie Lasserre. Photo © Taalaïbek Usubaliev